Ouattara-Boni et la crise malienne: deux “généraux” sur le front

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Le président de l’Union Africaine Thomas Boni Yayi,

Les noms de Alassane Dramane Ouattara et de Thomas Yayi Boni resteront intimement liés à la crise malienne 2012, tant les présidents ivoirien et béninois ont été (et le sont toujours) de tous les fronts depuis le début de la crise, aux premières heures du 22 mars. Comme dans la fable du présentateur vedette Télé et du caméraman, au soir de la délivrance du Mali, le président français, Hollande, sera celui qui va cueillir les lauriers de la victoire, mais Ado et Boni s’érigent comme les pistons qui ont donné l’éclat nécessaire à cette victoire. Depuis Abidjan, Cotonou, Dakar et Ouaga, ou avec leurs bâtons de pèlerins à Paris, Montréal, New York etc. ils n’ont manqué aucune tribune pour attirer l’attention de la communauté internationale sur l’absolue nécessité de booter les terroristes islamistes hors du Mali. Et de redonner son intégrité territoriale à ce pays, modèle de démocratie, mais surtout riche d’une culture millénaire. Aujourd’hui, avec le déclenchement des frappes, ils peuvent dormir d’un œil, en attendant le jour de la Gloire.

 

Si Alassane Ouattara et Yayi Boni ne s’étaient pas montrés aussi rigoureux que jusqu’auboutistes, l’ex junte serait aujourd’hui toujours au pouvoir, donc l’ordre constitutionnel n’aurait pas été rétabli. Quel aurait été le visage actuel du Mali ? Chacun peut le deviner, mais nul ne saurait le dire avec exactitude. François Hollande a pris le train en marche, étant venu aux affaires en mai, soit un peu plus d’un mois après le déclenchement de la crise. Mais déjà, le président dela Cedeao(Ouattara) et celui de l’Union africaine (Boni) avait posé les jalons du rétablissement de l’ordre constitutionnel, acte n°1 d’un long processus de la résolution de la crise malienne. Dès que le nouveau président français a pris fonction, les deux chefs d’Etat ont accouru vers lui pour l’impliquer dans le dossier et lui demander d’être le chef de file de la longue bataille pour la délivrance du Mali.

Dans leur combat individuel, nos deux « Généraux » ont chacun sa manière de lutter sur le front.

 

Ouattara : Les gongs du Prince de Kong

Le président dela Communautééconomique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), est un grand ennemi des coups de forces. Et Alassane Ouattara l’a prouvé aux putschistes du 22 mars 2012 qui s’étaient découvert un nouveau destin de dirigeants, au mépris de la constitution malienne. Sachant que la meilleure manière de sécuriser son pays, c’est d’assurer la quiétude chez le voisin, « Ado »  a fait de la paix et la sécurité, le moteur de développement de son pays et aussi de l’environnement immédiat. C’est pourquoi, dès le jour du coup d’Etat au Mali, le président ivoirien a décidé de taper du poing sur la table et d’être le plus rigoureux possible afin que les putschistes de Bamako ne soient tentés de rester au pouvoir.

A la faveur de plusieurs sommets de chefs d’Etat dela Cedeao, il a suscité (et pris) des mesures et des menaces qui ont eu raison de la junte. Entre autres, le rappel des ambassadeurs accrédités au Mali, la fermeture des frontières et des ports comme pour créer la disette, sans oublier tous les flux monétaire et financier en direction du Mali. Tout cela, assorti d’une dose de négociations a fini par ramener les néo-putschistes à l’évidence. La junte abdique et jette l’éponge, en signant l’Accord-cadre du 6 avril. Le Mali retourne à la légalité constitutionnelle avec l’accession au pouvoir du Pr. Dioncounda Traoré et la désignation d’un Premier ministre, Cheick Modibo Diarra. Un temps record : 22 mars-17 avril.

Avec ce premier grand succès, Alassane Ouattara réussissait son entrée dans l’histoire par la grande porte.
Désormais, les Maliens avaient les yeux braqués vers le nord, entièrement annexé par des rebelles et des mouvements terroristes islamistes. Cela devenait du coup, le second combat de Ouattara. Pour qui, la défense d’un pays et le combat tous azimuts pour la démocratie constituent un serment. Le respect de la parole donnée reste un sacerdoce pour celui que ses frères Malinké appellent affectueusement « Kankelétigui », l’homme qui n’a qu’une seule parole. Quand il décide ou prend un engagement, cela est à l’avance accompli. Ce trait de caractère est un héritage sacré pour le Prince de Kong.

Pour la reconquête de l’intégrité du territoire malien, il multiplie les sommets des chefs d’Etat dela Cedeaoet les réunions du comité des chefs d’Etat major. Ainsi que des appels pressants à la communauté internationale. Il a été entendu, avec le vote des résolutions 2056 et 2071.

