Les effets collatéraux de la guerre qui se passe actuellement au Nord-Mali agissent comme des accélérateurs de particules. Alors, de formidables acteurs se sont levés pour faire revenir dans nos questionnements le temps donné pour les élections de 2012. Quand certains dénoncent, d’autres acquiescent ou restent songeurs aux fins de leurs ambitions.
Les élections de cette année 2012 seront une occasion à ne pas manquer pour revisiter certaines de nos certitudes, de nos fragilités. Va-t-on renouveler la réflexion sur notre vouloir vivre ensemble dans le même espace territorial ? L’Etat a perdu le monopole de la violence sur son propre territoire de 1 241 238 km2. On se « canarderait » à qui le mieux dans les zones sablonneuses du Nord. Chaque candidat déclaré, de la taille qu’il est, y va de sa petite musique sur les conséquences attendues de ce Nord actuellement vérolé par la rébellion. Tous les vendeurs de véhicule (selon les modèles) vous le diront : la valeur de reprise est calculée en fonction des cours de l’argus. Les propos inflationnistes que l’on entend de nos prétendants au fauteuil présidentiel feront-ils ou pas un handicap de stature ? Nous avons vu des partis politiques proposer comme sortie de crise à notre affaire peut-être une solution collective. Mais avec la qualité des différents intervenants, on voit bien que derrière chacun d’eux se profile une ombre partisane. Or de cela, on va dire que les forces qui viennent de signer la plateforme sur la paix peuvent se retrouver demain comme forces de gouvernement, autrement dit de propositions après les élections, si elles ont lieu. Tous candidats qu’ils soient, ils ont changé de discours sur le risque de dégradation du climat électoral et social. Tous ont le même jugement d’atteinte à la note du Mali. Comme s’ils avouaient par là qu’une fois aux commandes, ils ne seraient pas là à gérer sur le même tempo le problème qui affecte. Certains préconisent de laisser passer l’orage, mais ce n’est pas une solution car cela pourrait après « renchérir » le coût de notre démocratie.
Le calendrier avalisé est-il donc un acquis qu’il ne faudrait en aucun cas fragiliser ? Pour certains, ça l’est et c’est l’une des conditions nécessaires pour protéger la jeune démocratie malienne, notre modèle social même. Pour ceux qui sont contre l’évolution des choses actuelles, les dates fixées ne sauraient ressembler au fétiche « komo ». Il existerait « des clés de procédures » ne nous permettant pas de jurer avec la Constitution. Un cas intéressant. Le ministre Soumeylou Boubèye Maïga vient de se faire reprendre d’utilité comme on dit (un rappel à l’ordre ?) par son patron à Koulouba. Bien qu’il passe pour être un « féal de qualité », le Président ATT n’a pas apprécié la dernière sortie médiatique de son ministre des Affaires étrangères sur les antennes de RFI. S’était-il répandu dans des considérations politiciennes sur notre temps électoral et qui n’aurait pas plu à l’Exécutif ? On ne serait pas loin de la « potion » Chevènement qui vous conseille de ramener toujours vos propos de ministre sous le col. Enfin, pour les sans-notes parmi nos candidats, ceux qui n’ont pas d’avis à donner, ils se taisent pour une fois, ramassés sur leur digestion. Ce ne sont pas enfin nos candidats déclarés qui nous rendront compte que nous sommes déjà avancés sur plus d’un mois de conflit violent (commencé le 18 janvier dernier) et que l’on s’interroge toujours sur la réalité du terrain des opérations. La tactique du harcèlement des assaillants étant, qu’en est-il de nos manœuvres de contre-attaque ? Bouge-t-on sur les lignes, avance-t- on vers quels buts stratégiques avec les moyens dont nos forces de défenses disposent ? Nos forces de défense devront arriver à faire démentir les propos que l’on prête au voisin mauritanien lorsqu’il disait que « le Nord-Mali est une zone pratiquement laissée pour compte… ». Pour sortir des turbulences, rien de tel que remodeler les conduits d’air, dit-on. Au regard de l’heure électorale, chacun de nos candidats va surfer sur les subtils décalages de notre loi fondamentale où se dévoilent les méandres de leurs propres ambitions. Petits candidats et candidats de gros calibre s’affrontent donc à distance sur ce dossier du Nord. Les seconds n’ont rien à perdre sinon leur crédit de vaincu à une élection. Quant aux petits candidats, ils doivent continuer à peaufiner leur personnalité, la conception de l’action publique pour nourrir une nouvelle alternance. Une gouvernance du dossier qui met à nu depuis les accords d’Alger sur les registres de la transparence et des secrets de Koulouba. Verbatim.
