Nous n’avons pas ici l’intention de faire une présentation exhaustive de ces trois hommes ayant en commun le parti de l’abeille solitaire. Pour le reste, ils semblent très différents. Leur passé instruit suffisamment sur leur avenir politique et sur celui de l’ADEMA-PASJ. Quelles sont les forces et les faiblesses de ces trois éventuels prétendants au seul fauteuil de président de la République ?
Parlons de quelques unes d’entre elles. Ainsi :
Dramane Dembélé. Premier vice-président de l’ADEMA. Pour rafraîchir les mémoires, rappelons que cet homme était l’élève politique de Alpha Oumar Konaré, ancien président de la République. Une façon de dire qu’il a étudié avec minutie sous le contrôle de Alpha Oumar Konaré toutes les méthodes de conquête du pouvoir en République du Mali. De là, conclure que Dramane aura la bénédiction et le soutien de Konaré, ‘l’on n’en sait rien !
L’autre maître en politique de monsieur Dembélé n’était autre que son futur adversaire dans le parti ADEMA en vue de représenter la ruche à la présidentielle à venir : nous avons nommé Dioncounda Traoré. Dramane Dembélé a occupé des postes de responsabilité non des moindres dans l’administration publique. L’autre atout (s’il en est un) est le lien qui unit le ministre Tiémoko Sangaré à Dra : celui-là fut son professeur à l’ENI. Peut être que c’est pour cela qu’il l’a poussé au poste de 1er vice-président du parti et lui-même président.
Mais si ces réalités ainsi évoquées peuvent militer en faveur de Dramane Dembélé, est-il besoin de dire que des faiblesses pourraient obstruer le chemin de son ascension vers Koulouba !
Visiblement, Dra ne fait pas l’unanimité dans les rangs des cadres maliens. Bien au contraire ! Ces cadres, dans leur écrasante majorité, ne voient pas d’un bon œil (même si leur probité morale reste à établir !). Ils lui reprochent de détenir une fortune colossale. Est-ce par sens élevé du bien public ou par simple égoïsme malien ? En tout cas, l’ancien élève de Alpha et poulain de Tiémoko Sangaré est fortement accusé de faire main basse non seulement sur une école publique mais aussi des logements sociaux de Niamana !
Ces accusations peu reluisantes constituent à n’en pas douter une grosse épine dans les pieds de l’ancien ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat du Mali.
Adama Sangaré. Il reste le maire du district de Bamako en dépit des nombreux soubresauts dont il a fait l’objet dans un passé pas lointain. Il est propriétaire de grands domaines terriens au Mali. Ancien militant du Rassemblement national pour la démocratie (RND) de Me Garba Tapo. Ce parti, il faut le rappeler, s’est fondu dans l’ADEMA.
L’on comprend donc pourquoi, il n’est pas exagéré de dire que Adama Sangaré doit sa fortune à la ruche. Ce serait par ailleurs un pléonasme que de dire que la mairie du district lui a tout donné, entre autres : villas, voitures, vergers, immeubles. Des langues moins discrètes diraient que Adama serait détenteur de milices. Mais qu’est-ce qui milite vraiment contre Adama Sangaré ?
Adama, aux dires de bien de citoyens et de cadres maliens, parle mal. Son insolence serait l’une des raisons qui l’amènent à ne respecter personne. En sa qualité de détenteur de fortunes colossales, Adama serait l’homme qui viole les lois parce qu’il détient un trésor de guerre.
Dioncounda Traoré. Président illégitime de la «transition» de 2012 au Mali, Dioncounda est un stratège, un fin calculateur en sa qualité de spécialiste de la géométrie analytique. Il fut ministre de la Défense, de la Fonction publique et des Affaires étrangères durant le règne de Alpha Oumar Konaré. Il a été président du parti de l’abeille solitaire.
