Le Premier Ministre Moussa Mara au Journal « Le Guido » : « Lorsqu’on a la chance de servir son pays, l’on ne saurait être ni blasé, ni amer. L’optimisme tempéré de raison est mon credo »

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Moussa Mara, PM
Moussa Mara, PM

La crise du Nord est plus que jamais d’actualité avec les pourparlers inclusifs inter maliens à Alger et la recrudescence du terrorisme dans le septentrion, malgré les efforts de la France à travers Barkhane et la présence de la Minusma. Ce qui ne fait pas perdre de vue outre la nécessité de la paix, celle de la réconciliation nationale que les maliens de tous les bords appellent de tous leurs vœux. Il en est sans doute de même du Premier ministre Moussa Mara qui dans cette interview qu’il nous a accordée, livre le fond de son cœur, définit les conditions d’une paix définitive, les engagements du gouvernement et du chef de l’Etat pour un Mali réconcilié et indivisible.

 

Le Guido : M. le Premier ministre, le Mali est engagé dans un processus de  résolution de la crise du Nord avec l’aide de l’Algérie et de la  communauté internationale devant aboutir à une paix définitive. Quelles  en sont les conditions essentielles?

 

Le Premier ministre Moussa Mara : Le Gouvernement a toujours confirmé son choix et sa disponibilité pour le dialogue avec les groupes armés. Nous nous félicitons donc de l’implication déterminante de l’Algérie, un pays voisin et ami, auquel nous lient l’histoire et la géographie.

 

Aux côtés de l’Algérie, nous avons le plaisir de compter l’ensemble de la communauté africaine ainsi que d’autres pays amis et organisations. La crise malienne a mobilisé tous nos partenaires depuis plus de deux ans. Un des éléments nouveaux des pourparlers d’Alger, c’est la participation effective de la société civile et des communautés du nord au processus.

Le dialogue que nous avons inauguré en juillet dernier et qui a conduit à la conclusion d’une feuille de route consensuelle doit aboutir à un accord de paix complet, détaillé et définitif avec toutes les garanties quant à son application. C’est à ce titre que quatre commissions ont été constituées : politique et institutionnelle, sécurité, justice et réconciliation et développement.

 

Nous devons aboutir à un accord global tant que les revendications posées par les groupes ne compromettent pas la souveraineté du Mali, son caractère républicain, laïc et son intégrité. Nous sommes engagés à consentir tous les efforts pour accélérer le développement local et entreprendre de nouvelles formes de gouvernance qui s’appuieront sur une décentralisation poussée et un transfert de compétences et de ressources jamais atteints dans notre pays en vue de rapprocher les gouvernants des gouvernés. Nous envisageons également une politique de régionalisation pour favoriser le développement local, participatif et une prise en compte des spécificités locales dans les politiques publiques de développement.

 

D’aucuns disent qu’on ne peut parler de paix sans avoir résolu le  contentieux des atrocités commises sur les populations par les groupes  rebelles dans le septentrion. Pour la réconciliation faut-il choisir entre la  paix des braves et la paix des justes?

 

Le Gouvernement inscrit son action dans la recherche d’une paix durable et définitive. Cette finalité exige de part et d’autre des concessions  responsables mais raisonnables ; en tout cas elles ne pourront pas se faire au détriment de l’intérêt général de nos concitoyens et des lignes rouges fixées.

Dans ce cadre, un processus démobilisation, désarmement et réinsertion est envisageable. Le volet réinsertion qui attire beaucoup d’attentions anticipées portera sur le financement de projets, mais aussi l’intégration dans certaines corporations professionnelles, dès qu’il s’agit de servir ensemble notre pays. Rassurez-vous, les erreurs du passé seront évitées et le peuple malien sera informé à toutes les étapes.

Concernant la justice, nous avons toujours indiqué que la justice était sacrée en temps de paix comme en temps de crise, puis après. Tous ceux qui, de leur propre chef, en groupe ou en complicité avec les terroristes, ont causé des crimes abominables seront recherchés et traduits devant les juridictions nationales ou internationales. Les Maliens seront informés de ces questions aussi le moment venu. Il ne faut pas occulter que nonobstant les mesures de confiance souscrites, plusieurs criminels sont déjà détenus ou recherchés.

 

Comment donc percevez-vous la réconciliation nationale en tant que  malien et en tant que Premier ministre ?

Pour chaque Malien, la réconciliation doit être de mise pour le vivre ensemble harmonieux dans la diversité, comme cela a été le cas sur cette vieille terre depuis des millénaires. Notre pays a des ressorts socioculturels insoupçonnés qui nous ont permis, malgré la crise, d’être, dans une écrasante majorité, unis contre l’agression gratuite de notre nation par les ennemis de la paix et du développement. Le peuple malien tout entier continue tous les jours d’exprimer partout et publiquement son opposition radicale  à toute forme d’atteinte au caractère républicain, laïc de notre Etat et à son intégrité territoriale. Ce message partagé et soutenu par la communauté africaine et internationale doit être compris par les groupes armés.

Le Mali, à travers le Gouvernement, observe scrupuleusement tous les engagements souscrits, à commencer par l’accord préliminaire de Ouagadougou de 2013. Nous souhaitons que les groupes armés en fassent de même, afin de mettre un terme aux attaques et aux atrocités subies par des populations civiles innocentes, les forces maliennes ou internationales.

