Mme Doumbia Bibi Sangho est la Directrice de l’Association pour la Sauvegarde de l’Enfance (ASE-Mali) . Cette association, qui est une référence aujourd’hui en matière de promotion des enfants orphelins et de parents démunis, est confrontée à d’énormes problèmes pour mener à bien sa mission. Dans l’entretien qu’elle a bien voulu nous accorder, Mme Doumbia Bibi Sangho évoque, entre autres, la nécessité d’acquérir un espace pour la construction de son siège, la promesse faite par le président de la République, ATT, d’offrir un car aux enfants de ASE-Mali ainsi que ses relations avec les ministères du Développement Social et de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille.
Bamako Hebdo : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Doumbia Bibi Sangho : Je suis Mme Doumbia Mali Sangho. Je suis Tantie Bibi pour les enfants de l’Association pour la Sauvegarde de l’Enfance (ASE-Mali) et ceux du Mali. Je suis actuellement la présidente de ASE-Mali, qui à ouvert un orphelinat il y a six ans et Présidente du réseau de toutes les institutions d’accueil et de placement pour enfants au Mali.
Peut-on savoir ce qu’est ASE-Mali ?
L’Association pour la sauvegarde de l’enfance (ASE-Mali), que je dirige depuis sa création en 1993, est une ONG qui souhaite appuyer toutes les activités en faveur des enfants au Mali. Par Cela va de la vaccination à la sensibilisation pour une meilleure nutrition pour le développement de l’enfant. J’ai eu l’initiative de créer le premier centre privé d’accueil et d’hébergement pour enfants en situation difficile, l’orphelinat de ASE-Mali. Depuis treize ans, nos activités sont principalement basées sur la promotion d’une meilleure qualité de vie pour tous les enfants.
Quelles sont les missions que vous vous êtes assignées ?
Nos missions sont essentiellement la promotion, l’accueil et la sensibilisation des familles autour des problèmes de l’enfant. Quand je parle des problèmes de l’enfant, c’est tous enfants confondus, c’est-à-dire de 0 à 17 ans. Les enfants orphelins et de parents démunis ont été notre plus grande préoccupation ces dernières années.
Combien d’enfants sont pris en charge aujourd’hui par votre structure ?
L’ASE-Mali a pris en charge 165 enfants et en a placé 200 dans des familles qui n’ont pas les moyens de prise en charge. Nous ne efforçons, à travers un grand projet de parrainage, d’aider ces familles pour la prise en charge nutritionnelle et sanitaire. Il s’agit également d’envoyer les enfants, surtout les filles, à l’école.
Quelles difficultés rencontrez-vous le plus fréquemment ?
La plus grande difficulté rencontrée par notre structure, de 1993 à 1998, a surtout été un problème de promotion de notre organisation. De 1998 à nos jours, c’est l’implantation de l’orphelinat d’ASE-Mali. Il faut aussi reconnaître que la prise en charge des enfants et la location du centre posent aussi problème.
De 2001 à 2006, nous avons reçu en moyenne 20 à 30 bébés par mois. Ces bébés ont besoin d’être logés, de médecins, de nutrition, parce qu’ils sont issus de parents démunis Il est vraiment difficile de loger tous ces enfants. Qui dit logement, dit toutes les charges que cela peut engendrer. Notre staff technique n’est plus adéquat par rapport à la demande actuelle. Au début, nous étions une association de jeunes femmes qui voulaient aider les enfants.
Aujourd’hui, nous sommes confrontées aux besoins du centre. Il nous faudrait un pédiatre, des infirmières spécialisées, des nutritionnistes spécialisés pour la prise en charge adéquate des enfants. Parmi eux, il y en a qui ont perdu leur maman. En général, les pères ou les parents en charge n’ont même pas les moyens d’acheter une boite de lait.
Comment fonctionne ASE-Mali ?
Notre fonctionnement est régi par nos statuts. Je suis la directrice et je travaille avec des collègues qui ont aussi décidé de consacrer le reste de leur vie à sauver celles de ces enfants. Depuis cinq ans, j’emploie 24 personnes. Alors que nous n’étions, de 2001 à 2002, que dix employés. Aujourd’hui, nos employés travaillent dans quatre départements, à savoir l’administration, la garderie éducative, la pouponnière, la production de l’attiékè.
C’est un micro projet que nous avons initié pour pouvoir subvenir à la prise en charge nutritionnelle des enfants. Il y a cinq personnes qui s’occupent de ce volet. Cette production est la ressource minière de notre organisation, parce que c’est la seule qui fonctionne normalement et qui fait rentrer de l’argent, pour que nous puissions continuer à nourrir et à soigner nos enfants.
La pouponnière est la salle des bébés, dont les plus petits ont de 0 à deux ans. Son staff se compose uniquement de jeunes femmes bénévoles qui ont décidé de venir travailler au Centre, dans l’espoir un jour d’être salariée et de pouvoir en faire bénéficier leur famille.
Quels sont vos rapports avec les ministères de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille et du Développement Social?
