La loi d’orientation et de programmation militaire passe à l’unanimité à l’assemblée nationale : Entre sursaut budgétaire et rebond patriotique

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Assemblée nationale (photo archives)

En tant que telle, les députés lui ont accordé leur caution, Vendredi, à l’issue de l’ultime plénière de la session extraordinaire convoqué par le gouvernement. Mais en confortant l’unanimité autour du Dépoté N°15-01/5L, de nombreux représentants de la Nation, principalement de la majorité, n’ont pu faire l’économie de l’amertume que leur a laissée les dérives militaires ayant entrainé la division du pays, son occupation ainsi que la séquestration de ses populations par une poignée d’assaillants armés. Pour eux, aucune révolution budgétaire ne peut venir à bout des lacunes de l’armée malienne sans le bond patriotique adéquat, la culture de la discipline et le retour de la confiance dans les rangs.

 

En tant que catalogue de bonnes intentions, la LOPM n’exclut aucun aspect du mécanisme national de défense, dont les lacunes ont été mises en évidence par les irrésistibles assauts de la rébellion et de la poussé djihadiste. Les combler et permettre à l’Armée d’exercer convenablement sa mission passent dès lors par des mesures correctives en termes de rééquipement, de renforcement des effectifs et d’amélioration de leurs conditions sociales. Pour ce faire, la facture sera d’autant salée que tous en conviennent : disposer d’une armée adaptée aux défis et au contexte implique un cout. Et, selon les dispositions de la LOPM, le tribut pour le quinquennat 2015-2019 est pour le moins énorme et inédit. Plus de 1 230 milliards, c’est le prix que le contribuable malien devra payer pour les ambitions militaires du Mali pendant la période concernée. Ce montant inclut par ailleurs les dépenses estimatives du fonctionnement régulier du secteur sur cinq années, soit 514,6 milliards qui,  déduits du montant global ramène le niveau des besoins supplémentaires à sa juste proportion : une bagatelle de 715,8 milliards. Les efforts commencent dès l’exercice budgétaire en cours avec une prévision de plus 104 milliards consentis au titre de la mise en œuvre de la réforme.

En tout état de cause, la Grande Muette aura englouti à l’horizon 2019 entre 2 et 3,5% du PIB, soit une moyenne de 21% du budget national à prélever sur les recettes fiscales. Ce taux étant en deçà de celui exigé par les PTF (Banque mondiale), la LOPM, soutient-on, n‘impactera nullement sur le niveau du déficit budgétaire et se présente comme une réforme soutenable à tous points de vue.

En termes de répartition budgétaire, 34,75% des 1 230 milliards reviennent aux investissements (427,5 milliards), 35,97% aux dépenses de fonctionnement (442,5 milliards), tandis que le personnel représente une part de 29,29% avec 360,8 milliards.

Ces efforts financiers devraient permettre de doter les différents démembrements de l’Armée des moyens humains, matériels et didactiques en adéquation avec leurs besoins d’opérationnalité, leurs missions de défense de l’intégrité territoriale et de protection des citoyens. Une attention particulière est accordée, à ce sujet, à l’équipement des unités, au relèvement des effectifs ainsi qu’à l’amélioration du cadre de vie et de travail du personnel. C’est dans ce cadre, entre autres, que s’inscrivent les nouveaux recrutements envisagés et les indemnités compensatrices de logement pour les militaires non-logés comprises désormais entre 40 000 et 100 000 francs CFA selon les échelons. Le traitement salarial accusera, dans la même foulée, une revalorisation indiciaire de 20% échelonnés sur les trois premières années de la réforme.

Bref, autant de bonnes intentions qui ont forcé l’admiration des parlementaires, y compris ceux de l’opposition habituellement très avares en opinions positives sur les lois sensibles.

Seulement voilà : tandis que les problèmes de l’armée malienne sont perçus sous l’angle de ses besoins financiers par les uns, d’autres sont convaincus, au contraire, que les efforts financiers ainsi consentis ne seront d’aucun effet positif sans la confiance et la discipline dans les rangs, le sens du sacrifice qui ont fait défaut aux troupes lors de la débâcle devant les assauts  rebelles et djihadistes.

Le lièvre a été soulevé par le président du Groupe parlementaire de l’Adema-PASJ, l’Honorable Issa Togo, avant qu’un autre de ses camarades, en l’occurrence le vice-président de l’Assemblé Hamada Soukouna, n’enchaine avec un impitoyable réquisitoire contre l’Armée malienne. «Au lieu de se battre au front du Nord, elle a plutôt choisi de terroriser les paisibles citoyens de la capitale», a-t-il mentionné devant le parterre de hauts gradés drainés par la présence du ministre de tutelle à l’hémicycle.

En dénonçant au passage une armée en deçà de ses engagements républicains, le député élu à Yélimané s’est dit persuadé que le coup d’Etat de Mars 2012 est la principale cause de la flétrissure infligée au peuple. «Le peuple malien a été humilié par son armée», a-t-il scandé, en rappelant la gênante occupation des trois régions du Nord en moins de trois jours. Et  d’ajouter, par la même occasion, que c’est par la faute de la même armée que le pays est aujourd’hui contraint à négocier en position de faiblesse à Alger.

Le colistier de Mamadou Awa Gassama Diaby ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Pour lui, l’ennemi d’en face ne disposant pas d’avions et de moyens plus conséquents, la différence ne peut résider que dans le sens du sacrifice, le courage et l’acceptation de se donner entièrement à la patrie. Or, «aller à l’armée c’est choisir le sacrifice ultime», a-t-il indiqué, estimant que l’armée malienne va demeurer la même tant qu’on n’aura pas intégré cette dimension dans le mécanisme des recrutements souvent biaisés par les intérêts familiaux d’officiers supérieurs.

En réveillant ainsi les vieux démons de la pression putschiste sur le politique, pendant la transition, le député Soukouna n’a pas prêché dans un désert. Pour confirmer que la solution ne réside pas dans les seuls efforts financiers, d’autres collègues de diverses obédiences politiques lui ont emboîté le pas, en mettant l’accent notamment sur le rôle prépondérant  de l’engagement patriotique et républicain dans l’édification d’une armée digne de la confiance populaire. D’autres, en revanche, n’ont accueilli que trop froidement leurs gênantes remarques sans doute parce que la parenthèse replonge les rapports politiques dans l’atmosphère qui avait prévalu avant les dernières élections générales : le  dualisme entre ‘’gagnants’’  et ‘’perdants’’  des dérives militaires.

La Rédaction

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