Non satisfait de surplomber l’équipe gouvernementale par des battages médiatiques sur les activités de son département et ses initiatives crypto-personnelles, le ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale s’offre en outre le privilégie de ramer à contre-sens des missions fixées au gouvernement. Et dont il devrait logiquement partager les résultats avec l’ensemble de ses collègues.
L’un des plus récents coups médiatiques du chef de la diplomatie malienne concernait la relance de son association à dessein très peu collectif, en l’occurrence l’ASMA (Association des Amis de Soumeylou Boubèye Maïga). À l’annonce du rebondissement de cet instrument politique, l’alma-mater malien, massivement convié à l’événement, attendait plutôt un bouleversement de la donne électorale par l’ancien Directeur de la Sécurité d’Etat, très célèbre dans les surprises du genre. Mais Soumeylou B. Maïga, contre toute attente, n’a pas osé franchir un Rubicon qui lui aurait sans doute coûté la perte d’un maroquin, en vertu des mises en garde d’ATT de se débarrasser systématiquement de tout membre du gouvernement qui s’enticherait du désir de briguer la magistrature suprême. Il est donc loisible de comprendre pourquoi le ministre des Affaires Étrangères a dû momentanément étouffer ses ambitions, en laissant toutefois le flou entier et total autour de ses visées et intentions. Histoire peut-être de laisser la porte entr’ouverte à d’éventuelles opportunités de circonstance ?
En tout cas, depuis que l’insécurité bat son plein dans le septentrion malien, un rabattement des cartes, bien plus qu’une simple probabilité, est perçu du côté du 5ème vice-président comme un créneau exploitable. Pendant que ses camarades du Parti de l’Abeille se battent comme des beaux diables pour préserver la démocratie malienne d’un enlisement institutionnel imminent, Soumeylou B Maïga – comme d’autres prétendants à la magistrature suprême tout aussi dépassés par les contraintes temporelles – mise visiblement quant à lui sur un chaos institutionnel porteur d’une éventuelle inversion de rapport de forces; voire d’un report d’échéances électorales susceptible de déteindre sur le choix interne des partis ou de rendre jouable un acte de candidature anti-statutaire.
Le ministre des Affaires Etrangers, selon toute évidence, n’est point un acteur passif d’un tel scénario. C’est pourquoi nombre d’observateurs commencent à s’interrogent si son échec à prendre langue avec les représentants du MNLA en Algérie n’était pas la conséquence de calculs politiciens et d’un pari très intéressé sur les implications politiques de l’insécurité. De telles suspicions paraissent pour le moins corroborées par la bataille acharnée que mène le ministre pour défendre l’opportunité d’un report des échéances électorales. Ce fut le cas lors d’une récente rencontre des ressortissants du Nord-Mali à Bamako.
Conviés comme tant d’autres cadres pour examiner la situation dans le septentrion, le ministre des Affaires Etrangères en a profité non seulement pour glisser le sujet des élections dans les débats, mais aussi pour suggérer aux participants une résolution où il est proposé aux hautes autorités de surseoir à l’organisation des élections. Mais la subtilité aura tourné court parce qu’elle n’a point échappé à la vigilance de certains qui lui ont tout gentiment rétorqué que la rencontre des ressortissants du Nord n’est pas un forum du Gouvernement et que la possibilité ou non de tenir les consultations électorales à dates échues relève du ressort exclusif de l’administration électorale et des autorités compétentes sur la question.
Le plus grave est que Soumeylou B. Maïga, ce faisant, rame visiblement à contre-courant d’un gouvernement où il occupe une place prépondérante et non des moindres. Il n’est un secret pour personne, en effet, qu’il est membre d’une équipe gouvernementale dont la mission essentielle et centrale – en vertu de la lettre de cadrage du président de la République – consiste à organiser des élections libres, crédibles et transparentes dans les délais constitutionnels. Aussi le chef de l’Etat attache-t-il à la question du prix à la proportion des présomptions qui pesaient sur lui et de intentions qu’on lui a prêtées de vouloir tripatouiller les textes fondamentaux, dans le sens d’un troisième mandat. Aujourd’hui la donne a certes évolué avec l’insécurité grandissante dans le septentrion malien – avec notamment un déplacement massif d’électorat qui risque de déboucher sur une désaffection des urnes -, mais il ne revient pas à un ministre de se désolidariser ouvertement d’une équipe gouvernementale qui, nonobstant cette situation, est en train de déployer de gros efforts et de mettre les bouchées doubles pour respecter l’organisation à dates échues, en vue d’éviter des scénarii imprévisibles pour la démocratie malienne. C’est dans ce sens que le chef de l’Etat a même demandé à la classe politique de lui proposer un schéma de sortie de crise qu’il a même accepté d’insérer dans celui de son gouvernement.
Il est donc inexplicable que les sacrifices des hautes autorités continuent d’être contrariés par des actions périphériques au risque d’annihiler chaque résultat engrangé.
N’Tji Diarra