Depuis la chute de l’apache régime de Moussa Traoré, les Maliens sont entrés dans le cercle des élections présidentielles à deux tours. C’est à la suite du second tour que le candidat déclaré «vainqueur» prête serment le 8 juin comme prévu par notre constitution.
De la chute de Moussa à nos jours, notre pays a connu deux présidents élus à savoir Alpha Oumar Konaré et Amadou Toumani Touré (ATT). Comme on le voit il est plus facile d’accéder au fauteuil présidentiel que de vouloir le quitter.
Certes, on rappelle souvent que ATT a, lui-même volontiers rendu son fauteuil de président après une transition de quatorze(14) bons mois. Mais à regarder avec rigueur dévolue à un scientifique, au fond, l’on comprend qu’on ne pouvait en être autrement quand on sait que les Maliens ont donné leur sang pour que l’alternance au pouvoir soit une réalité chez nous.
Aussi, il était politiquement illusoire et surtout aberrant pour des militaires de garder le fauteuil présidentiel au même moment où ils chantaient des chansons inverses, contradictoires, mais aussi à cause que le Mouvement démocratique chantait en «les militaires dans les casernes». Vouloir s’installer définitivement au pouvoir dans un climat aussi délétère était tout simplement suicidaire dans le contexte malien.
Les «démocrates» avaient soif et hâte d’occuper le fauteuil de Moussa à tel point qu’ils étaient capables de chasser ATT du pouvoir si celui-ci choisissait autre chose que son départ de Koulouba. On peut simplement dire qu’ATT n’avait qu’un seul choix : remettre le pouvoir aux civils, quitte à ce qu’il revienne en tant que «civil». (Ce qui fut fait d’ailleurs à la faveur des élections contestées de 2002 et de 2007).
Dans pratiquement neuf (9) mois, les Maliens replongeront dans les fièvres électorales. Notre constitution stipule qu’aucun président ne peut briguer successivement trois (3) mandats à la tête de l’Etat malien. C’est dire qu’après dix (10) années consécutives de présidence de la République, Amadou Toumani Touré doit rendre le pouvoir à un autre malien qui sera (on l’espère) «démocratiquement» élu.
Dans les principes, il saurait en être autrement. A ce niveau, en parole (pour l’instant) ATT a fait savoir ou laissé entendre qu’il se retirera des affaires au terme de son second mandat. Cette déclaration a fait taire les débats à propos de son éventuelle candidature à l’élection présidentielle de 2012. Du coup, cette déclaration a rassuré bien de Maliens quant à la confiscation éventuelle du pouvoir par celui que les Maliens appelaient le libérateur. Mais au regard de l’évolution actuelle des événements juridico politiques au Mali, le doute reste permis quant à cette déclaration tant attendue de la bouche du président malien.
Ce doute est de plus en plus légitime au regard rapproché des événements politiques et juridico financiers qui se suivent et qui corroborent adroitement :
– Le changement de la constitution, longtemps préparé par le régime ATT, est intervenu tout au moins au niveau de l’Assemblée nationale pour inaugurer majestueusement le mois de ramadan. Ainsi, si les Maliens s’en tenaient au vote, le Mali fera son entrée dans le mécanisme de gestion sénatoriale des affaires. Le Mali de la nouvelle constitution s’est produit avec une, si parfaite unanimité que nous sommes en droit de croire que les honorables députés de la République ont été corrompus, hélas ! Dans tous les cas, ce serait là une trahison manifeste des intérêts supérieurs du peuple malien en général et de leurs électrices et électeurs en particulier. Si le vote référendaire venait à se tenir pour l’approbation de cette nouvelle constitution ce serait certainement le retour de la monarchie, de l’autocratie. Ainsi, désormais un seul homme disposera de la volonté de tout un peuple parce qu’il aura sous son autorité et donc à sa dévotion les députés censés défendre les intérêts fondamentaux de leurs électeurs.
Certains parleront, hypocritement du régime sénatorial des Etats Unis d’Amérique. Qu’on réfléchisse un seul instant sur le pouvoir américain. Il saute aux yeux de ceux qui veulent comprendre que dans ce pays il n’y a qu’une démocratie de façade. Au fond, aux USA ce sont les lobbies bourgeois qui disposent de la vie de tout un peuple meurtri dans sa chair et dans sa conscience profonde par sa situation de misère chronique. Qu’on arrête donc de flatter «la démocratie» capitaliste américaine.