Mais l’arbre ne saurait cacher la forêt : le géomètre a toujours brillé par son laxisme et sa médiocrité politique. Dioncounda Traoré est le plus vieux de tous les candidats susceptibles de briguer la magistrature suprême du Mali. Il détient sans conteste le record d’ancienneté dans les fonctions occupées.
Quel regard porter sur l’ADEMA ?
Au regard de toute l’histoire de ce que l’on aime appeler ADEMA, il convient de se demander si le «parti ADEMA» est un groupement d’intérêts économiques (GIE). En tout cas, en 2002, les barons de ce «parti» ont soutenu à cor et à cri la candidature de l’indépendant Amadou Toumani Touré (ATT) contre Ibrahim Boubacar Keïta (IBK).
Tout s’est passé comme s’il y avait un pacte secret entre le premier président de l’ADEMA Abdrahamane Baba Touré et le premier président de la 3ème République Alpha Oumar Konaré. En tout cas, la simplicité et l’engouement avec lesquels le chef de la transition a cédé son fauteuil à Alpha, en juin 1992, laissent perplexe.
Etait-ce quelque chose de ce genre: ’’Je te cède le trône et à la fin de tes deux mandats à la tête de l’Etat, tu me passes le relai.’’ Est-ce pour un tel jeu politique que les démons et les diables de la division ont réussi à casser le parti de l’abeille solitaire et à chasser les abeilles qui ont construit le miel de la ruche ?
En tout cas, nul doute que cette ruche a été occupée par les frelons de l’ADEMA. La suite n’a échappé à personne : l’ouvrier-artisan principal de la confection de la ruche en la personne de feu Mamadou Lamine Traoré a été débarqué de l’ADEMA sans d’autres formes de procès.
Le professeur de philosophie a entraîné à sa suite des éminences grises comme Mohammedoun Dicko, l’historien émérite, le professeur Tiémoko Sangaré, alors député ADEMA élu à Bougouni et président du groupe parlementaire ADEMA à l’Assemblée nationale, en 1992, l’honorable député de l’ADEMA, Mme Kané Nana Sanou, le philosophe (pardon le professeur de philosophie) Abdoul Karim Fomba. Ils sont tous sortis en masse de l’ADEMA pour fonder le Mouvement pour l’indépendance, la renaissance et l’intégration africaine (MIRIA).
Mamadou Lamine Traoré en fut le secrétaire national et Tiémoko Sangaré, son secrétaire politique. Comme s’il y avait une main invisible du mauvais diable dans les affaires politiques du MIRIA, les fuyards de l’ADEMA sont retournés en masse dans la ruche. Peu importe la décence en politique.
Tiémoko a pu à son retour dans l’ADEMA se mettre à la tête du ministre de l’Environnement. Le professeur de philosophie, M. Fomba, a été nommé proviseur du lycée Dowélé Marico de Dioïla par les soins du ministre de l’Education nationale de l’époque Moustaph Dicko. Ce n’était pas la fin du feuilleton orchestré et joué par ces politiciens criquets : ATT est revenu à Koulouba cette fois élu en sa qualité d’indépendant. Mamadou Lamine Traoré, le maître du sable et des devins, est allé à la remorque du général ATT. Sorte de compte à rebours ?
En tout cas, dès son arrivée à la tête de l’Education nationale, Mala a entrepris son remue ménage : le professeur de philosophie Fomba est relevé de son poste de proviseur. Fut-il rattrapé par l’histoire ? En tout cas, au regard de ce qui s’était passé, il aurait aujourd’hui une lecture nouvelle de toute cette histoire.
Aussi, pour montrer qu’il était le chef incontesté de l’Education, Mamadou Lamine Traoré a organisé son fameux concours de recrutement des directeurs des centres d’animation pédagogique (DCAP) : sur 70 DCAP nommés par l’ADEMA, seuls huit (08) ont gardé leur fauteuil.
