Le Mercredi 25 novembre 2021, le Conseil des ministres a adopté le projet de loi portant loi électorale, en réponse, explique-t-on dans le communiqué, aux nombreuses insuffisances du mécanisme électoral en vigueur, supposément à l’origine des crises post-électorales aux yeux des initiateurs. La nouvelle loi en gestation va ainsi consacrer l’avènement de l’Organe unique de gestion des élections qui est une recommandation phare du Dialogue national inclusif ainsi que du Symposium sur le processus électoral, entre autres fora de réflexion sur le processus électoral malien.
En plus d’une autorité indépendante de gestion des opérations électorales et référendaires, la nouvelle loi se singularise par d’autres innovations en rapport avec les circonscriptions électorales de référence pour l’es consultations législatives, le mode de scrutin, le système de parrainage des candidats, le dispositif de publication de résultats, le plafonnement et le contrôle des dépenses de campagne électorale ainsi que l’encadrement et le renforcement de l’observation électorale. L’adoption du texte, indique le communiqué du Conseil des ministres «permettra de réduire le nombre de structures intervenant dans l’organisation des élections, de garantir l’efficience, la performance et la crédibilité dans la gestion des élections»
Seulement voilà : 24 heures à peine après non adoption, une large majorité de partis et regroupements partis politiques affirment ne pas s’y reconnaître. Le consensus et inclusivité dont elle est créditée par ses initiateurs – allusion faite notamment à une série de concertations avec les acteurs des partis et regroupements de partis politiques et de la société civile – jure manifestement avec le rejet avec lequel l’ont accueilli les composantes du Cadre d’échange des Partis et Regroupements de Partis politiques pour une Transition Réussie au Mali. En atteste un communique de son président intérimaire, Dr Bokari Tréta, qui fait le tour des réseaux sociaux et qui proteste vigoureusement contre la démarche de son élaboration en la jugeant ni consensuelle, ni inclusive, ni participative. Le cadre dénonce en outre la non prise en compte de ses préoccupations ainsi que la mise à l’écart du département en charge des questions électorales, en l’occurrence ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation.
Tout en admettant par ailleurs que l’Organe unique de gestion des élections est un souhait de la classe politique et de la société civile, il relève qu’il s’agit d’un besoin exprimé dans des conditions différentes de celles dans lesquelles il intervient actuellement. Et de mentionner à ce sujet que «le temps imparti pour le reste de la transition est largement insuffisant pour la mise en place d’un tel organe et son opérationnalisation aux fins d’assurer son indépendance et sa transparence». Le Cadre d’échanges des partis et regroupements politiques pour une Transition Réussie estime, par conséquent, que les autorités de Transition feraient mieux de privilégier le consensus, l’inclusivité et la neutralité en se référant à l’avant-projet de loi validé par l’ensemble de la classe politique et de la société civile en concertation avec le Ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation à l’issue de « l’atelier de réflexion sur la mise en place de l’organe unique de gestion des élections pour les échéances électorales de la Transition, tenu les 29 et 30 juin 2021.
Tréta et compagnons ont également insisté sur le respect des prescriptions de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance selon lesquelles «Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques».
Une telle prise de position de la part d’un cadre regroupant plus de 60 entités politiques préfigure visiblement une véritable foire d’empoigne aux portes des futures échéances. Avec notamment un processus contesté par des mastodontes comme le RPM, l’UDD, l’ASMA, et la CODEM, la crise post-électorale que les autorités prétendent circonscrire pourrait bien intervenir avant même la tenue du scrutin. Surtout qu’une crise latente s’annonce sur fond de tiraillements sur le chronogramme des élections et du délai de la Transition.
Amidou Keita