Presidentielle 2013 : Les enseignements d’un scrutin historique

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Après avoir suscité de nombreuses appréhensions  et de réelles inquiétudes, l’élection présidentielle de juillet – août 2013 s’est finalement déroulée sans que les prédictions des Cassandre ne se  réalisent. En effet, on peut désormais dire, malgré le constat de difficultés et de faiblesses non négligeables,  que le scrutin aura été globalement une remarquable réussite.

 

 

election xAprès un premier tour caractérisé par une organisation matérielle et logistique approximative et de fortes tensions occasionnées par des  annonces intempestives des résultats du vote, le second a été marqué par la maturité politique des candidats et par un meilleur cadre d’organisation.

 

Maturité politique des acteurs

En jetant un regard rétrospectif sur le déroulement de la campagne électorale, on peut, malgré quelques débordements enregistrés ici et là, faire le constat que  les deux camps opposés, celui d’IBK et de Soumaïla Cissé, ont agi dans le sens de l’apaisement dans l’entre – deux tours. Ce résultat, qui n’était pas forcément attendu par les observateurs, est à mettre d’abord au crédit des deux candidats.

En appelant au calme et au respect des résultats du scrutin, IBK et Soumaïla Cissé ont en effet grandement contribué à instaurer dans leurs camps respectifs un climat de sérénité même si la quasi absence de campagne – elle n’aura duré que deux jours – a également joué un rôle dans cette situation.  Ce faisant, ils ont coupé l’herbe sous les pieds de ceux de leurs partisans qui voulaient en découdre. A cet égard, il convient de mettre l’accent sur la déclaration faite par le candidat de l’URD le 9 août au sortir de la prière du vendredi. Au cours de cette déclaration, il a émis le souhait que le scrutin se tienne dans la quiétude insistant sur l’attachement des Maliens à la paix et à la convivialité.

 

 

Quant au candidat du RPM, sa remarquable retenue face aux communiqués prématurés de victoire de certaines radios privées et face aux pronostics hasardeux du Ministre de l’Administration territoriale –  lesquels le donnaient vainqueur dès le premier tour-  a considérablement refréné les ardeurs de ses supporters. Nul doute que les choses auraient pris une tournure différente s’il avait emboité le pas à ceux qui voulaient vaille que vaille l’élire au forceps avant même la fin du match. Mieux, le désormais futur président pour les cinq années à venir s’est abstenu de monter au créneau lorsque des accusations de fraude massive se sont fait entendre dans le camp adverse.

 

 

Geste historique et républicain

Mais l’évènement majeur de ce second tour, et l’on aurait mauvaise grâce de ne pas y insister, aura été incontestablement le geste fort de Soumaïla Cissé qui, dès lundi soir, et avant même que le Ministère de l’Administration Territoriale ne proclame les résultats provisoires, s’est rendu au domicile d’IBK pour le féliciter  d’une « victoire méritée » et acquise de « belle manière » avant de lui souhaiter plein succès dans ses nouvelles missions.

 

 

D’une rare élégance, le geste historique de Soumaïla Cissé, diffusé en boucle dès le lendemain par les média du monde entier, a été sans doute un facteur puissant de décrispation des tensions qui entouraient le scrutin.

 

 

Saluée à juste titre par le vainqueur qui, bon prince, y a vu « une bonne surprise » et un « évènement gigantesque », la démarche de Soumaïla Cissé a eu également le mérite de provoquer un choc salutaire chez les maliens, en les exhortant à transcender leurs divergences et à mettre en avant en toutes circonstances l’intérêt national.

Acte fondateur d’un nouvel âge politique fait de responsabilité ou simple coup politique ? D’aucuns, irréductibles contempteurs du leader de l’URD, ont déjà tranché. Il ne s’agirait que d’une astucieuse opération de communication destinée à camoufler une cuisante défaite électorale. On peut simplement leur rappeler que l’intéressé a déjà démontré par le passé qu’il était un bon perdant et un démocrate convaincu en félicitant en 2002 ATT, devant lequel il s’était incliné à l’issue du second tour de l’élection présidentielle tenue cette année là.

 

 

Quoiqu’il en soit, il faut espérer que ce que les différents protagonistes du scrutin présidentiel viennent de démontrer contribuera chez nous à redonner à la politique et aux hommes politiques plus de crédibilité et de respectabilité.

 

 

Un cadre d’organisation amélioré

Malgré les multiples satisfécits décernés à l’issue du premier tour par les observateurs du scrutin, celui – ci avait été marqué par de très nombreuses insuffisances et des faiblesses patentes. Retards dans la mise en place du matériel électoral, ouverture tardive ou non ouverture de bureaux de vote, non ouverture des bureaux de vote et non mise à disposition de cartes NINA dans les juridictions de l’Etranger, attroupements dans les centres de vote, cafouillages divers et faible orientation des électeurs, quasi –  exclusion des maliens vivant dans les camps de réfugiés, tel est le rosaire des dysfonctionnement et insuffisances constatées qu’on peut égrener à souhait.

 

 

Fort heureusement, d’importantes améliorations ont été apportées au dispositif d’organisation lors des opérations du second tour, même si l’on a pu constater également des cas de fraude et des dysfonctionnements préoccupants. Mais dans l’ensemble, des corrections utiles ont été apportées avec une meilleure gestion des flux de votants, favorisée par la réduction du nombre des candidats au second tour, et une organisation logistique et matérielle plus adéquate.

 

 

Des efforts importants ont été également déployés afin de permettre aux réfugiés et aux maliens de participer au vote. Nul doute que les administrations électorales, fortes des enseignements tirés à l’issue de la présidentielle qui vient de se dérouler, auront à cœur de dissiper les inquiétudes et soupçons de fraude, en préparant avec une plus grande rigueur les scrutins à venir. Elles devront se convaincre qu’elles ne bénéficieront pas de la même compréhension qu’elles ont eue pour la tenue de la présidentielle, perçue par tous comme étant le passage obligé vers la sortie de crise, même si cette sortie devait se faire avec un agenda électoral extrêmement resserré avec de nombreuses imperfections.

 

 

Une participation populaire avérée

 

Même s’il faut s’attendre à ce qu’elle soit légèrement plus faible qu’au premier tour,  la participation des citoyens au vote n’a pas fait défaut le 11 août. Malgré la pluie battante, les Maliens se sont en effet massivement rendus aux urnes pour élire leur nouveau président. Il s’agit là également d’un motif de satisfaction, qui autorise à fonder un grand espoir quant au renouveau de la démocratie tant souhaité par nos populations. Cet objectif ne pouvant être atteint sans une participation citoyenne effective à la vie publique, et en particulier au vote, on peut penser que le scrutin de dimanche traduit la nouvelle prise de conscience qui semble s’être opérée dans le pays sur cette question cruciale pour son avenir démocratique.

 

Birama FALL

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