Le Mali face à une élection cruciale pour son avenir et celui de la région

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Samedi 27 juillet, les Maliens paufinent les derniers préparatifs pour l'élection présidentielle. REUTERS
Samedi 27 juillet, les Maliens paufinent les derniers préparatifs pour l’élection présidentielle.
REUTERS

C’est le jour J pour les Maliens. Dimanche 28 juillet, ils se rendent aux urnes pour choisir un nouveau président parmi les 27 candidats en lice. Un scrutin sous haute tension, dont les enjeux pour l’économie, la sécurité et le développement du pays sont primordiaux.

 

Ce dimanche 28 juillet, les Maliens sont appelés à se rendre aux urnes pour élire leur président de la République. Surtout, ce scrutin doit permettre de remettre en œuvre la Constitution, suspendue depuis le coup d’Etat du 22 mars 2012, mené par le capitaine Sanogo et ses proches. Une élection « précaire », selon les mots du président par intérim Dioncounda Traoré et du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, sur laquelle reposent tous les espoirs. « Même si l’élection est imparfaite, elle doit être respectée », estime M. Traoré.

 

Malgré les imperfections, la très grande majorité de Maliens est finalement en mesure de voter. Sur les quelque 6,9 millions de Maliens inscrits sur les listes, 85% ont retiré leur carte d’électeur. Un chiffre encourageant, dans un pays où le taux de participation est toujours inférieur à 40%. En 2007, seuls 35% des électeurs s’étaient déplacés.

 

Toute la journée de dimanche, les votants doivent choisir entre les 27 candidats qui se présentent. Cette élection fait l’objet d’une rare attention, puisqu’elle est surveillée par un nombre record d’observateurs : la Cédéao (250), l’Union africaine (nombre indéfini) et l’Union européenne (100) ont envoyé des représentants. A terme, si aucun candidat n’obtient la majorité absolue, un second tour est prévu le 11 août prochain.

 

Pour voter, les Maliens vont utiliser une carte d’électeur fabriquée par la société française Safran. Baptisée « Nina » (Numéro national d’identification), elle s’est retrouvée ces derniers jours au cœur de soupçons de projets de fraude. La faute aux 1 100 000 cartes vierges en stock. Aucun risque, assurait sur RFI le chef de la délégation européenne, Louis Michel : « Ces cartes sont chez le fabricant, elles sont stockées, en France ».

 

Parmi les quelque 500 000 Maliens qui ont dû fuir la guerre, et sont aujourd’hui déplacés dans le sud du pays, ou réfugiés dans des camps en Mauritanie ou au Burkina Faso, beaucoup n’ont pas récupéré leur carte Nina. Dans l’immense camp de Mbera, en Mauritanie, quelque 70 000 réfugiés devraient quand même pouvoir accomplir leur devoir de citoyen.

 

Les enjeux de l’élection

 

Sécurité. L’élection intervient six mois après l’intervention française, le 14 janvier dernier. Les forces maliennes, dont la formation a tout juste commencé, ne sont présentes dans le nord que dans la ville de Kidal. Le reste de cette partie du Mali est sécurisé par les troupes françaises et par les casques bleus. Si tous les candidats s’accordent pour dire qu’il faut une armée forte, le général de Saint-Quentin, ancien commandant de l’opération Serval, explique dans les colonnes du Journal du Dimanche que « l’armée malienne a été désorganisée » et qu’il faudra « du temps pour reconstruire tout cela, dans un pays aussi vaste ».

Corruption. Le Mali fait l’objet d’une corruption endémique, à tous les niveaux de l’Etat. Les Maliens sont nombreux à dénoncer le favoritisme et les passe-droits dont bénéficient les plus aisés. Dans les services publics et les services de sécurité, les maigres soldes sont aussi l’un des moteurs de pratiques récurrentes.

Economie. La situation économique au Mali reste catastrophique. Avec 50,4% de Maliens vivant sous le seuil de pauvreté, un PIB d’à peine 490 euros par habitant et un indicateur de développement humain cantonné en 182e position sur 186, tout reste à faire. L’insurrection qui a secoué le nord du pays a encore aggravé la situation. Bamako fait reposer son économie sur l’or et l’agriculture. Une agriculture largement victime du conflit, qui mériterait d’ailleurs d’être développée tant son potentiel n’est pas exploité à l’heure actuelle. L’Union européenne et la France ont promis respectivement une aide économique de 520 et 280 millions d’euros, à condition qu’un nouveau président soit élu.

Jeunesse. Trois Maliens sur cinq ont moins de 25 ans. Ils représentent aujourd’hui 60% de la population. Pourtant, une partie d’entre eux ne pourra pas se prononcer dimanche : comme le fichier électoral repose sur le recensement de 2009, 300 000 jeunes aujourd’hui majeurs n’ont pas pu être pris en compte. Ils sont pourtant les premiers à faire face à la difficile situation économique du pays et peinent à trouver du travail.

Unité. La réunification du Mali, dans son intégrité, reste à faire sur les plans politique et social. Le nord du pays reste en proie aux tensions. Les communautés peule et songhaï, notamment, gardent des rancunes contre les Touaregs et les ethnies arabes qui vivent dans cette partie du pays : elles les considèrent comme responsables de la situation. Ces dernières réclament une meilleure prise en compte par Bamako de leurs besoins et de leurs attentes.

Kidal, symbole des ruptures communautaires

 

Malgré le retour du gouverneur à Kidal, cœur historique de la communauté touarègue, le déployement de l’administration dans le nord du Mali est loin d’être achevé. Et la ville de Kidal elle-même est toujours l’objet de tensions importantes. Les Touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) ont longtemps refusé l’accès à la cité aux forces armées maliennes. Il aura fallu de longues négociations au Burkina Faso pour arriver, le 18 juin dernier, aux accords de Ouagadougou.

 

Les combattants du MNLA sont cantonnés et ont accepté de laisser le scrutin se dérouler. Les équipes de la commission électorale sont pourtant en proie à la peur, après l’enlèvement, puis la libération, de cinq agents électoraux et d’un élu la semaine dernière dans la région de Kidal.

 

La France toujours en première ligne

 

Les militaires français de l’opération Serval sont encore 3 300 au Mali. Ils vont participer activement à la sécurisation du scrutin, en coordination avec les 13 000 hommes de la Minusma. Paris espère pouvoir désengager au plus vite ces troupes, François Hollande ayant annoncé qu’il n’y aurait plus qu’un millier d’hommes sur place à la fin de l’année.

 

La France reste le principal soutien à la tenue d’élections le 28 juillet. Paris espérait pouvoir mener ce scrutin au plus vite afin d’avoir des autorités politiques légitimes comme interlocutrices au Mali. Beaucoup de Maliens dénoncent le « forcing » français pour avoir une élection, estimant que les conditions ne sont pas remplies pour une présidentielle transparente. L’ex-candidat, retiré de la course, et négociateur des accords de Ouagadougou, Tiebilé Dramé, qualifie ainsi sur RFI le ministre des Affaires étrangères français Laurent Fabius de « directeur des élections au Mali ».

 

Par RFI

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