Les législatives du 28 octobre 2018 hors la loi : Des délais légaux modifiés par simple communiqué !

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Mohamed Ag Erlaf, ministre de l’Administration territoriale

Tant mieux si le gouvernement décide enfin de revenir à la légalité républicaine en s’engageant purement et simplement à reporter les élections législatives du 28 octobre 2018 à la date du 25 novembre 2018. Puisque le gouvernement s’était inscrit d’emblée dans une posture légale anticipée, ce report où il utilise sa marge légale reste circonscrit dans la constitutionnalité car cette nouvelle date n’est qu’à un jour de plus des dernières législatives de 2013 dont le premier tour avaiet lieu le 24 novembre.

Il n’empêche que préalablement à cette sagesse républicaine retrouvée, le gouvernement à travers une excursion juridique hasardeuse, s’était quelque peu égarée sur des pistes sinueuses d’irrégularités le menant directement à l’impasse. A travers un Communiqué du ministre chargé de l’Administration territoriale daté du 12 septembre 2018, il donnait nettement l’impression que les scrutins de 2018 entamés par des présidentielles aux irrégularités jamais égalées dans toute l’histoire électorale du Mali voire de l’Afrique et du même monde entier, étaient condamnées à se poursuivre avec les élections législatives sous l’égide des mêmes tripatouillages juridiques. Son Communiqué daté du 12 septembre 2018 adressé aux candidats aux législatives assez révélateur était ainsi rédigé : « En raison de l’impossibilité d’obtenir certains documents administratifs constitutifs du dossier de candidature, la date limite de dépôt des candidatures initialement prévue le jeudi 13 septembre 2018 est repoussé à une date ultérieure. Par conséquent le Gouverneur du District de Bamako et les Préfets de Cercles sont invités à continuer à recevoir les dossiers de candidatures au-delà du 13 septembre 2018 ».

Au moins trois articles de la loi électorale étaient directement bafoués par les irrégularités engendrées par les tripatouillages de ce Communiqué ministériel. D’abord l’article 162 doublement violé en son alinéa 1er « La déclaration de candidature est déposée par le candidat ou le mandataire du parti, du groupement de partis ou du candidat indépendant au niveau du représentant de l’Etat dans le Cercle ou dans le District au plus tard le quarante-cinquième (45ème) jour précédant le scrutin » et son alinéa 3 « La déclaration doit parvenir au ministère chargé de l’Administration territoriale au plus tard le quarantième (40ème) jour précédant le scrutin ».

Ensuite, l’article 163 selon lequel « trente (30) jours avant la date des élections, la Cour Constitutionnelle statue sur la validité des candidatures reçues… ».

Enfin, au dernier alinéa de l’article 160, il est stipulé que « le titre du groupement de partis politiques ou de candidats indépendants doit être notifié au ministre chargé de l’Administration territoriale au plus tard la veille de la clôture du dépôt des déclarations de candidature… ».

 Le report sine die du délai légal de dépôt des candidatures fixé au plus tard le quarante-cinquième (45ème) jour précédant le scrutin

Selon la loi électorale, le 45ème jour au plus tard précédant le scrutin du 28 octobre 2018 correspond à la date du 13 septembre 2018. Au-delà de cette date butoir, la loi électorale interdit le dépôt de toute candidature qui ne pouvait dans ce cas être qu’une candidature irrecevable pour forclusion. En violation flagrante de cette disposition légale, c’est un simple Communiqué officiel du ministre chargé des Elections qui s’était irrégulièrement arrogé le pouvoir de reporter « à une date ultérieure », c’est-à-dire sine die, un délai légal, puisque fixé par la loi électorale en son article 162 alinéa 1er. Ce report sine die était davantage confirmé par le passage du Communiqué ministériel invitant le Gouverneur du District de Bamako et les Préfets de Cercles à continuer à recevoir sans limite les dossiers de candidatures au-delà du 13 septembre dernier. Le ministre avait ouvert ainsi une procédure irrégulièrement grotesque et insensée de réception ad vitam aeternam des dossiers de candidatures aux législatives : « Par conséquent le Gouverneur du District de Bamako et les Préfets de Cercles sont invités à continuer à recevoir les dossiers de candidatures au-delà du 13 septembre 2018 ». Du pur mépris pour le droit !

L’effet dévastateur de cet irrégulier Communiqué digne des seules républiques bananières, se projetait largement au-delà du chamboulement du délai légal de dépôt de la déclaration de candidature au niveau du Gouverneur du District et des Préfets. Ses répercussions affectaient également deux autres délais légaux de cette chaine des candidatures aux élections législatives du 28 octobre 2018.