 

En parlant de réconciliation, elle doit se faire à la base entre les communautés, les familles, les autorités locales et centrales, les leaders religieux. Les autorités morales doivent y veiller, les encourager et en préserver les acquis. Les enfants doivent également être éduqués à la paix et au commun vouloir de vivre ensemble. Cette responsabilité incombe à nous Maliens. Que nul ne pose un acte susceptible de porter atteinte à  notre destin commun dans ce vieux pays, dont nous sommes tous fiers du passé et espérons à un avenir radieux après cette page sanglante et douloureuse.

J’invite les Maliens à se pardonner, à accepter, à partager et à travailler ensemble pour un meilleur avenir de notre pays.

 

Pensez-vous que contrairement aux plus optimistes c’est une quête de  longue haleine qui ne viendra pas nécessairement et rapidement après la  signature des accords de paix avec la rébellion touarègue ?

Nous espérons un accord global de tous nos vœux. Mais vous conviendrez avec moi que la conclusion d’un accord à lui seul ne règle pas la crise. Il va falloir de part et d’autre faire preuve de bonne foi dans la mise en œuvre de l’accord.

Chaque acteur a un rôle à jouer. En ce qui concerne l’Etat, il est engagé à honorer ses engagements vis-à-vis des collectivités, y compris celles du nord de notre pays. Nous sommes conscients des insuffisances ayant marqué la gouvernance de façon générale les dernières années. Nous sommes persuadés que le Mali de l’après-accord sera un nouveau Mali. Il faut également des citoyens avec de nouveaux réflexes et de nouvelles aptitudes citoyennes. Toutes les réformes que cette mutation va nécessiter seront soumises aux différentes institutions de notre pays et les populations auront également l’occasion de se prononcer.

 

Cela suppose de toutes les façons que s’installe la confiance entre la  belligérance et l’Etat malien. Ce qui n’est pas évident avec les velléités du  MNLA habitué aux remises en cause impromptues, à la surenchère et à vouloir changer les règles en cours du jeu.  Y a-t-il des garde-fous pour parer à toute éventualité du côté de la  France, de l’Algérie, de l’ONU et de toute la communauté internationale?

 Je vous ai dit plus haut que le Mali bénéficie aujourd’hui d’une mobilisation exceptionnelle et remarquable. Pour la première fois, dans la gestion de la crise récurrente du Nord du Mali, la communauté internationale participe à tout  le processus de dialogue. Les précédents accords signés entre le Gouvernement et les groupes armés du nord du Mali n’avaient pas pris en compte cet aspect du problème. Il s’agissait en fait d’un tête-à-tête entre deux parties.

La nature de la crise aussi a évolué,  puisqu’elle a fait apparaitre une triple dimension du terrorisme international, du narcotrafic et de l’extrémisme religieux. Toutes choses qui font peser des menaces sur la paix et la sécurité régionale et internationales et placent le conflit au-delà d’une simple dimension locale.

Je suis convaincu que nos partenaires de la communauté sous régionale, régionale et internationale veilleront à ce que chaque partie signataire respecte ses engagements. Pour notre part, nous n’accepterons pas que le terrorisme s’installe dans notre pays, ni au nord, ni au sud au centre. L’Etat continuera à faire son devoir.

 

Quelle est la position du chef de l’Etat, le président Ibrahim Boubacar  Keïta et quelles sont ses espérances quant à la paix définitive, à la  réconciliation et à l’unité nationale dans la perspective d’un accord ?

 

Conformément à la Constitution, le Président de la République incarne l’unité nationale. Il est le garant de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire. Il est le Président de tous les Maliens.

Depuis son élection à la magistrature suprême, le Chef de l’Etat inscrit son action dans ce sens. Il travaille au quotidien à ramener la paix et la quiétude avec le concours de l’ensemble des acteurs nationaux et internationaux. Ces efforts valent aujourd’hui à notre pays de retrouver toute sa place dans le concert des nations.  Son engagement pour le développement du Mali ne fait l’objet d’aucun doute. Le préalable à la réalisation de ses ambitions, c’est bien sûr la paix, la stabilité et la réconciliation.

 

  1. le Premier ministre malgré la courte période que vous venez de  passer en tant que chef d’orchestre plus ou moins inspiré dans la  gouvernance publique, êtes-vous déjà blasé, amer ou optimiste pour la  suite ?

Je pense qu’on attend de tout citoyen, là où il se trouve, qu’il cultive l’amour de la patrie et la serve sans en attendre une quelconque reconnaissance. Il s’agit moins d’une question de longévité à un poste que d’engagement à servir et à servir bien dans l’équité et dans la justice.  Mes fonctions actuelles ne me détourneront pas de cette conviction propre et profonde. Chacun est utile dans la construction de la nation qui est notre patrimoine à nous tous. Lorsqu’on a la chance de servir son pays, l’on ne saurait être ni blasé, ni amer. L’optimisme tempéré de raison est mon credo.

Ahmadou Maïga 

 

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2 COMMENTAIRES

  1. Nous pensons que il faut aller vite au Grande réforme des institutions de la république c’est le seul moyen qui peut garantit l’unité nationale et l’intégrité territoriale du Mali le gouvernement central et tribal népotisme corrompu et bandit et avec la confiscation de richesse nationale il servire pas l’intérêt général chaque citoyen Malien à droit de prendre son destin en main de kayes jusqu’au kidal

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