Dans le microcosme politique malien, il existe une dizaine, tout au plus, une quinzaine de « jeunes » hommes et femmes qui sont dérangeants, même s’ils sont de votre côté a fortiori s’ils se déclarent contre vous. Ces « jeunes » hommes et femmes, qui sont tout de même au moins quinquagénaires et se sont pour la plupart illustrés dans la lutte pour l’avènement de la démocratie, sont ambitieux- ce qui n’est pas nécessairement une tare- entreprenants et connus de tous. Ils sont presque tous, imbus de leur personnalité et acceptent rarement de jouer le second rôle à quelque poste qu’ils se trouvent.
Depuis plus de vingt ans, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition du moment, ils sont incontournables quand il s’agit de la vie politique au Mali. Tous ont eu à exercer un moment donné ou exercent de nos jours des responsabilités. Certains d’entre eux sont traités d’iconoclastes et n’ont pas comme ont dit, leur langue dans la poche. D’autres plus calmes, pondérés mais sûrs d’eux-mêmes. Ils inspirent la méfiance soit à cause de leur liberté de verbe qui frise quelques fois l’insolence, soit pour leur expertise de nuisance. Chaque président, depuis l’instauration de la 3ème République a eu son lot d’incommodants. Seul le président Amadou Toumani Touré a su surfer sur les vagues tumultueuses de cette marée politique de la démocratie malienne en anéantissant toute culture de démocratie représentative par une gestion dite consensuelle du pouvoir, qui serait une spécificité malienne. Cette pratique était en fait une mythification, destinée à dépolitiser la gestion politique du pays. Elle avait été dénoncée à l’époque par l’Association Démocratie et Justice (ADJ) du professeur feu Abdoul Diop dit Traoré- que son âme repose en paix- par la publication d’un manifeste dont le 1er paragraphe stipulait : « Une menace plane sur le pays : celle de la dépolitisation intégrale de la gestion de notre nation et comme corollaire logique à cet état de fait, l’émergence et la promotion d’une culture de l’informel. »
L’histoire a donné raison aux rédacteurs et signataires de ce manifeste, car à la moindre secousse, le pouvoir consensuel s’est écroulé comme un château de cartes.
Parmi ces « jeunes incommodants » de la démocratie nous citerons au moins quatre qui sont omniprésents, qu’on le veuille ou non sur la scène politique nationale. Abhorrés ou admirés, ils sont toujours présents et le font savoir d’une façon ou d’une autre. Il s’agit de: Bokary Tréta l’homme de parti, le militant tout dévoué; Soumeylou Boubèye Maïga, homme de dossier et d’expérience ; Tièbilé Dramé, un homme qui n’est jamais à cours d’initiative et qui possède la fâcheuse technique de faire perdre son latin à son grand-frère Laji Burama et le Docteur Oumar Mariko, très proche du peuple quoiqu’on dise, réélu dans sa circonscription de Kolondiéba au moins deux fois de suite. C’est lui qui faisait passer des nuits blanches à un général ! Mais au fait qu’est-il devenu l’honorable Oumar Mariko ? Comment interpréter son aphonie au cours de cette session parlementaire ?
Nonobstant cet état de pays failli, dans lequel se trouve le Mali, l’espoir est permis si les actes que posent ces « jeunes incommodants » arrivent à titiller les hommes qui nous gouvernent, à les amener à ne pas dormir en paix et à ne pas les laisser la conscience tranquille. Alors, ces agissements seront bénéfiques pour le pays car, ils obligeront le président et son gouvernement, à aller vers la pratique de la bonne gouvernance ne serait-ce que pour assurer leurs arrières.
Wamseru A. Asama