Marche de soutien au gouvernement : Quand le ministre de la Justice s’adonne au théâtre de la rue

A vouloir chercher du rationnel dans une corbeille de subjectivité, l’on finira par se perdre. Tel semble être l’exercice auquel se livrent les Associations pour le Mali (APM) dont le coordonnateur n’est autre que le ministre de la Justice, Me Mohamed Aly Bathily. Cependant, ce penseur aurait dû inspirer les organisateurs, lorsqu’il écrit : “si l’humanité pouvait s’inspirer des faits de tous les jours, les hommes se seraient passés de faire des livres“.

Les manœuvres de l’actuel gouvernement ressemblent à un cirque digne d’une comédie grecque.

En lieu et place des actions concrètes pour le respect des promesses électorales : “L’honneur du Mali, la justice sociale, l’intégrité du territoire, la lutte contre l’impunité, la relance économique”, il s’est permis d’organiser, hier à la Bourse du travail, avec certaines organisations de la société civile des marches de soutien, à travers les Associations pour le Mali (APM).

On ignore les vraies motivations de la marche. Mais l’argument avancé par les organisateurs était “soutenir les actions du gouvernement”. Au moment où les associations manifestent leur détermination, le gouvernement Mara est en chute dans l’opinion selon les instituts de sondage.

Syndicats en arrêt de travail, dialogue social en panne, populations désœuvrées, indignées par le coût de la vie de plus en plus chère, ordures déversées sur les routes comme pour exprimer un sentiment de révolte face à une situation inadmissible… en 6 mois, le gouvernement Mara a fortement chuté en popularité auprès des citoyens qui croyaient dur comme fer à son dynamisme dans la gestion des affaires de l’Etat.

Et le moment est idéal  pour la société civile d’interpeller le gouvernement conformément à sa mission de défense des intérêts des Maliens et les valeurs de la République pour le bien-être des Maliens. Mais contre toute logique, les APM se disent satisfaites des actions de ce pouvoir.

Ce qui est sûr, c’est que cette manifestation de soutien se fait au mépris des commerçants victimes de réajustement des tarifs douaniers et les déguerpis du boulevard de l’Artisanat de Bamako. Chassés des lieux depuis plus de 4 mois, les déguerpis des voies publiques broient toujours du noir. Et le gouvernement continue de faire la sourde oreille comme si de rien n’était.

Pour les manifestants, la justice doit être encouragée. En se fendant d’arguments aussi ridicules que méprisables, les militants APM ont étalé leur ignorance des vraies préoccupations des Maliens. Le caractère positif de la justice dressé par l’APM s’appuie sur la justice populaire et des règlements de comptes.

Lorsque les organisateurs parlent d’une justice équitable, ils feignent d’ignorer les tristes événements d’Aguelhok du 24 janvier 2012. Aujourd’hui, des milliers d’élèves-maîtres, les fonctionnaires de l’Institut de formation des maîtres (IFM) et quelques habitants d’Aguelhok doivent leur vie sauve grâce au sacrifice ultime de nos forces de défense et de sécurité.

Une centaine de militaires ont été froidement égorgés par les bandits armés. Ils ont sacrifié leur vie et pour sauver la vie des centaines des populations civiles lors des attaques du camp de la localité. Les enquêtes engagées contre les auteurs ont été suspendues pour les négociations politiques en cours.

Plusieurs allégations d’atteintes aux droits humains commises par les groupes islamistes armés notamment homicides arbitraires et délibérés, recrutement d’enfants soldats, viol et autres hantent toujours les esprits. Des exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées commises par les groupes  armés, notamment celles du 17 mai dernier, lors de la tournée du PM. Ces actes chavirent les fondements de notre Etat. Aucune action judiciaire contre ses crimes n’est engagée.

Cirque

La libération des criminels de la nation continue. La plus récente a eu lieu le 15 août 2014. Ag Alfousseyni Houka Houka, ancien juge islamiste de Tombouctou, inculpé pour son rôle présumé dans la commission de violations graves des droits humains, a été libéré par les autorités maliennes.

Ce personnage important du mouvement islamiste à Tombouctou, libéré y dirigeait un tribunal islamique qui a ordonné, entre autres, des amputations, lapidations, flagellations et arrestations arbitraires lors des dix mois durant lesquels le Nord du Mali était sous le contrôle des groupes islamistes armés.

Les associations malheureusement ne soulignent pas les acharnements du Premier ministre et son ministre Bathily contre les personnes, qui semblent avoir encaissé beaucoup de coups dans le passé et voici l’heure de la vengeance sonnée. Ils se voient en bonne position pour régler des comptes à tous ceux qui les ont empêchés de tourner en rond pendant des années.

Derrière toutes ces actions se cache une ambition politique, selon certains observateurs : les plus proches d’IBK ont décidé d’écarter le PM et de reprendre le contrôle du pouvoir. D’où la réunion préparatoire de la plate-forme de la majorité en son absence. Du moins l’avis des ténors du RPM, Mara est dans une initiative de charme. Des rencontres secrètes sont organisées avec les associations et les jeunes. Il s’agit, selon une source proche du dossier, de mobiliser les associations pour réclamer son maintient à la Primature.

En tout cas, les actions de l’APM ont du mal à passer malgré les bons services de ses partenaires. Car jusque-là, les Maliens n’ont eu droit à une justice équitable. La lutte contre la corruption, jusque-là annoncée tambour battant, n’a été qu’un coup d’épée dans l’eau, avec des enquêtes judiciaires qui tâtonnent à cause de la cacophonie entre le monde judiciaire et le département de tutelle.

Encourager cette justice, c’est exprimer véritablement son mépris pour des milliers de Maliens victimes des actions commises par les “fous de Dieu” dans le Nord du pays.

Bréhima Sogoba

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