IBK, président : Et maintenant ?

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Les autorités maliennes viennent de procéder à l’élection d’un président de la République légitime et crédible aux yeux de la communauté internationale. Mais sa légitimité et sa crédibilité, aux yeux de la communauté nationale, passent surtout par la réussite de certains grands chantiers qui l’attendent. Quels sont-ils ?

 

Ibrahim Boubacar Keïta
Ibrahim Boubacar Keïta

En l’absence de toute décision administrative et judiciaire, tout le monde, y compris son plus farouche adversaire, semble accepter la victoire d’Ibrahim Boubacar Kéita, président et candidat du Rassemblement pour le Mali, à l’élection présidentielle, la cinquième depuis les événements de mars 1991 et le début du processus démocratique au Mali. IBK sera donc, sous réserve de la décision de la Cour constitutionnelle, le troisième président de la République élu, après Alpha Oumar Konaré (1992-2002) et Amadou Toumani Touré (2002-2012). Comme ses deux prédécesseurs, IBK aura un agenda chargé.

 

 

Selon IBK lui-même, il s’agit de mettre en place un gouvernement qui va aborder cette période de transition que constitue le prochain quinquennat. Mais selon certaines indiscrétions, il n’y aura pas de gouvernement d’union nationale, comme cela se doit d’ailleurs, mais une équipe qui sortira des rangs des vainqueurs. Quels sont-ils ? Impossibles de le savoir avec certitude dans ce contexte de ralliement massif à la cause d’IBK duquel beaucoup attendent des dividendes.

 

Déjà, au moins deux mois après l’installation de ce premier gouvernement, il aura à gérer le dossier du nord, ce que la communauté internationale s’évertue à appeler la réconciliation nationale. Entendez par là, le retour de la bonne entente entre les communautés du nord, essentiellement entre Songhay et Touareg. Le préalable à cela, c’est le retour, en toute confiance et sécurité, des populations du nord déplacées ou réfugiées.

 

Ce dossier, malgré les cris d’orfraie de certains pays occidentaux et africains, n’est pas aussi difficile à gérer, de manière définitive ou durable. En effet, les communautés du nord ont toujours vécu en bonne intelligence, tissant même entre elles de solides liens sociaux. Elles pourraient encore continuer à vivre ensemble, paisiblement et en bonne harmonie, si l’Etat prenait son courage à deux mains pour aborder franchement la question des groupes armés. Parce qu’en réalité, c’est entre les communautés du nord et le Mouvement national de libération de l’Azawad qu’il y a conflit. Or, au sein du Mnla, il n’y a pas que des Touareg mais aussi des Songhay, Peulh, Bellah, etc. Ils sont à l’origine de la rébellion indépendantiste dont des groupes armés narcoterroristes et jihadistes ont profité pour occuper trois quarts du territoire national. Mais si, grâce essentiellement aux troupes françaises et tchadiennes, cette menace semble pour le moment repoussée, le risque de déstabilisation demeurera toujours tant que les auteurs ou co-auteurs des atrocités commises dans le nord continueront à jouir de l’impunité. Le peuple, civil et militaire, a besoin que justice soit rendue. Avant même le lancement du processus électoral, la justice malienne avait commencé à agir en lançant des mandats d’arrêt internationaux contre les présumés auteurs ou complice de massacres divers et de narcotrafic. Au nombre de ceux-ci figurent des responsables du Mnla qui continuent de narguer le peuple malien, forts de l’asile offert par des pays africains et occidentaux. Récemment, ils ont participé à Ouagadougou (Burkina Faso) à une table ronde autour de laquelle siégeaient également des officiels maliens, rencontre qui a accouché d’un accord que le gouvernement n’aurait dû signer. Pire : un des responsables du Mnla contre lequel un mandat d’arrêt international a été émis était récemment à Bamako où il est même intervenu à la télévision publique nationale, ravivant la douleur des victimes et la colère des familles des disparus. La meilleure manière de réussir la réconciliation nationale est de réparer les préjudices en trainant les responsables rebelles terroristes devant la justice nationale ou internationale. Pour l’heure, ce sont des pays comme la France, l’Algérie, le Burkina Faso et la Mauritanie qui peuvent œuvrer dans ce sens.

 

 

Mais également, IBK, lui qui a promis au peuple malien de lui rendre son honneur et sa dignité. Pour cela, une autre tâche qui attend le futur locataire de Koulouba, c’est d’abord une autre réconciliation, celle entre les différents corps de l’armée nationale. Ensuite, il s’agit d’entreprendre les réformes au sein de toutes les forces armées et de sécurité afin qu’elles soient véritablement républicaines et au service exclusif de la nation. Il est heureux que ces forces bénéficient, de la part de la communauté internationale, de formation militaire, technique et en droits de l’homme. Cependant, l’effort doit être continu notamment en termes d’équipements, de dotations et de traitements pour que l’armée malienne puisse se consacrer à sa mission première de défense de l’intégrité territoriale.

 

 

Un autre chantier sur lequel le président élu est attendu, c’est celui de la restructuration du tissu social et économique notamment en termes d’amélioration de l’économie nationale et de création des infrastructures sociales (éducation, santé, eau potable, hygiène, assainissement, etc.). En mai dernier, plus de deux mille milliards de francs Cfa ont été promis au Mali pour la relance de son développement. Le déblocage de ce fonds était conditionné à la tenue d’élections libres et transparentes devant doter le pays d’institutions légitimes et crédibles. C’est bientôt chose faite et, dès lors, les regards et calculettes sont tournés vers l’Occident. Lequel doit aujourd’hui tenir ses promesses et ne pas faire comme en 2006 à Kidal où les promesses de financer le développement des régions du nord Mali se sont traduites en monnaie de singe.

