Ibrahim Boubacar Keita (IBK) : Du destin de martyr au statut d’homme présidentiable

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Le parti du Tisserand tisse sa toile. Lentement mais sûrement. En affichant ses ambitions pour l’élection présidentielle de 2012, son leader, Ibrahim Boubacar Keita dit IBK a semé la gloire de son avenir politique. Surtout, à un moment où, les partis politiques, qui étaient favorables pour le second et dernier mandat du président ATT, sont en passe de revoir leur copie. Le baobab semble avoir compris la sagesse du roseau.

S’il y a une leçon à retenir, c’est bien celle donnée par IBK à la classe politique malienne : de tous les candidats, alignés sur le starting-block de la présidentielle de 2002 mais aussi de 2007, c’est lui qui aura mérité de la patrie. Dès l’annonce au premier tour en 2007 du « Takokélen » (plébiscite) du Général « Acheté », ses militants ont menacé de mettre notre capitale à feu et à sang.

Pour la troisième fois IBK s’est senti trahi. La première fois, c’était lors du fameux congrès extraordinaire de l’Adema, dont il était le leader incontesté. IBK revoyait, les mêmes acteurs politiques, qui ont œuvré  pour son éviction de l’Adema, manœuvrer –de  nouveau –pour sa mort politique. Et la deuxième fois, c’était à l’occasion de la proclamation des résultats du premier tour de la présidentielle de 2002.

Mais au lieu de laisser exploser sa colère, il a laissé prévaloir la voix de la raison. La grandeur d’un homme, dit-on, consiste à faire en bien, ce que personne n’attend de lui : voici la leçon qu’IBK a légué, de son vivant, à la postérité.

 

Une valeur sûre de l’intelligentsia malienne

Ne à Koutiala, un 29 janvier 1945, IBK est l’un des plus beaux fleurons de l’intelligentsia malienne. Fils de Boubacar Keita et de Koniba Traoré, son grand père maternel « Tiémoko Bélébélé » à cause de sa forte corpulence, dont le « Kankélétigui » (homme de parole) a dû hériter. D’autres, l’appelaient « Néguèdiourou Tiémoko ». Il était connu, très connu. Le père d’IBK, encore, moins.

Sous la houlette d’un pédagogue de renom, Sory Diakité, IBK réussit –sans peine –son passage en sixième. C’était, en 1958 à Koutiala. Et ses classes terminales à « l’école des grottes » d’Hamdallaye », à Bamako. Toujours sur les conseils de Sory Diakité, il passe avec succès le concours général de l’AOF et de l’AEF, regroupant 14 pays africains. A la proclamation des résultats, il se classe « premier » du  Soudan Français, l’actuel Mali. Puis,  s’envole pour poursuivre ses études au lycée Janson Dessailly.

Obéissant à ses parents, il retourne –momentanément –au lycée Terrason de Fougère, actuel lycée Askia Mohamed, pour passer son bac. Seul élève, dans la série tant redoutée –lettres classiques, latin, grec –il passe son bac avec mention –et retourne en France pour des études d’Ethnologie et d’histoire. Il obtient sa licence et s’inscrit en Science Pô.

Après sa maîtrise dans cette prestigieuse filière, il entre à l’IMRC (Institut d’histoire des Relations contemporaines) de la prestigieuse Sorbone. Il en sort, muni de son diplôme. Puis entame une autre brève carrière de prof à Paristol Biac, à la Sorbone.

Quelques mois après, il est admis au CNRS (le Centre National de Recherches Scientifiques), la Nasa française où, travaille notre compatriote Youssouf Tata Cissé.

 

L’appel du large

De retour au bercail, il est recruté par la communauté Economique Européenne. Il a parcouru tout le septentrion malien avec des ONG.

En 1991, il rejoint les rangs du tout-nouveau parti politique, opposé au régime de GMT, l’Adema.

A l’issue de son congrès constitutif –et sur proposition de d’Alpha Oumar Konaré et de Dioncouda Traoré –il est bombardé secrétaire aux relations extérieures de la ruche. C’est le début d’une carrière politique fulgurante.

Le 8 juin 1991, il nommé porte-parole  et conseiller diplomatique d’Alpha Oumar Konaré. C’était, au lendemain de son investiture, à la magistrature suprême de notre pays aussi, IBK aide Alpha à constituer son premier gouvernement, avec à sa tête, Younoussi Touré (aujourd’hui président de l’URD). Avant de  contenter d’un poste d’Ambassadeur du Mali en Côte-d’Ivoire, au Gabon et au Burkina Faso avec résidence à Abidjan.

A l’époque, Laurent Gbagbo, opposant farouche au régime du « vieux bélier » était son ami. Informé, par ses services de renseignements, Houphouet enjoint à IBK de mettre fin à cette amitié contre-nature. Sous peine de mettre en péril les relations entre la Côte-d’Ivoire et le Mali.

C’était, mal connaître IBK, que de lui dicter sa conduite. Malgré les pressions et les menaces, il est resté encore l’ami confident de Gbagbo.

En novembre 1993, Abdoulaye Sékou Sow succède, à Younoussi Touré. Il rappelle IBK pour lui confier le portefeuille de Ministre des Affaires Etrangères.

L’anecdote raconte, qu’à l’aéroport de Bamako-Sénou, on lui instruit d’attendre qu’on vienne le chercher. Comme s’il était en résidence surveillée. Erreur ! Il rentre chez lui, sans sirène ni gyrophare.

  A la démission de maître Sow, Alpha lui propose au téléphone, le poste de Premier Ministre, depuis Addis-Abeba où, il participait à une session budgétaire.

La suite, on la connaît : IBK impose la rigueur au laxisme des pontes du régime. En dépit des coups bas, dont il faisait l’objet, sa tactique, face à ses adversaires, était imparable : une main de fer dans un gang de velours.  C’est cela qui causera la perte de ses adversaires politiques : passer l’éponge et éviter, d’un seul geste, la tragédie à tout un peuple.

IBK, qui disposait des mêmes chances qu’ATT a décidé, après la décision de la cour constitutionnelle d’arranger son arme en 2002 tout comme en 2007.

Le Mali a besoin d’homme de sa trempe : une noblesse d’âme et un caractère trempé. Surtout, par ces temps où, presque tous les partis politiques –excepté le RPM (Rassemblement pour le Mali) du « Kankélétigui » –ont vendu leur âme au diable.

Incompris au départ, IBK repart à la présidentielle de 2012 avec les faveurs des pronostics. A en croire les observateurs de la scène politique malienne, il fera mal, très mal en 2012.

 

Jean Pierre James

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