Le Mali : Cette patrie que nous n’aimons pas

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Bamako, jour de marche, de protestation contre des réformes. Bamako, jour de meeting, de course au pouvoir dans un des pays les plus pauvres de la planète. Un pays qui un jour bascula résolument dans la démocratie, panacée des temps modernes à tous les maux sociétaux. Bamako, jour de rumeurs ou de nouvelles vraisemblables, accablant notre propre pays et dont nous sommes les plus pertinents échos. Bamako, jour de l’intérêt personnel, course effrénée pour un pan du pouvoir, exploité pour amis, familles et militants fidèles. Avec ses marcheurs insouciants et ses politiciens inconséquents.

Heureusement que ceux qui veulent tirer le Mali vers le chaos, n’ont ni l’envergure ni la crédibilité des héros qu’ils veulent devenir. En ces heures sombres de notre histoire, où des compatriotes meurent dans une large partie du pays, quel patriote, digne de ce nom, a-t-il intérêt à détourner l’attention des autorités ? C’est vrai que pour beaucoup d’entre ceux qui n’ont ni familles, ni biens à Kidal, Gao et Tombouctou, le Nord Mali c’est l’autre bout du monde. C’est vrai aussi que dans ce pays on fait ce qu’on veut, on dit ce qu’on veut et l’on se bat pour ce que l’on veut, si on n’a pas à l’esprit, le principe d’un peuple, d’un but et d’une foi. Où est cet esprit lorsqu’on sait que la préoccupation première doit être la vie, celle d’un compatriote ou de tout autre homme. Où est cet esprit lorsqu’on se rend complice des terroristes, des bandits, à vouloir faire comme eux, en affaiblissant les autorités et leur pouvoir de discernement. D’aucuns accusent les autorités actuelles de vouloir se servir de l’insécurité au Nord Mali pour différer les échéances électorales et prolonger leur maintien au pouvoir. De toutes manières, il faut un Etat pour en être le président ou le ministre. La question du Nord doit préoccuper tout malien digne de ce nom et cela au-delà de toute ambition. Si l’on doit faire pression sur les autorités c’est par rapport d’abord à la sécurité, à l’intégrité du territoire et à l’unité nationale. Par des contributions de qualité, nous devons leur rappeler leur devoir de faire en sorte que le citoyen à Tinzawatène, ait la même quiétude que celui de Koulouba. Voilà une équation sur laquelle nos fameux hommes politiques oublient de cogiter.

Le virus des marches et des protestations a gagné Bamako au moment où d’autres apatrides plantent un drapeau scélérat sur notre territoire. Coïncidence ou dangereuse complicité dans l’aventurisme. Sur des rumeurs vraies ou considérées comme telles, on bat le pavé avec des arguments qui laissent souvent à désirer. Le fauteuil qu’ATT laissera en 2012 aiguisant les appétits, on se retrouve en bandes de copains, avec des griefs plus ou moins valables pour en découdre avec le pouvoir finissant du Général. Dans cette lambada où l’insouciance et le donquichottisme le disputent à la méchanceté, on marche sur les dizaines de morts étrangers, ou nationaux, que nous comptons tous les mois dans le Grand Nord.

A chacun ses préoccupations et, comme d’habitude, ce qui préoccupe le peuple est à des années lumières des urgences des politiciens. 2012 offre un fauteuil à occuper, et, pour cela, il est légitime de se battre et de se démener comme on peut, pour avoir voie au chapitre. Mais nous sommes dans un pays en guerre, en difficulté sécuritaire et où l’on a l’impérieux devoir de penser aux compatriotes, dont la seule préoccupation est de conserver la vie. On doit penser à ne pas créer des situations pour favoriser des insurrections et des détournements d’attention qui pourront inviter chez nous les pires de nos ennemis : les armées étrangères. Car vouloir mettre le pays sur plusieurs fronts de guerre n’est inspiré ni par le patriotisme ni par la bonne foi. « Nous aimons le Mali tant que nous sommes au commandes, et, qu’un ouragan l’emporte dans la nuit si c’est un autre chef ».

Nos autorités actuelles sont en difficulté. Elles le sont parfois, par leurs propres compromissions. Pour cela devrions nous contribuer à notre tour, à compromettre davantage les chances de notre pays vers un avenir de paix en voulant les punir. A hypothéquer maladroitement notre paix sociale et à mettre en difficulté l’espoir des populations du Nord à voir l’Etat s’occuper prioritairement de leur conservation et de leur survie, comme le recommande la situation. Il y’ a un temps pour les troubles et un temps pour la manifestation de l’instinct national, du patriotisme, en mettant sous le boisseau des caprices individuelles pour aider la patrie. A moins que  nos fauteurs de troubles ne se sentent pas assez maliens ou assez en devoir d’avoir une pensée solidaire pour leurs compatriotes du Nord qui ne dorment ni se réveillent que dans l’incertitude du lendemain.

 

Karim FOMBA

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