Après une campagne qui s’est déroulée dans les règles de l’art, le Mali va-t-il connaitre sa première crise post-électorale ? S’interrogent aujourd’hui tous les observateurs, après la découverte par l’opposition de ce qu’elle appelle une vaste entreprise de fraude visant l’élection présidentielle du 29 juillet 2018.
Tout est parti de la conférence de presse du Directeur de campagne de Soumaila Cissé, Tiébilé Dramé, qui, le vendredi 20 juillet, a dénoncé plusieurs anomalies et incohérences constatées sur le fichier électoral mis en ligne le 4 juillet dernier par la Délégation Générale aux élections. M. Dramé s’est dit surpris, qu’après l’audit du fichier en avril 2018, qu’il puisse y avoir un autre fichier avec des doublons et des noms sans identité précises. Surtout que ledit fichier avait été validé par un comité d’experts nationaux et de l’Organisation Internationale de la Francophonie, (OIF) et que les conclusions de cet audit avaient été présentées au Premier ministre. Pour l’Opposition, le pouvoir IBK est en train de semer les graines d’une crise post-électorale aux conséquences incalculables. Ce qui est aberrant, c’est que le technicien en la matière qui est le Directeur général aux Elections, le Gal Siaka Sangaré, a publiquement reconnu qu’il y a des erreurs dans le fichier, alors que le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga et son Ministre de l’Administration territoriale, Mohamed Ag Erlaf, continuent de dire qu’il n’existe que le seul fichier audité. Pourquoi les deux principaux acteurs du processus électoral adoptent-ils cette posture ? Par leur attitude et propos, ils prêtent le flanc aux critiques et laissent planer le doute sur leur volonté d’organiser des élections crédibles et transparentes. En faisant monter le mercure ainsi à quelques jours du scrutin, ils semblent donner raison à ceux de l’opposition qui soupçonnent l’existence d’une vaste entreprise de fraude. Peut-on imaginer, un seul instant, que le peuple malien serait prêt à accepter une mascarade électorale ? Il est grand temps qu’IBK et ses affidés comprennent que les Maliennes et Maliens ne s’accommoderont jamais de ces pratiques. Et s’ils s’entêtent à tripatouiller, ils trouveront le peuple souverain devant eux. La crainte d’une défaite fait perdre aux partisans du Président de la République leur self-control, sans doute. Peut-être qu’ils ont dû oublier que l’une des règles de la démocratie est l’alternance. Soumeylou Boubèye Maiga et Mohamed Ag Erlaf, au lieu d’attiser le feu, doivent plutôt chercher à l’éteindre pour éviter une crise dont nul ne saurait présager les conséquences.
Après plus de 27 ans de pratique démocratique, le Mali devrait chercher à être cité en exemple sur le continent. Cela passe par des élections transparentes et apaisées pour l’honneur et le bonheur des Maliens.
Youssouf Sissoko