 

 

Le chantier le plus important du prochain quinquennat demeure les réformes institutionnelles telles que prévues par le président Touré et dont le pays a besoin de toute urgence, notamment la révision constitutionnelle qui doit permettre au Mali d’assurer sa refondation. Mais pour réaliser de telles réformes, le président IBK, si son élection est confirmée, doit pouvoir jouir d’une totale liberté de manœuvres ; en particulier, il ne doit pas être pris en otage par les associations musulmanes ou certains milieux des forces armées et de sécurité qui croient avoir assuré son élection. En réussissant ces chantiers, totalement ou en grande partie, le nouveau président de la République pourrait espérer sur un deuxième mandat. Autrement, il sera sanctionné comme les vétérans du FDR viennent de l’être.

Cheick Tandina

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11 COMMENTAIRES

  1. MALIWEB EGAL FDR,
    VIVE LA JUNTE
    VIVE IBK
    VIVE LE CHERIF DE NIORO
    VIVE SANOGO GENERAL
    VIVE MARIKO
    VIVE LE CNRDRE
    VIVE SABATI 2012
    VIVE TOUS LES PARTIS QUI ONT APPORTES LEURS VOIX A IBK
    LE PEUPLE MALIEN A GAGNE CONTRE UNE MAFIA.

  2. Bonjour,
    Félicitations au nouveau Président, Ibrahim Boubacar Keïta, pour le plébiscite obtenu de la part des électeurs Maliens.

    Désormais, il a le feu vert pour la création d’institutions fortes au Mali et pour la reconstruction et le développement durables du Mali.

    Mais, il ne peut le faire sans la quiétude, l’engagement et l’aide de tous les Maliens y compris ceux de l’opposition qu’elle participe au gouvernement ou pas.

    C’est pourquoi la paix et la sécurité doivent être renforcées, de même, la réconciliation et l’unité sont, maintenant, indispensables pour avancer ensemble et bâtir un Mali prospère et solidaire avec l’assurance d’un bien-être durable pour ses filles et ses fils.

    Bien cordialement
    Dr ANASSER AG RHISSA
    EXPERT TIC ET GOUVERNANCE
    E-mail: Webanassane@yahoo.com

  3. “Pour l’heure, ce sont des pays comme la France, l’Algérie, le Burkina Faso et la Mauritanie qui peuvent œuvrer dans ce sens.” Vous vous ets relus?????? vous affirmez plus haut qu’un des “mandates” est venu a Bamako, si on l’a pas arrete en ce moment, comment voullez-vous que d’autre pays respectent notre engamenet que nous n’avons pas pu appliquer. IBK n’a -t-il pas renconter l’un deux a Kidal? Alors un peu de respect. il n’y a rien a attendre de ce cote. Les morts sont mort pour Zeron, nos braves militaires ont souffert dans leur chere pour zero, Ce sont les cancre qui ont gagne.

  4. “IBK, président : Et maintenant ?
    Eh ben, il va falloir partager le butin entre les soldats ratés, les farfelus religieux et les pseudos républicains ayant mangés à tous les râteliers.

    Mais également, IBK, lui qui a promis au peuple malien de lui rendre son honneur et sa dignité.
    Justement! Voilà un point qu’il va falloir expliquer clairement quand la plèbe sera dégrisé et arrêtera de jubiler sans aucune raison valable:
    Car, il n’y a PAS eu UN SEUL COUP DE FEU TIRE par la mégère Merkel pour que les grecs perdent leur “honneur” et leur “dignité” 🙁

  5. L’espoir fait vivre. Il y a quelques mois de cela mon pays le grand MALI étais la risée du monde a travers des événements comme l’entrée des djihadistes , les jeux d’intérêts politiques au sud , le lynchage du président par intérim etc …Des pratiques qui ont atteind le malien dans sa dignité. Mais aujourd’hui nait l’espoir avec des élections réussis ,le geste élégant et plein de sens du challenger Soumi ,la volonté du peuple de sortir de cette crise . La formation d’un contre pouvoir avec une opposition forte(constructive) bref tout cela augure des solutions pour gagner le pari de la reconstruction nationale et du developpement .
    Mais pour que tout cela se concrétise il faudra transformer les beaux discours en acte concret en nous mettant au travail , a mettre l’homme qu’il faut a la place qu’il faut en privilégiant la valeur(compétence).
    FIER d’être MALIEN ET QUE DIEU BÉNISSE NOTRE PAYS !!!

  6. Je dois reconnaître mon tort à l’égard du Pr Dioncounda quand a sa capacité a dirigé la transition. Je me suis vraiment trompé à son compte, en postant aussi pas mal de texte peut réjouissant à son égards.
    Une fois de plus il démontre qu’il mérite son titre de professorat.
    Toutes mes excuses.

  7. Merci Sekou le phliosophe pour cette analyse pointue! J’esper que tu n’as pas cessé d’ecouter Steve Miller Band. Bonne journée!

  8. Merci Cheick, votre article merite une profonde reflexion. J’oses croire que le silence maintenu depuis quelques temps par le president IBK aborde et medite sur ce que vous venez d’ecrire.
    Tout malien et malienne doivent maintenant se poser la question a savoir: Que puis je faire pour mon pays?.
    Merci.

    • que la clairvoyance et la sagesse de Papy1 animent tous les Maliens et Maliennes pour la mise sur orbite d’un grand Maliba amen !

  9. Et maintenant le travail commence,nous lui souhaitons au fond de nos coeurs bonne chance,qu’allah soit avec lui.

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