Nous avons eu des rapports techniques avec ces ministères. Après la création de l’orphelinat de ASE-Mali, le ministère en charge de la promotion de l’Enfant est tout d’abord intervenu par des visites, afin de se rendre de notre situation et de la nécessité de sa création. Ils nous ont aidé sur les plans technique et documentaire. Au départ, nous n’avions que des registres, aujourd’hui nous nous avons toute la documentation adaptée pour accueillir, placer et adopter un enfant. Nous entendons faire encore plus avec la direction régionale de l’enfant.
Le ministère du Développement Social a également intervenu plusieurs fois pour aider à sauver des enfants atteints de bec-de-lièvre, une maladie qui défigure le visage de l’enfant. Le ministère a aussi intervenu dans le traitement d’un enfant qui était gravement malade. Dieu merci, nous faisons partie des ONG qui reçoivent annuellement une subvention de la part du ministère du Développement Social et des Personnes Agées.
Je suis convaincue que ce n’est qu’un début de collaboration et, que dans les années à venir, nous ferons beaucoup plus avec eux, tout en continuant, nous-mêmes à prouver que nous méritons cette aide offerte par les deux départements. Notre premier bailleur gouvernemental est le Fonds de Solidarité Nationale (FSN).
Quand j’ai commencé l’orphelinat, les bébés étaient par terre. C’est grâce au premier appui financier du FSN qu’aujourd’hui notre centre a des berceaux, des armoires pour ranger les habits, une armoire à pharmacie. Nous avons même reçu du matériel informatique, ce qui nous permet de communiquer avec le reste du monde sur internet, toujours grâce au FSN.
On se rappelle que le Président de la République avait promis un car pour les enfants ASE-Mali. Qu’en est-il?
Le grand ami des enfants, Amadou Toumani Touré, président de la République, a effectivement promis aux enfants un car. C’était à l’occasion de la cérémonie du bon élève à Koulouba, en septembre 2005. Ce jour-là, la troupe théâtrale de ASE-Mali, a produit une très belle prestation. La petite orpheline qui a imité Babani Koné a demandé au président de nous acheter un car pour que les orphelins puissent aller où ils veulent sans avoir des problèmes. Je sais qu’ATT, quand il promet, surtout à des orphelins, va le faire. Nous savons que ce véhicule va arriver. Peut-être allons-nous le recevoir lors de la prochaine cérémonie du bon élève. Qui sait ! Les enfants me posent des questions tous les jours à propos de cette voiture.
Qu’en est-il du problème du siège de ASE-Mali ?
ASE-Mali, en tant qu’ONG reconnue d’utilité publique par la Mairie de la Commune IV, a reçu un terrain à usage d’habitation pour y construire son siège et son centre depuis le 31 décembre 2005.
Nous avons un financement déjà acquis de la part du Fonds de Développement Français pour les travaux. Malheureusement, pour des raisons que nous ignorons, jusqu’à présent ce terrain n’a pas été mis à notre disposition. Nous avons de très rapports avec le Maire Issa Guindo, qui nous suit régulièrement et qui s’occupe des enfants de ASE-Mali, et je pense que cette histoire de terrain n’est sûrement pas à son niveau.
Je profite de cet entretien pour lancer un appel au Président de la République, l’ami des enfants et mon frère ATT. Nous avons urgemment besoin de ce terrain pour construire l’orphelinat de ASE-Mali. Il faut qu’il nous appuie afin que cela soit résolu le plus vite possible. Parce que l’Ambassade de France, si nous n’avons pas commencé à remuer cette terre pour les orphelins dans un mois, va reprendre son financement, selon l’accord-cadre signé entre les deux parties. Nous sommes actuellement confrontés au douloureux problème de la location, car nous sommes dans un quartier (ACI 2000) où elle coûte cher. Nos charges sont vraiment énormes.
Pouvez-vous nous parler des différents Ambassadeurs des enfants de ASE-Mali ?
Nous en avons tellement. Les premiers Ambassadeurs des enfants ont été nommés en 2003. Ce Il s’agit d’Adama Diarra, Directeur du Fonds de Solidarité Nationale, d’Oumou Sangaré, une artiste qui a toujours partagé tout avec les enfants, de Naïny Diabaté, qui, en plus d’être Ambassadeur, a aussi parrainé certains enfants de ASE. Nous avons eu à nommer d’autres Ambassadeurs en 2004, 2005 et 2006, que je ne pourrais pas tous citer. Mais, je veux quand même dire que parmi tous ces ambassadeurs des enfants, celle qui m’a le plus émerveillée est une petite fille qui a huit ans.
Le jour où cette fillette a découvert l’orphelinat de ASE-Mali, elle a demandé à ses parents si elle pouvait venir fêter son anniversaire, le 7 avril 2006, ici. Avec l’accord de ceux-ci, la petite Nènè Traoré, est venue fêter son anniversaire. Elle a invité cent enfants du Collège Horizons, son école. Ces enfants ont apporté cent cadeaux.
Et Nènè les a laissé à ASE-Mali, comme cadeaux à une petite orpheline qui n’avait jamais fêté son anniversaire et qui avait le même âge qu’elle. C’est l’ambassadrice qui m’a impressionné en 2006 et je garde encore le souvenir de cet après-midi. Nènè en partant, a ainsi donné quatre cartons de jouets, de vêtements, de livres scolaires à une fille qui ne connaissait même pas sa propre date de naissance.
Alou B HAIDARA“