Plus récemment, Ado reçoit les représentants spéciaux du secrétaire général de l’Onu en Côte d’Ivoire Bert Koenders, et pour l’Afrique de l’Ouest, Said Djinnit et l’Envoyé spécial de l’Onu pour le Sahel, Romano Prodi, pour leur signifier qu’il veut une résolution sur la crise malienne. A cette occasion, Alassane Ouattara a présenté à Romano Prodi la gravité de la situation au nord-Mali, marquée par des violations très graves des droits de l’homme. «Nous comptons sur vous. Les menaces sont grandes non seulement pour le nord Mali, mais pour toute l’Afrique de l’Ouest. Nous souhaitons obtenir la résolution des Nations unies le plus tôt possible, car nos chefs d’Etat-major ont élaboré un plan d’intervention qui sera fait approuver par l’ensemble de la communauté internationale», avait déclaré le président en exercice dela Cedeao. Quia insisté sur l’urgence d’avoir cette résolution du Conseil de sécurité. C’était le 18 décembre 2012. Là aussi, le président ivoirien a été suivi avec l’adoption de la résolution 2085, légitimant l’intervention française sur notre sol.

Ce n’est pas tout. Depuis le 11 janvier 2013, le président dela Cedeaoest en mouvement pour recueillir la plus grande adhésion des partenaires à l’intervention militaire enclenchée au Mali. Ainsi, le 15 janvier dernier, le président ivoirien et de l’institution sous régionale était en voyage privé en France et d’Etat en Allemagne. La crise malienne a été évoquée avec ses interlocuteurs.

Le dernier acte de rang de Alassane Dramane Ouattara, c’est la signature par la Cedeaode l’ordre de déploiement de la force internationale de soutien au Mali (Misma), le 19 janvier. Dans ce cadre, lui-même a décidé d’envoyer 500 militaires sur le front des opérations.

Les yeux sont désormais rivés sur la conférence des donateurs (pour financerla Misma), prévue le 29 janvier au siège de l’Union africaine à Addis-Abeba. Le montant s’élève à plus de 240 milliards de FCFA. Pour le moment.

 

Boni : le gladiateur

A la différence de son homologue ivoirien, Yayi Boni est le « guerrier » qui n’a pas la langue de bois : il va droit au but, avec des mots crus et drus que ce soit pour brandir le bâton à la junte militaire du Mali ou pour dépeindre la situation du Mali en face des décideurs de la communauté internationale. Autant, il s’emporte quand il se sent secoué par une situation défavorable, autant il explose (de joie) lorsqu’une bonne nouvelle tombe. Deux cas pratiques. D’un côté, aux premières heures du coup d’Etat du 22 mars, le président en exercice de l’Union africaine avait quasiment injurié la junte… De l’autre, quand les Français ont frappé à Konna, Yayi Boni a avoué lui-même qu’il était aux anges. Des témoins murmurent qu’il a exhibé des pas de danse du terroir pour manifester ce grand événement qui marque le début du couronnement d’un combat qu’il a engagé exactement le 22 mars 2012, le jour du coup d’Etat, en condamnant fermement ce putsch.

Et dès le lendemain, 23 mars, l’Union africaine a suspendu le Mali jusqu’au rétablissement effectif de l’ordre constitutionnel. Si tel n’était pas le cas dans les plus brefs délais, l’UA menaçait de prendre des sanctions qui pourraient inclure des interdictions de voyage et le gel d’avoirs à l’étranger des auteurs du putsch.

Parallèlement à cette gestion interafricaine, Thomas Yayi Boni engage la bataille sur le front international. Le 7 mai 2012, il sollicite (déjà) l’implication de François Hollande, élu moins de 24 heures président dela Républiquede France. En effet, il confiait sur une radio étrangère : « Aujourd’hui sous les auspices dela Communautééconomique des Etats de l’Afrique de l’Ouest appuyée par l’Union africaine, nous sommes en train de travailler pour que le Mali revienne à l’ordre constitutionnel, que nous puissions rétablir son intégrité territoriale. Nous avons décidé d’appuyer nos frères maliens, faire en sorte qu’une Force interafricaine en appui au gouvernement légitime en place soit envoyée pour soutenir le peuple malien. Mais nous voulons le faire sous la couverture onusienne basée sur une résolution forte qui engage la communauté internationale. Nous avons besoin de l’appui logistique parce qu’il s’agit aujourd’hui d’un pays terroriste. Nous ne voulons pas construire un Afghanistan africain. C’est pourquoi nous pensons quela Francepeut jouer un rôle de leadership au sein du Conseil de sécurité en tant que membre permanent. Alors, mon souhait est que le président Hollande puisse jouer un rôle de Leadership pour que les questions qui concernent l’Afrique soient examinées avec beaucoup d’attention ».

