Un adage de chez nous dit qu’on ne peut pas faire du nouveau avec ce qui est vieux. Cette pensée sied bien aux évènements qui ont cours sous la transition. Incompréhensible, est la nomination d’une ancienne ministre comme coordinatrice des réformes de l’État. Il est reproché à cette ancienne ministre des Affaires foncières et des Domaines de l’État sa gestion catastrophique du foncier et des logements sociaux. Que diantre ! Quelle mouche a piqué le gouvernement de la transition à nommer la véreuse dame à ce poste ? Si le Mali Koura a quelque chose de fâcheux, c’est sa propension à faire la promotion des cadres malhonnêtes.
En 2002, les Maliens ont élu Amadou Toumani Touré (ATT) à la magistrature suprême pour mettre fin au système ADEMA-PASJ. Ce dernier, une fois à Koulouba, devait s’atteler à l’épineuse question du changement et de la lutte contre la corruption. Mais hélas ! ATT a fait fi de tous ses engagements pris et consignés dans un document intitulé: «Retrouvons ce qui nous unis». Pris en sandwich entre les moussaistes (partisans du général Moussa Traoré) et les cadres de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA-PASJ) dans l’administration publique et militaire, la démocratie malienne n’avait pas un avenir radieux.
En 1992, la privatisation a commencé par la mise en œuvre du Programme de réforme des entreprises (PASEP). Ce programme qui a couvert 35 entreprises est arrivé à terme en 1994. La Loi N°041 du 22 février 1994 fixant les principes fondamentaux de la privatisation des entreprises du secteur public a été votée en 1994. Puis l’Ordonnance 00-67 du 29 février 2000 créa la Direction générale de l’administration des biens de l’État(DGAB).
En 2001, le décret N°026 du 2 janvier fixe les modalités de liquidation des Établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) et sociétés d’État. Si on prend la Loi N°041 du 22 janvier 1994, outre qu’elle ne s’applique pas à la délégation globale de gestion (la technique de la concession et de l’affermage que l’Adema a inventé sans texte), on s’aperçoit que les offres et leurs conditions étaient faites n’importe comment.
Le Mali fut bel et bien une entreprise privée, où les délinquants financiers ont pignon sur rue. Il manque cruellement les ressources humaines capables de relever le défi du développement. Les trente ans de gestion démocratique ont eu comme conséquence douloureuse les dégâts causés par les cadres de l’administration publique et même des professions libérales. Le constat est amer quand on jette un coup d’œil sur les rapports de contrôles des services publics (11 services de contrôles environ), on se rend compte que c’est un pillage systématique organisé des maigres ressources de l’État qui est en cours. Les biens publics de tous les secteurs sont touchés par les prédateurs.
Des domaines de l’État en passant par le détournement des fonds, rien n’a échappé aux cupides «démocrates sincères et convaincus». L’État malien, détruit par les agissements des décisions et lois, va à vau-l’eau. Par la faute de certains hommes politiques et leur parti qui n’avaient aucun projet de société viable pour notre pays, certains cadres de l’administration publique et chefs militaires l’ont pillé et ruiné. La mauvaise gouvernance a détruit notre pays parce qu’elle a rendu ingérable les hommes, les femmes et les jeunes. Tous respirent pour le gain facile, la corruption, les détournements des biens de l’État et le népotisme dans les nominations. La situation du pays est très difficile et complexe à tous les niveaux. Surtout au plan sécuritaire et le reste ne peut que suivre.
La corruption et la délinquance financière érigées en système de gouvernance font que l’intérêt national du pays ne préoccupe personne. La Société des télécommunications du Mali (SOTELMA) a été bradée aux Marocains à 180 milliards de FCFA. Personne ne connait, jusqu’ici la destination des 180 milliards de francs CFA. L’ex-BIAO (Banque internationale pour l’Afrique occidental), malgré ses nombreux actionnaires maliens, a été bradée à la modique somme de 44 milliards de F CFA aux Marocains. HUICOMA (Huilerie cotonnière du Mali, bradée à Alou Tomota, à 9 milliards de F CFA, en 2001.
L’Initiative riz a coûté au budget national 42,65 milliards de nos francs. Ensuite, 660 officiers et sous-officiers à la retraite ont été maintenus à leur poste pendant un an. À combien s’élevaient ces incidences budgétaires ? Sur ce tableau, aucune réaction de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM). Chacun tend à se servir pour devenir un intouchable. Il me semble qu’en continuant ces mêmes pratiques, nous allons droit au mur.
Des armes circulent et sont utilisées au détriment de la paix civile en toute impunité par certains bandits armés. De plus, le comportement de certains religieux n’est pas de nature à rasséréner la situation. Comment lutter contre l’impunité et l’incivisme lorsque certaines personnalités du pays, des forces armées et de sécurité s’illustrent tous les jours dans le non-respect des textes, en agissant dans le sens de leurs intérêts personnels ? Dans un tel contexte de pourrissement des ressources humaines y a-t-il quelqu’un pour sauver le Mali ?
Safounè KOUMBA