Les petits candidats parlent, se lâchent parfois. Les candidats de gros calibre murmurent ou font des « bulles » (pensez au mot « intérim » dans la bouche de Dioncounda). Ce même Dioncounda Traoré invite les uns et les autres à sortir « des petites supputations politiques…et sauvons l’autorité nationale ». Il a lancé à la cantonade : « Une transition n’est pas mon affaire, un intérim oui ». Est-ce une obligation constitutionnelle ? Si cela arrivait, une fois à Koulouba, le Président de la République en place cesserait d’être un parlementaire. Soumaïla Cissé, qui nous rappelle qu’il n’est toujours pas en campagne, dans sa marche sur le pays (régions de Mopti, Ségou, Bamako), retrouve un parti URD bien structuré. « L’URD est une force montante, bien née au firmament du ciel politique malien », disait- il. Il ajoutera que sans une société de confiance, il n’y pas de développement. Le candidat s’est promis une analyse définitive des raisons de cette rébellion. Qu’il faut reconsidérer la gestion de notre Nation. Nous devons respecter nos institutions, les laissez faire ajoutera-t-il. Lors de la 12è édition du Forum de Bamako, Modibo Sidibé dira : « Nous trouverons les ressorts nécessaires pour le dialogue, la paix, la stabilité et la sécurité de notre pays. Notre Etat a le devoir de maintenir l’unité nationale et d’assurer l’intégrité du territoire ». Moussa Mara : l’horloge roule avec lui. Il considère la sécurité comme un devoir cardinal de l’Etat. Pour les déplacés, les autorités ont plus de deux mois pour les faire revenir. 50 000 déplacés ne peuvent empêcher des millions de voter. Mara propose la solution militaire contre toute sédition. Il veut que l’armée occupe un rayon d’intervention maxi de 100 km pour l’opérationnalisation du dispositif offensif. Il veut engager 7 000 militaires sur le front avec support logistique conséquent, renforcer le site de Kidal, maintenir nos forces en place pendant 8 mois. La gestion de cette phase sécuritaire a un coût : 20 milliards de FCFA. La coopération sous-régionale est attendue dans cette lutte et chiffrée à 100 milliards de FCFA. La quote-part du Mali : 40 milliards de FCFA. A Koulikoro, Mountaga Tall déclarait que « le Mali est face aux exigences des consultations politiques et référendaires… ». Revenant sur l’article 118, Alinéa 2 de la Constitution, Me Tall pense que les élections peuvent se tenir…à moins que les conditions changent. Jeamille Bittar disait : «Nous avons les moyens et il faut une large concertation à ce niveau… Mettre fin à cette crise et tenir les élections à la date annoncée sera une belle leçon de démocratie ». Le candidat Bittar enfonce plus loin « ceux qui appellent à une transition politique déjà et qui jugent la vacance du pouvoir se livrent à des calculs qui ne tiennent pas compte de la nécessité de participer au plan de sauvetage de la patrie en danger ». Enfin Madani Tall qui ne parle pas ici de son égo. Il retiendra l’attention en faisant entendre que la force de l’unité nationale est la force de l’armée nationale. Les pays amis doivent se prononcer, dit-il ; sur la légalité de ce mouvement MNLA. Il n’y a pas deux solutions : il faut utiliser la force. Tall continue en invitant les leaders touaregs à désapprouver ces terroristes. Il y a un front de la démocratie qui exige d’assister l’Etat pour les élections à venir. C’est inédit : Madani Tall lance un premier appel du genre à Housseini Amion Guindo dit « Poulo », Ousmane Ben Fana Traoré, Tiéman Hubert Coulibaly, Yeah Samaké, Moussa Mara… pour apporter chacun sa pierre. Une démarche peu ordinaire, mais généreuse. Les petits candidats vont-ils continuer à nous surprendre? Ne dit- on pas que le pot de terre peut vaincre le pot de fer, surtout quand ce dernier est rongé par la rouille ? Voici de petits candidats qui veulent refonder les choses.
S. Koné