…le général Siaka Sangaré délégué général aux élections : Notre objectif, c’est de pouvoir utiliser le fichier biométrique aux élections de 2012 “

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C’est ce vendredi 29 avril 2011 qu’aura lieu, à la primature, la réunion interministérielle sur les préparatifs des élections générales de 2012. Cela fait suite à une réunion de concertation entre le ministère de l’Administration territoriale et les partis politiques, au cours de laquelle il y a eu beaucoup d’interrogations sur la question du fichier électoral. C’est vrai que la tendance dominante est l’utilisation du fichier biométrique tiré du Recensement administratif à valeur d’état-civil (RAVEC) mais la problématique du temps semble tempérer cette demande au point que d’autres prônent que les élections générales de 2012 soient organisées sur la base du fichier actuel de la Direction générale aux élections que la classe politique a pourtant disqualifié. Pour ne pas tomber dans le piège d’un report éventuel du scrutin. Au sortir de cette rencontre, nous avons jugé opportun de recueillir les avis d’un des meilleurs experts du continent, le Général Siaka Sangaré, patron de la Délégation générale aux élections, dont l’intervention a sauvé le processus électoral dans beaucoup de pays africains.

L’Indépendant: Mon Général, que peut-on retenir après cette première rencontre avec les partis politiques?

GSS: Je ne voudrais pas faire trop de commentaires, mais juste vous donner quelques détails qui permettront d’alimenter les débats et les réflexions avant la problématique des listes électorales. C’est pour dire que la problématique des listes électorales n’est pas propre au Mali. C’est dans tous les pays que le problème se pose, surtout en Afrique francophone. C’est pour cela que nous sommes partis des listes manuscrites vers des listes informatisées et, aujourd’hui, nous allons vers des listes biométriques. Les listes biométriques pour dire globalement le fichier biométrique, a ses avantages et également ses inconvénients, disons même ses limites.

Quels sont ces avantages et ces inconvénients ?

Au titre des avantages, il y en a deux en ce qui concerne le fichier électoral principalement. Le premier avantage, c’est que la biométrie, introduite dans l’établissement des listes électorales, permet d’asseoir l’unicité physique de chaque électeur, et cela a été démontré tout de suite à travers la restitution des résultats provisoires du RAVEC et la présentation de son mode opératoire. La dame qui a essayé de se faire recenser deux fois, en changeant de date de naissance, a été identifiée comme recensée deux fois et nous avons retenu un seul recensement. Le deuxième avantage, c’est l’identification sûr de chaque électeur, non seulement au moment de l’enregistrement, mais même au moment du vote. Voilà les deux gros avantages qu’on tire de l’introduction de la biométrie dans l’établissement des listes électorales. Mais il faut reconnaître que la biométrie a des contraintes, au nombre desquelles il y a le coût. Cela coûte cher, excessivement cher. Au Sénégal, le fichier biométrique a coûté 24 milliards FCFA, au Bénin plus de 40 milliards FCFA, en Guinée 15 millions de dollars. Je refuse de citer la Côté d’Ivoire parce que c’est la plus mauvaise référence, puisque le coût a dépassé 70 milliards FCFA et l’élection du président de la République y a mobilisé plus de 300 milliards FCFA. C’est l’élection la plus coûteuse au monde.

Est-ce qu’il y a des difficultés qui font qu’on ne pourra pas utiliser les données du RAVEC lors des élections générales de 2012?

Evidemment, en plus du coût, il y a le problème du délai. Il y a des contraintes énormes de délai et partout où la biométrie a été introduite, le délai initial n’a pas été respecté. En Guinée, c’était prévu pour un an, nous avons fait deux et quelque. Au Bénin, c’était prévu pour moins d’un an, cela a duré deux ans. Au Sénégal plus d’un an, alors que c’était prévu pour six mois. Nous sommes confrontés à la même difficulté de délai et il est important de le dire. En plus de cela, sur le plan technique, la biométrie a des limites. Elle ne résout pas tous les problèmes. Ici, en Afrique, notre biométrie est basée sur les empreintes digitales. Dans le milieu rural où la majorité de la population se livre à des travaux champêtres, en tout cas à des travaux manuels, les empreintes digitales sont souvent difficiles à lire et ça provoque de faux rejets ou de fausses acceptations. De ce fait, la qualité du fichier dépendra du taux de faux rejets et de fausses acceptations. Nous allons revenir là-dessus plus tard, mais voilà des choses dont je vais parler lors des débats, à l’occasion de la prochaine réunion qui sera peut être consacrée à ce sujet. Il est bon de rappeler qu’en Guinée, nous avons pu enrôler 3 800 600 électeurs correctement, mais il y avait 12%, soit à peu près 462 000 électeurs, qui étaient mal enrôlés. Mais nous avons fait avec.

Dans le cas malien, qu’allez-vous allez faire? Disons comment allez vous résoudre le problème ?

J’avoue que le système malien est une référence dans la sous-région, parce que nous avons couplé le recensement biométrique avec la modernisation et la consolidation du système d’état civil. Les autres ont raté cette occasion parce qu’ils ont tous effectué des recensements à vocation électorale biométrique, et 5 ans après, les données n’étaient plus utilisables. Il fallait reprendre et cela a coûté cher au départ. C’est pourquoi, dans toutes les communications que je fais, je dis que le Mali a fait le meilleur choix. La modernisation et la configuration avec notre système électoral a été couplée avec le recensement avec les données biométriques. C’est vrai, aujourd’hui, la question se pose. Il faut supprimer le fichier actuel, pour aller vers le fichier biométrique, mais chacun a sa position et nous allons vous donner toutes les explications la prochaine fois. Ce qui vous permettra, vous-même, d’asseoir les convictions des uns et des autres.

Aujourd’hui, on dirait que ça ne va pas entre la DGE et le MATCL ?

Il n’y a pas de problèmes entre la Délégation générale aux élections (DGE) et le Ministère de l’Administration territoriale et des collectivités locales. Depuis 2002, en passant par 2007, nous avons organisé des élections ensemble, avec beaucoup de compréhensions. Seulement, il y a eu cette étude que nous avons menée sur le fichier électoral. Le ministre l’a dit, tout le monde en a reconnu la pertinence. Mais au moment de l’application, la CENI a mis le pied dans le plat. Chacun en a fait son interprétation et ça a failli créer de faux problèmes. Mais je vais faire remarquer que lorsque le Général Kafougouna Koné était délégué général aux élections, personne ne l’a vu dans une réunion de concertation à côté du ministre Ousmane Sy. Si je suis là, c’est parce que lui et moi nous avons décidé de faire en sorte que nous puissions travailler, comme il l’a dit, en symbiose, mais également en synergie. Entre la DGE et le MATCL, il n ya pas de problème. Mais je voudrais profiter de l’occasion pour préciser que la DGE ne relève pas du Ministère de l’Administration territoriale. C’est cette confusion que je voulais relever. A la prochaine réunion, nous allons présenter tous les détails du fichier électoral et le RAVEC, en démontrant le mécanisme, le schéma qui est défini pour que nous pussions utiliser le fichier biométrique dans les échéances électorales de 2012. Le MATCL et la DGE sont déterminés, notre objectif, c’est de pouvoir utiliser le fichier biométrique en 2012.

Kassim TRAORE

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