Mais, le président en exercice de l’UA n’en reste pas là. Le 29 mai, Thomas Boni Yayi se rend à l’Elysée chez François Hollande. Les deux hommes ont largement évoqué la situation au Mali. François Hollande a apporté son soutien à la Cedeao et à l’Union africaine et a demandé aux Africains de saisir directement le Conseil de sécurité des Nations unies pour régler la crise dans le nord du pays. C’est la première fois, en tant que président de la République, que François Hollande s’exprime sur les grandes questions africaines et Yayi Boni est le premier chef d’Etat africain reçu au palais de l’Elysée depuis l’élection de son homologue français. Ce jour là, François Hollande précise que «c’est un double symbole ».

Le 14 juillet 2012, il convoque le 19ème sommet de l’Union africaine consacré au Mali et àla RDC, sommet marqué par l’élection de la sud-Africaine Nkosazana Dlamini-Zuma à la tête dela Commissionde l’Union africaine. Au cours de cette rencontre, une déclaration solennelle a été adoptée sur le Mali. Le document réaffirme le soutien de l’UA aux efforts dela Cedeao ; appelle à la constitution rapide d’un gouvernement d’union nationale à Bamako, exige l’arrêt des interférences des militaires de la junte dans le processus politique.

Cette déclaration solennelle menace de sanctions les personnalités dont les actions nuisent au processus de transition. Menace de sanctions également contre les terroristes et les groupes criminels qui opèrent dans le nord du pays.

Cette déclaration lance également un appel à tous les Etats membres pour qu’ils soutiennent l’action de l’UA et dela Cedeaoau Mali. Le Tchad est nommément cité comme pouvant apporter son aide. En coulisses, de nombreux diplomates estiment que le recours aux militaires tchadiens pourrait être déterminant pour la reconquête du nord du Mali. Aujourd’hui, l’histoire donne raison à tout ce beau monde.

Le président de l’UA a été impliqué de très près à tous les sommets, réunions et sollicitations qui ont conduit à l’adoption des résolutions sur le Mali et abouti à la précieuse résolution 2085 qui autorise l’intervention militaire internationale au Mali.

Toujours prompt, le président en exercice de l’Union africaine, a pris dès le 11 janvier son bâton de pèlerin pour rencontrer le Premier ministre canadien auprès de qui il a sollicité l’intervention du Canada dans la résolution de la crise malienne. Boni Yayi a notamment demandé à Stephen Harpers d’intervenir « pour que l’Otan vienne en renfort à la coalition internationale qui doit être formée, conformément à une résolution de l’Onu adoptée fin décembre ».

Enfin, dans le cadre dela Misma, le 15 janvier, le président Boni a décidé d’engager des forces béninoises au Mali : environ 500 éléments dont une unité de police constituée et une compagnie d’infanterie motorisée.

Sékou Tamboura

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9 COMMENTAIRES

  1. Je crois que tous les chefs d’État de la sous région sont mobilisés pour la Mali. Merci à tous

  2. Remercions Blaise egalement pour sa dualite, il negocie en meme temps
    Nous aide.on ne voit pas la sueur du laboureur sous la pluie
    Un dicton bambara.merci a tous ces pays presents ou pas.

    • C’est vrai mon frere. On ne peut citer le nom de ces deux heros du Mali sans ajouter le nom du parrain de l’UEMOA. Blaise est effectivement le laboureur sous la pluie… N’oublions pas aussi le president nigerien qui n’a manque d’aucune occasion pour assener ses verites! Par contre ton avatar… j’espere que l’Afrique votera contre lui quand il se representera.

  3. moi je suis béninois pas pour me venter en tout cas …mais je sais d’après mes infos .c’est yayi boni qui a convaincu idriss deby car les deux sont de tres bons amis intimes

  4. Houps! Sékou Tamboura? Un exemple parfait du Nègre-griot qui tient la porte de la pissotière au Satrape d’Abidjan et de Cotonou; et qui à leur sortie Secoue des quenelles pour battre son Tambour à niaiseries. L’exemple parfait du journaleux des tropiques qui, au lieu de mettre la situation en perspective critique, tisse des lauriers niaiseux à des criminels mis ici au pouvoir par des intérêts étrangers. Pathétique quand on veut manger dans des écuelles pourries! Faudra pas qu’il oublie de poster sa chiure à Abidjan et Cotonou.

  5. Cet article est le meilleur. Tu dois écrire tres longtemps. J’aime lire le commentaire de Moussa AG sur ca.

    Que Dieu vous benisse. Amen

  6. Ha dieu merci avec les chefs d’etat actuel l’Afrique peut dormir tranquille ils sont vraiment bien et pense à nous

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