La réaction antipathique, passéiste voire machiste de certaines personnes par rapport à la nomination de Madame Cissé Mariam Kaidama Sidibé laisse à croire qu’être Premier Ministre au Mali est une fonction uniquement réservée aux hommes. Rappelons qu’en vingt ans de démocratie, le Mali a connu huit Premiers Ministres et c’est la première fois qu’une dame occupe ce poste. C’est une infamie de constater qu’au 21e siècle les hommes continuent à marginaliser les femmes quand il faut leur confier certaines responsabilités.
Dans la soirée du 3 avril 2011, quand la nouvelle de la nomination de Madame Cissé Mariam Kaidama Sidibé comme Premier Ministre, Chef du Gouvernement est tombée, les uns, surpris mais fiers, ont salué le bon choix du Président ATT ; pendant que les autres, déçus, ont d’abord pensé à un poisson d’avril avant de prétendre que le Président n’aurait jamais dû nommer «une femme sans relief pour remplacer Sidibé ; inconnue du grand public». Il est très difficile de voir le caractère machiste de ces hommes quand ils s’acharnent sur le fait que Madame Cissé n’est pas du tout connue politiquement. Etre Premier Ministre serait-il du show business ? Non, au fond, c’est le simple fait que Madame Cissé soit une femme. Il faut admettre que c’est purement du sexisme. Ces hommes ont sans doute oublié qu’avant l’indépendance du Mali, les femmes ont joué un rôle déterminant dans la lutte contre la colonisation. En effet, en majorité analphabètes, elles ont été de grandes mobilisatrices et animatrices des différents partis qui ont vu le jour à cet époque-là : USRDA et PSP. ATT est l’un des rares gentlemen qui s’en souviennent encore.
L’apport des femmes a été très positif dans l’accession du Mali à la souveraineté nationale le 22 Septembre 1960. Parmi ces Mères de l’indépendance, on peut retenir Aoua Kéïta, première femme Député du Mali et notamment Ba Aminata Diop, première femme Conseillère municipale. Il est important de rappeler que la 2e République, malgré la mentalité dictatoriale de l’époque, a, elle aussi, fait confiance aux femmes en nommant Madame Cissé Ina Sissoko, comme première femme membre du Gouvernement et Madame Diallo Lala Sy par la suite. Certains diront que ces dernières ont eu droit à de tels postes seulement parce que le Général Moussa Traoré, à l’instar de la Communauté internationale, se devait d’honorer la Conférence des Nations Unies sur la promotion des femmes en 1975. Pour qui le sait, il n’y a rien d’étonnant de voir le Président ATT nommer une dame à la tête du Gouvernement du Mali. C’est le même ATT en 1991, quand il était Chef d’Etat de la Transition qui a fait preuve d’une réelle volonté politique et d’une véritable reconnaissance à l’égard du combat des femmes pour la démocratie en les nommant à des postes stratégiques. Il ne fallait quand même pas croire qu’ATT allait achever sa carrière présidentielle sans honorer à 100% la plus belle phrase de la Constitution de la 3è République, ainsi intitulée : « le droit de tous les citoyens, hommes et femmes, à participer aux affaires du pays sur pied d’égalité ».
En plus, ces machistes doivent savoir qu’il a été constaté et même prouvé que la nomination d’une femme aux postes stratégiques en grand nombre apportera un changement positif dans la vie administrative nationale, dans la société d’une manière plus précise. Elles introduiront de nouveaux ordres du jour qui touchent directement et concrètement les besoins et priorités des couches fragiles, ainsi que des méthodes de gestion plus novatrices. Elles réussiront à imprégner leurs empreintes féminines sur les politiques gouvernementales. Au-delà de tout cela, sur le plan international, avec une femme Chef du Gouvernent, le Mali peut être sûr de voir monter encore plus sa cote de popularité sur en matière de démocratie ; chose qui compte beaucoup pour ATT.
Rokia Diabaté