Enfin, le Mali dispose désormais d’un véritable instrument juridique pour mieux lutter contre l’enrichissement illicité qui freine considérablement le développement économique et social de notre pays. Le projet de loi portant prévention et répression de l’enrichissement illicite a été adopté le jeudi dernier tard dans la nuit par l’Assemblée nationale.
Après trois suspensions et l’adoption des amendements après correction, les 127 élus du peuple présents ont adopté à l’unanimité le projet de loi portant prévention et répression de l’enrichissement illicite. C’était en présence du Ministre de la justice, garde des sceaux, Mohamed Aly Bathily.
Adopté en conseil des ministres en Août dernier sur proposition du garde des sceaux, ce projet de loi est structuré en six titres répartis en quatre chapitres et 45 articles après les amendements. Sur les 45 articles de ce projet de loi, une dizaine d’articles ont été amendés par les députés. Il s’agit des articles 4 ; 9 ; 11 ; 13 ; 16 ; 23 et 43.
Le projet de loi portant prévention et répression de l’enrichissement illicite, au-delà de son caractère pour une justice sociale, est également déclencheur de la mobilisation des fonds des partenaires techniques et financiers qui voient en cela un outil précieux de bonne gouvernance.
Pour le ministre de la justice, ce projet de loi est plus que jamais nécessaire pour adapter notre dispositif législatif aux nouvelles formes de l’enrichissement illicite, tant au niveau national qu’international. Ce qui traduit la volonté du gouvernement de tenir compte de certaines dispositions des nations unies et de la Cedeao, et surtout de corriger les insuffisances de la loi N°82-39/AN-RM du 26 mars 1982 portant prévention du crime d’enrichissement illicite. L’opposition parlementaire a salué la détermination du gouvernement à apporter une réponse claire à la corruption et à l’enrichissement illicite dans notre pays.
Dans le présent projet de loi, l’enrichissement illicite est défini comme l’augmentation substantielle du patrimoine de tout agent public, que celui-ci ne peut justifier par rapport à ses revenus légitimes. Elle est applicable à toute personne physique, civile ou militaire, dépositaire de l’autorité publique. Les structures impliquées dans cette lutte sont, entre autres, les Pôles Economiques et Financiers, le Contrôle Général des Services Publics, le Bureau du Vérificateur Général, la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) et les Inspections des départements ministériels. La charge de la poursuite est confiée au Pôle Economique et financier. Il est également prévu la création d’un office central de lutte contre la corruption, qui aurait pour tâche de coordonner toutes les autres structures.
Au titre III du présent projet, la déclaration des biens sera une exigence à toutes les personnes détenant une responsabilité. En cas d’indices d’enrichissement illicite, stipule l’article 17, le Procureur convoque la personne mise en cause, l’informe de l’éventualité d’une poursuite. Dans ce cas, les pièces du dossier sont tenues à sa disposition au secrétariat du parquet pour communication pendant les quarante-huit (48) heures précédant la date de sa comparution, et l’avertissent qu’elle peut se faire assister du Conseil de son choix. Il est tenu de justifier, dans un délai de 60 jours, l’origine licite des dits éléments, de répondre à la demande de communiquer l’état de son patrimoine, les modalités de sa constitution ainsi que la nature et le montant de ses revenus actuels. Ce délai pourra être prorogé de 30 jours si les circonstances l’exigent.
En ce qui concerne l’enrichissement illicite des personnes bénéficiant d’une immunité ou d’un privilège de juridiction, le Procureur de la République transmet le dossier à l’autorité compétente aux fins d’exercice des poursuites par les voies légales. Le Procureur de la République peut également ordonner des mesures conservatoires sur les biens meubles ou immeubles, divis ou indivis, de la personne mise en cause afin de garantir le paiement des amendes encourues ainsi que, le cas échéant, l’indemnisation de la victime. Le Procureur de la République du Pôle économique et financier peut être saisi d’une dénonciation, d’une plainte ou par toute autre voie prévue par le Code de procédure pénale.
Les sanctions prévues
En cas de refus d’obtempérer ou de fausse déclaration dûment établie par l’autorité compétente, le mis en cause est puni d’une amende égale à six (6) mois de rémunération perçue ou à percevoir dans l’emploi ou la fonction occupée, précise l’article 36. Et cela sans porter préjudice aux poursuites judiciaires pour faux et usage de faux ou pour enrichissement illicite. Aussi, indique le même article, toute personne assujettie à l’obligation de déclaration de biens, qui quitte ses fonctions sans le faire dans les délais requis, s’expose à une saisie de ses biens sans préjudice de toute action disciplinaire ou pénale.
Pour une personne titulaire d’un mandat électif, elle est punie d’une amende de 5.000.000 FCFA et déchue de ses droits civiques et du droit d’exercer dans une fonction publique. Les contrevenants à l’obligation de déclaration s’exposent à des sanctions disciplinaires ou administratives spécifiques à leur emploi ou leur fonction. Quant aux personnes poursuivies pour enrichissement illicite, l’article 38 dispose que «Lorsque la valeur des biens jugés illicites est inférieure ou égale à 50 000 000 de francs, la peine sera de 1 à 3 ans d’emprisonnement et d’une amende égale à ladite valeur. Lorsque celle-ci est supérieure à 50.000.000 de francs, la peine sera de 3 à 5 ans d’emprisonnement et d’une amende égale au double de la valeur des biens jugés illicites.
Les complices encourent les mêmes peines que l’auteur principal. Dans tous les cas, la peine d’emprisonnement assortie du sursis ne peut être prononcée que lorsque le montant détourné est intégralement remboursé».Et la personne condamnée pour enrichissement illicite encourt la confiscation de tout ou partie de ses biens, l’interdiction de quitter le territoire national, avec retrait du passeport pour une durée de quatre mois à deux ans, la privation temporaire des droits politiques ne pouvant excéder dix ans. Quant aux personnes morales de droit public,elles encourent l’exclusion des marchés publics, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au moins; l’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au moins, d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités commerciales, professionnelles ou sociales à l’occasion de laquelle ou desquelles l’infraction a été commise ; la fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans, au moins, de l’un ou des établissement(s) de l’entreprise ayant servi à commettre les faits; l’affichage de la décision prononcée au Tribunal et/ou à la Mairie ou sa diffusion dans la presse écrite et/ou audiovisuelle, à ses frais.
En plus du président de la République, la future loi devrait obliger d’autres personnalités à déclarer leurs biens. Il s’agit notamment des présidents et chefs des institutions de la République ; les personnes ayant rang de ministres ; les membres des structures chargées du contrôle des services publics; les chefs et Directeurs des services centraux des forces armées et de sécurité ; les élus nationaux et locaux ; les directeurs nationaux ou généraux des services et entreprises publiques ; les directeurs des finances et du matériel des départements ministériels et des institutions républicaines etc.
Nouhoum DICKO
Voilà un des sérieux sujets que nos journalistes doivent s’habituer à traiter, au lieu de passer leurs temps à raconter les bobards de la rue de Bamako.
Un merci Sincère au PRÉTOIRE pour son professionnalisme !
C’est fini donc le management ? Allah Allime.
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