Refondation de l’Etat, retour effectif de l’Etat malien sur l’échiquier international, crise sécuritaire du Nord, question de gouvernance et lutte contre la corruption, renforcement de l’outil de défense, etc. Le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita n’a omis aucun sujet majeur des préoccupations du peuple malien. Dans son adresse à la nation à l’occasion de la célébration du 54 ème anniversaire de l’indépendance du Mali, IBK s’est montré optimiste quant à l’avenir du pays, deux ans après la grave crise qui a failli l’anéantir. A propos des négociations inter-Maliens qui se poursuivent actuellement à Alger, le chef de l’Etat affiche la sérénité : ” malgré les tergiversations momentanées, qui sont du reste propres à de telles négociations, la conclusion d’un accord de paix inclusif, global et définitif semble maintenant à portée de main “, a-t-il déclaré.
IBK s’est réjoui du retour croissant des nombreux refugiés. Ceux qui ne sont pas encore de retour, a-t-il expliqué, devraient pouvoir retrouver, dans un avenir proche, leur demeure et leur communauté. ” C’est mon souhait le plus ardent et nous y travaillons. Nous ne ménagerons aucun effort pour que les activités de développement durable prennent leur envol et s’intensifient dans le Nord du Mali en vue de consolider la paix “, a ajouté le chef de l’Etat.
Il a souligné, en outre, le poids et le rôle de la diaspora malienne dans la reconstruction du Mali. Et IBK de reconnaître qu’à chacune de ses visites à l’extérieur, il a pu noter la grande soif de nos compatriotes de la diaspora de connaitre l’état de la Nation, d’avoir des détails sur les questions soulevées par les medias nationaux; et sur les perspectives de développement économique et social, notamment la situation des emplois. Il a exprimé la solidarité du peuple malien envers les peuples touchés par le virus Ebola.
Un programme gouvernemental bien fourni
Abordant le programme gouvernemental, couvrant la période 2013-2018 , le chef de l’Etat a indiqué qu’il vise la conduite d’une véritable transformation économique et sociale, afin de conjurer définitivement les périls graves actuels tels que l’insécurité dans le Nord du pays, les dysfonctionnements des institutions publiques, particulièrement l’administration, afin de mener avec efficacité la lutte contre la corruption et l’impunité, et de freiner tout risque de dégradation grave des conditions de vie des communautés maliennes. Il a rappelé en les explicitant les grands axes de ce programme de gouvernement. Ils concernent la refondation de l’Etat, qui concerne “ comment doter le Mali d’institutions fortes et stables afin de mettre le pays définitivement à l’abri des soubresauts politiques et politiciens, recréer l’espoir -cette fibre individuelle et cette incitation nécessaire pour l’action commune,- et susciter passion et enthousiasme comme en septembre 1960, car la passion et l’enthousiasme sont des ingrédients nécessaires pour le développement durable et pour engager l’ensemble des Maliennes et des Maliens à envisager l’avenir avec sérénité et à s’y investir “. S’y ajoute, dira-t-il, le renforcement de toutes les institutions publiques et l’approfondissement de la démocratie, la restauration de l’intégrité du territoire et la sécurisation des biens et des personnes, la réconciliation des Maliens, le redressement de l’école, la construction d’une économie émergente et la mise en œuvre d’une politique active de développement social.
Traquer la corruption en collaboration avec la justice
Concernant le retour effectif du Mali sur l’échiquier international, IBK a mis l’accent sur une politique extérieure tournée vers le rayonnement du pays sur la scène internationale, le renforcement de sa capacité à honorer tous ses engagements internationaux et à promouvoir la coopération régionale et continentale, la promotion et la protection des intérêts de la diaspora malienne.
Le président de la République n’a pas manqué de rappeler ce qu’il a appelé ” les trois facteurs principaux qui ont caractérisé le contexte stratégique des opérations du Gouvernement ” : la crise sécuritaire du Nord avec ses effets collatéraux et autres traumatismes causés au sein de l’administration, notamment des préfets, sous-préfets et cadres de Kidal qui ont payé le prix fort. S’y ajoute les questions de gouvernance, avec un peuple malien qui affichait peu de confiance en lui-même et en son pays ; et enfin, l’état du partenariat économique et financier avec des déficits criards nécessitant la mobilisation accrue des soutiens extérieurs au profit de l’économie nationale et la mobilisation des moyens de création d’emplois pour notre jeunesse, notamment par des accords de partenariat public – privé. Le chef de l’Etat a rappelé que l’année 2014 a été déclarée ” année de la lutte contre la corruption “. Ce qui n’est pas un effet de mode mais une volonté se traduisant par le désir de traquer corrompus et corrupteurs. ” Tous les dossiers pendants ont été transmis “, a-t-il martelé. Avant d’insister sur la réhabilitation en cours de l’institution judiciaire, la modernisation de l’outil de défense et de sécurité à la hauteur des menaces auxquelles le pays est confronté.
