Dans la grande interview qu’il a accordée à notre confrère «Les Echos» vendredi dernier, l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé parle de son parti, de la situation sociopolitique du Mali, de l’Accord de paix et de réconciliation, «des scandales». Bref, il évoque l’actualité brûlante de notre pays. Dans cet entretien, il estime qu’il est un opposant de la seconde génération, car, après avoir passé plusieurs années au sommet de l’Etat, il a désormais un nouveau statut.
D’emblée, Modibo Sidibé réfute le sobriquet de Jimmy le flic, mais adopte fièrement l’appellation de Modibo le policier, car il se réjouit d’avoir appartenu à ce corps d’élite, au sein duquel il a eu un parcours plus qu’honorable.
Ce policier désormais à la retraite était attendu à l’ADEMA/PASJ pour sa carrière politique, mais a finalement préféré créer son propre parti politique, pour faire «autrement». Mais, pour autant, il reste très proche de l’ADEMA, duquel il ne se sent pas étranger. Pour preuve, selon lui, bon nombre des militants des FARE ont des amitiés à l’ADEMA.
S’agissant des affaires qui ont émaillé le début du mandat d’IBK, «avion, marchés d’armement, engrais», et sur lesquelles ses collègues de l’opposition ont été plus audibles que lui, l’ancien Premier ministre soutient «les FARE, en tant que parti d’opposition de seconde génération, travaillent à construire une alternative politique crédible. C’est ça notre objectif».
C’est pourquoi son parti se contente de dénoncer ce qui ne va pas dans le sens de l’intérêt du Mali ou qui n’est pas acceptable. Selon son Président, le crédo reste et demeure de faire la politique autrement. «Nous ne pouvons penser la politique si ce n’est autrement, si elle n’est pas au service de la cité, si nous ne sommes pas redevables à nos concitoyens.
Nous devons travailler à l’émergence d’une citoyenneté engagée et active. Nous pensons que, sans une certaine éthique, sans une certaine morale, la politique ne sera que caricature». Voilà la profession de foi de Modibo Sidibé dans son interview aux Echos.
Toujours selon le Président des FARE, il est temps que les partis politiques cessent d’être des fourre-tout. «Il faut des couleurs! Ce n’est pas seulement un ensemble de valeurs à partager, c’est aussi une vision du pays, de la politique, des priorités. Ces choix, il faut les partager et les assumer», dixit Modibo Sidibé.
Parlant de l’implantation de son parti sur le territoire national, il affirme que les FARE avaient déposé des listes dans la plupart des circonscriptions électorales, soit en alliance ou en listes propres, pour les communales et les régionales reportées par le Gouvernement.
«Les FARE veulent être un parti de militants, qui ne convainc pas par la force de l’argent mais par le poids de l’argument. Une force politique qui tient ses engagements et qui sait résister aux tentations des postes, présentes partout au Mali. Nous travaillons aussi à l’émergence d’un nouveau pôle politique pour le renouveau, avec d’autres», professe le fils du Capitaine Sidibé.
Modibo Sidibé a aussi profité de cette interview pour mettre fin aux critiques portées sur lui concernant son manque de présence sur le terrain. Il affirme que, de 2011 à ce jour, il est parmi ceux qui ont fait le plus de tournées. Car, pour lui, faire de la politique, «c’est sentir le pays, c’est être avec les gens».
S’agissant de l’Accord de paix et de réconciliation, il a réaffirmé qu’il ne résoudrait pas sur la durée le problème du Nord. En analysant ce document, il a estimé qu’il ne portait pas de projet, à cause de l’absence de cap et de lisibilité du Gouvernement. A en croire l’ancien policier, le texte amène un chamboulement institutionnel, sans l’accompagnement d’une adhésion et d’une perspective. Les FARE querellent également l’Accord à cause du fait qu’il ne traitait pas de l’économie criminelle. C’est pourquoi il a appelé les groupes signataires à se démarquer du narcotrafic et du terrorisme.
S’agissant du report des communales et des régionales, il a indiqué que son parti avait fait des premiers à en demander le report, pour plus de cohérence dans l’action gouvernementale.
«Vous ne pouvez pas signer un accord et jurer urbi et orbi que vous aller tenir tous les engagements, parmi lesquels, tenir des élections dans les 18 mois, après avoir pris un certain nombre de dispositions législatives et règlementaires, voire constitutionnelles, et, en même temps, vouloir tenir des élections en 3 mois sur la base des textes qui régissent actuellement les collectivités territoriales», a-t-il déclaré.
Youssouf Diallo