Presqu’une semaine après le premier tour, tous les regards sont tournés vers le ministère de l’Administration territoriale, la structure habilitée à proclamer les résultats provisoires de la présidentielle. Cette proclamation tant attendue par les candidats et leurs électeurs suscite beaucoup d’interrogations et attise déjà une certaine tension au sein de la classe politique.
La Majorité se tape la poitrine en revendiquant une avance significative, tandis qu’au sein de l’Opposition, on crie à la fraude et aux bourrages d’urnes. Cette dernière, ou du moins 18 des 24 candidats, a animé mercredi une conférence de presse pour contester déjà les résultats, sur la base des compilations faites en leur sein. Ils affirment sans ambages que le Président sortant, candidat à sa propre succession, a « volé » les élections tant dans les régions du nord que dans celles du sud, où le bourrage d’urne avait alterné avec l’achat des voix. Ils ont fini par solliciter du Premier ministre une rencontre pour avoir des réponses à leurs préoccupations, sans quoi ils rejetteront les résultats. La tension est plus que vive maintenant, et les prémices d’une crise post-électorale semblent réunies. La Cour constitutionnelle qui est la juridiction compétente pour trancher ces contentieux est indexée par l’Opposition pour sa partialité.
Face à ce climat délétère, que faut-il faire pour éviter une crise post-électorale aux conséquences incommensurables ? Deux pistes de solutions s’offrent aux acteurs politiques et à leurs partenaires
La première piste pour éviter une crise, est d’accéder à la requête de l’Opposition et même des observateurs de l’Union Européenne et de la CEDEAO, qui consiste à publier les résultats bureau de vote par bureau de vote pour assurer l’intégrité et la transparence ; d’annuler tous les résultats contestables, surtout ceux du nord, sous contrôle des groupes armés signataires ou non de l’Accord pour la paix. Il revient fréquemment dans les rapports des opposants qu’il n y a pas eu véritablement d’élection dans ces zones.
La seconde piste est d’ouvrir un dialogue entre tous les acteurs du processus électoral afin d’aplanir toutes les difficultés et apporter les correctifs pour le second tour. Il faudra également que la juridiction compétente qu’est la Cour constitutionnelle, dise le droit en vidant les contentieux. Sans un consensus, la démocratie risque de se gripper, et avec elle, la légitimité des autorités ainsi que la crédibilité du pays sur le plan international.
Ainsi donc, la démocratie malienne est désormais sur une pente glissante. Pour ne pas chuter, elle a besoin d’un consensus sincère.
Youssouf Sissoko