Abordant les réformes institutionnelles entreprises, le locataire de Koulouba a rappelé la tenue à Bamako, les 23 et 24 janvier 2014, du forum sur la corruption et la délinquance financière, et l’actualisation du plan national d’actions 2009-2013 de mise en œuvre des recommandations des Etats généraux sur la corruption et la délinquance financière pour couvrir la période 2014-2018 ; l’évolution positive vers l’instauration progressive de l’égalité absolue de traitement des usagers ; l’amélioration des conditions de travail du personnel de justice ; la préparation d’un approfondissement de la décentralisation par la régionalisation, une des attentes fortes de nos concitoyens. ” Les recommandations des Etats généraux de la décentralisation et des Assises Nationales sur le Nord en fin d’année 2013 ont retenu l’approfondissement de la décentralisation, la mise en place des structures du cadre national d’orientation du Développement Economique Régional et de contrats-plans Etat-collectivités-Régions “, a souligné IBK.
Un accord de paix pour bientôt
A propos de la brûlante actualité relative à l’avenir du Mali en discussion à Alger, IBK dira que malgré les tergiversations momentanées qui sont du reste propres à de telles négociations, la conclusion d’un accord de paix inclusif, global et définitif semble maintenant à portée de main. ” Elle se prolongera par la signature future en terre malienne de l’accord négocié et par la mise en place d’un environnement favorable à l’identification, l’évaluation, la sanction et la conduite d’actions de réparation des préjudices subis du fait des destructions et autres actes délictueux ; ces actions de réconciliation nationale relèvent des missions et responsabilités de la Commission vérité, dialogue, justice et réconciliation “. Ce sera, à l’en croire, le démarrage effectif d’un processus de cantonnement, de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR) de ceux dont le statut de combattants serait formellement reconnu. Enfin, a-t-il précisé, elles aideront à la remise en état de l’outil de production, des services de base et à la création des conditions les meilleures pour un retour franc et définitif des déplacés et refugiés dans leurs terroirs respectifs.
” Nous avons aussi accordé une grande priorité à la définition et à la mise en œuvre d’une politique de défense et de sécurité. Celle-ci définit une réponse claire, armée et non armée, c’est-à-dire autant militaire que civile, de mobilisation des moyens importants de la Nation pour une utilisation optimale dans un dispositif global assurant la sécurité aux frontières, l’intégrité de notre territoire et la sécurité intérieure. Lesdits moyens en hommes, matériels, infrastructures et dispositifs de commandement seront mis en place progressivement. Il y aura, entre autres, comme supports juridiques et financiers, la loi de programmation militaire, la loi de programmation de la sécurité et leurs textes d’application, ainsi que le cadre d’organisation des secours, l’actualisation du cadre légal de lutte contre les trafics illicites et le crime organisé, et le renforcement conséquent des moyens de la police, de la gendarmerie et de la garde “, a déclaré le chef suprême des armées.
D’importants chantiers
Le chef de l’Etat a, par ailleurs, mis un accent particulier sur le programme agricole et de sécurité alimentaire, le programme des infrastructures ; l’école ; le maintien d’un cadre macro-économique stable nécessite l’amélioration de la qualité de la dépense publique et la conduite des reformes fiscales et de gestion. D’autres sujets de préoccupation majeurs ont meublé le discours du chef de l’Etat. Il s’agit du développement social, de la Politique Nationale Genre du Mali, la politique de la jeunesse, les services essentiels de base, la politique du contrôle des prix mise en œuvre par le ministère du Commerce. ” Le bilan d’un an ne suffit pas à faire notre bonheur. Ce qu’il faut, et nous en avons instruit le Gouvernement, c’est saisir chaque opportunité offerte au Mali pour le bien-être du peuple malien. Nous revenons de la Chine populaire où le Gouvernement a signé avec les entrepreneurs chinois de calibre international, des accords portant sur plusieurs milliards de dollars, soit environ 6 mille milliards de FCFA d’investissements structurants dans les domaines de l’agriculture, des transports, de l’éducation, de l’énergie, du business, etc…. Nous devons travailler chaque jour pour que les accords conclus soient des projets vérifiables par le renforcement de la capacité nationale d’organisation, de méthode et d’exécution. Nous y veillerons personnellement comme nous veillons présentement à la mise en œuvre des importants accords signés en février dernier avec le Royaume chérifien “, a-t-il précisé Avant de souhaiter une bonne fête d’indépendance au peuple malien avec l’espoir de voir bientôt la fumée blanche s’échapper d’Alger.
Bruno D SEGBEDJI