Le ministre avait piétiné la date butoir légale du quarantième (40ème) jour qui précède le scrutin, dédiée à la réception des candidatures par le ministère chargé de l’Administration Territoriale

La date butoir légale du quarantième (40ème) jour précédant le scrutin dédié à la réception des candidatures (3ème alinéa de l’article 162), c’est-à-dire le 18 septembre 2018, était automatiquement foulée au pied par le Communiqué du ministre chargé de l’Administration territoriale. Par l’effet automatique du report sine die du délai légal butoir de dépôt des candidatures auprès du Gouverneur du District de Bamako et des Préfets, le délai légal butoir de réception des mêmes candidatures au ministère chargé de l’Administration territoriale avait été remis en cause et ne connaissait plus de limite quelconque.

La date butoir de notification au ministre chargé des Elections des titres des groupements de partis et de candidats indépendants était renvoyée aux calendes grecques

Aux termes de la loi électorale, la notification au ministre chargé de l’Administration territoriale des titres des groupements de partis et de candidats indépendants est enfermée dans le délai légal butoir de la veille de la clôture du dépôt des déclarations de candidature. A cause de l’effet du Communiqué irrégulier qui éclaboussait directement tous les délais légaux relatifs aux candidatures des législatives, ce processus de notification ne s’en sortait pas indemne. Ce délai légal avait également été piétiné par le Communiqué fantaisiste.

 

Le délai de validation des candidatures par la Cour constitutionnelle également était foulé au pied

Il en était de même de la date légale à laquelle la Cour constitutionnelle statue sur la validité des candidatures reçues qui est fixé par la loi électorale à trente (30) jours avant la date des élections, c’est-à-dire le 28 septembre 2018. Tout comme les autres délais cités ci-dessus, la dérive juridique de nature antirépublicaine du Communiqué ministériel du 12 septembre 2018 piétinait le délai de validation des candidatures fixé à 30 jours avant la date des élections du scrutin législatif.

Au total, le Communiqué du 12 septembre 2018 adressé aux candidats aux élections législatives symbolisait le déni d’Etat de droit en République du Mali.

L’impossibilité d’obtention de documents administratifs constitutifs du dossier de candidature ne saurait justifier la violation de la loi électorale !

Le Communiqué du ministre est une fausse réponse à un vrai problème juridique posé par la grève illimitée des magistrats à cause de laquelle la délivrance de documents administratifs constitutifs des dossiers de candidatures aux élections législatives n’est plus assurée. Il s’agit d’une réponse totalement inappropriée, car ni un décret ou arrêté, encore moins un simple communiqué d’un ministre fût- il chargé des Elections, ne peut, pour quelque motif que ce soit, décider d’emblée de modifier toute une loi de la République. L’acte inqualifiable du Communiqué du 12 septembre 2018 était d’autant plus méprisant pour l’Etat de droit que les motivations qui le soutiennent ne le justifiaient nullement.

L’impossibilité d’obtention de documents administratifs constitutifs des dossiers de candidatures équivalait tout simplement à un motif irréfragable de report des élections législatives du 28 octobre 2018.

 

Un Communiqué nul et de nul effet

Que venait faire un simple Communiqué dans une affaire que même ni le Décret, ni l’Arrêté, encore moins une Décision, ne peut gérer ? Le Communiqué du ministre qui instaurait de nouveaux « délais » totalement ouverts, ou plus exactement qui supprimait tous les délais encadrant la formalité des candidatures aux élections législatives du 28 octobre 2018 n’était ni plus ni moins qu’une violation caractérisée de la loi électorale. Il est clair qu’aucune candidature aux législatives déposée dans les conditions illégales de délais proposées par le ministre ne pouvait être recevable. Par définition, le communiqué de l’administration publique n’a pas de valeur juridique et ne constitue pas en soi une norme de droit. Le communiqué n’est qu’un simple instrument d’information et de communication pouvant émettre des recommandations dans le but d’influencer ou de dissuader les usagers. C’est pourquoi dans la jurisprudence administrative, un communiqué fait rarement l’objet de recours en annulation. Lorsque c’est le cas, c’est que le communiqué est alors considéré comme un acte de « droit souple », écouté par les usagers et suivi d’effet dans les faits. C’est ainsi par exemple qu’en France, le Conseil d’Etat considère que le communiqué est susceptible de recours en annulation dans deux hypothèses : lorsqu’il contient des recommandations, des mises en garde et des prises de position pouvant justifier des sanctions et lorsque le communiqué est de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou lorsqu’il a pour objet d’influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles il s’adresse. Il est évident que si par extraordinaire le Communiqué ministériel du 12 septembre 2018 était soumis à une telle procédure, le juge administratif n’hésiterait pas une seule seconde à le renvoyer purement et simplement à la poubelle pour violation manifeste de la loi électorale.

Dr Brahima FOMBA, Université des Sciences

Juridiques et Politiques de Bamako (USJP)

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2 COMMENTAIRES

  1. Eh oui. A kagni. Aoun dé BÈ fangala. Ag ERLAF fais ton boulot. N’écoute pas les cons.

    • €nfoirade qui permet aux intru$ Atlantistes de s’immi$cer et ainsi de faire immixtion avec leur ingérence habituelle!

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