Histoire de dire qu’il y avait un pacte secret entre le ministre haut perché et les huit retenus des anciens DCAP. Les soixante- deux (62) autres ayant été injustement remplacés sans tenir compte de leur compétence et des réussites à leur poste ont intenté un procès contre le ministre Mala. L’arroseur a été à son tour arrosé : le ministre a perdu la bataille juridique.
En 2013, les barons de l’ADEMA ont refusé de présenter un candidat du parti. C’était pour soutenir IBK. Etait-ce le contenu d’une promesse pour laquelle IBK a accepté d’être le «perdant», en 2002, contre ATT ? Nietzsche a dit que le temps est galant !
En tout cas, l’histoire retient que Dramane Dembélé était le seul à sauver l’honneur de l’ADEMA en refusant de suivre le complot des barons de la ruche.
Au regard de ce tumulte des événements politiques à l’ADEMA, l’on ne peut manquer de s’interroger plus d’une fois !
Les barons qui ont fait et défait la ruche sont-ils vraiment des patriotes, des nationalistes ou des apatrides ? Comment comprendre que plus de quinze (15) ans après le départ de Alpha Oumar Konaré, le parti ADEMA n’arrive toujours pas à se ressouder ? Y a-t-il un candidat à l’ADEMA pour sauver les meubles et donc le Mali ?
Le temps nous édifiera amplement sur ces multiples interrogations. Mais la seule certitude aujourd’hui, c’est qu’il est impérieux pour notre peuple de se rassurer que cette race de politiciens à l’œuvre au Mali ne peut servir utilement la cause de nos masses travailleuses. La preuve a été donnée par l’élection d’IBK. Aujourd’hui, ils sont très rares les électeurs maliens qui se reconnaissent en IBK et pour cause :
– La vie au Mali devient de plus en plus infernale pour le peuple travailleur.
– La corruption et la délinquance financière étouffe cruellement tout espoir de développement du Mali à l’avantage des masses laborieuses.
– Le slogan qui a galvanisé les énergies nationales pour élire IBK à savoir : ‘’Le Mali est un et indivisible’’ est tout simplement classé dans les calendes grecques. Il n’y a là que secret de polichinelle : Kidal est coupé de fait du Mali et l’ennemi de tous les temps de notre pays, la France coloniale, s’est installé durablement dans le septentrion de la terre de nos ancêtres. Certainement, notre peuple et son armée ne peuvent tolérer plus longtemps cette occupation illicite de notre territoire par la France, n’en déplaise à ceux qui ont vendu leur âme aux diables ! La liberté est au bout du sacrifice.
Il faut donc aujourd’hui que les Maliens comprennent deux choses essentielles :
- La classe politique actuelle totalement discréditée ne peut servir la cause de notre peuple travailleur.
- Il faut une recomposition du paysage politique national si nous ne nous voulons pas rester les dindons de la farce. Ainsi, il y aura d’un côté, les ennemis intérieurs du Mali avec leur conscience d’Occident capitaliste réfractaires à toute idée de changement véritable et de l’autre les patriotes convaincus qui doivent se retrouver pour sauver la nation malienne.
A cette seule condition, le Mali reviendra aux Maliens pour donner un avenir radicalement nouveau épris de paix, de justice véritable et de développement durable.
Modibo Keïta disait : «Lorsque les propriétaires deviennent des observateurs, c’est le festival des brigands». Les nouveaux dirigeants qui auront la charge de conduire les destinées du Mali nouveau s’approprieront sans retenue ces phrases prémonitoires du président Modibo Keïta.
Il disait au seuil de l’an 1961: «Nous, dirigeants et membres du gouvernement, demeurons fidèles à l’engagement de conduire notre peuple vers un avenir meilleur. J’affirme que les dirigeants du parti se consacreront entièrement à cette tâche et je préviens d’avance que tous les obstacles qui s’y opposeront seront immédiatement brisés, qu’ils viennent de l’intérieur ou de l’extérieur».
Fodé KEITA