Le produit national brut est très mal reparti aux USA : là- bas ceux qui ne font rien regorgent de toutes les richesses du monde et ceux qui travaillent végètent dans le dénuement complet. C’est d’ailleurs par cette situation de misère généralisée qu’il faut expliquer le banditisme professionnel, innombrables attentats à la bombe, à la voiture piégée, les piratages de l’air et de l’eau. Bref, la grande criminalité qui sévit aux USA est la conséquence de la gestion des affaires (privées et publiques) par la haute bourgeoisie rassemblée, représentée par les meilleurs intellectuels au Sénat américain.
Au Mali, les dirigeants se rendront à l’évidence que le peule a compris et qu’il n’acceptera jamais le retour de la monarchie doublée de ploutocratie (le règne des quelques nantis aux dépens du plus grand nombre).
– Le doute est encore plus présent chez nous au regard de l’escroquerie des citoyens, organisée par l’Etat malien à travers cette histoire d’Assurance maladie obligatoire (AMO). Comme nous l’avions dit par le passé, il faut être méchant et stupide pour croire un seul instant que le gouvernement de la République du Mali peut se soucier de la bonne santé des masses laborieuses de notre pays. Il suffit de regarder autour de soi pour constater avec amertume qu’une bourgeoisie arrogante et insouciante sort de terre au Mali sans le moindre respect pour celles et ceux des Maliens qui ont accepté le sacrifice ultime pour que naisse un Mali nouveau débarrassé du pouvoir des spoliateurs de notre peuple, ceux là qui ont nourri et qui continuent à nourrir leurs familles de la sueur et du sang de nos femmes et de nos enfants.
A propos de l’AMO, l’escroquerie ne fait aucun doute pour toutes celles et tous ceux qui endurent dans leur chair et dans leur conscience les affres d’une démocratie qui assassine la démocratie que recherche les travailleurs de notre Mali. Cette volonté de l’Etat malien de spolier le peuple est encore plus démasquée par la décision de cet Etat de donner une date butoir à ceux là qui n’ont pas écrit à l’Etat pour dire qu’ils ne sont pas partants pour l’AMO. Ainsi, selon toute vraisemblance, toux ceux qui n’auront pas rempli leurs fiches de non adhésion à l’AMO au 31 juillet 2011 seront considérés obligatoirement comme des adhérents.
Mais le gouvernement d’ATT doit se rendre à l’évidence que le peuple malien supporte mais n’est pas lâche. Les gens n’ont déposé aucun dossier pour qu’on leur coupe l’AMO. Il n’y a aucune raison de leur demander de prouver leur non adhésion par un quelconque écrit. Ce gouvernement doit se dire que les travailleurs maliens sont prêts pour le pire mais tout sauf l’AMO qui triche et qui assassine la bonne santé des Maliens
– Après trop de foras sur l’école malienne, le gouvernement de la République du Mali est absolument dans l’incapacité totale ou dans la mauvaise foi totale de venir à bout de cette chronique crise de notre système éducatif et cela depuis la fin du régime nationaliste de Modibo Keïta. La fermeture de l’université pour deux mois en vue de faire face à la question scolaire est une grosse poudre aux yeux des Maliens. Quand on fait de l’école malienne le sanctuaire des faux combats politiques, il est clair que ce sont les frelons qui vont envahir cette école qui faisait la fierté du Mali et de toute l’Afrique. Lorsqu’un professeur émérite qui l’extérieur pour venir lâcher à la face des Maliens la nécessité de dissoudre l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM), il y a là problème : ce professeur ignore- t- il que ce sont les gouvernants qui ont conduit cette association dans la direction où elle se trouve ?
– Ce professeur réfléchit- il plus que tous les autres maliens ou est- il le plus courageux pour s’affirmer ?
Dans tous les cas, il apparaît de plus en plus clair pour tous les Maliens que le gouvernement d’ATT, par cette nouvelle constitution, par l’AMO et par la gestion de l’école, prépare une crise profonde pour les mois qui viennent. Dans ces conditions où les troubles se profilent à l’horizon de l’année 2012, est- il possible d’organiser des élections ?
C’est donc au regard de l’évolution socio politique et juridico économique de plus en plus catastrophique qu’il n’est pas exagéré de dire que le risque devient chaque jour davantage manifeste de procéder au report sine die de la présidentielle de 2012, une situation qui pourrait mieux profiter aux princes démocrates chercheurs d’estime et de postes.
Que Dieu sauve le peuple laborieux du Mali contre les déprédateurs de son tissu socio économique et politique !
Que Dieu aide la vérité !
Fodé KEITA