A mesure qu’il se sent dans la peau de président, Simbo Fari est en proie à une cure de déracinement. Grâce aux marchés soigneusement enveloppés dans l’opacité familiale, la marmite est désormais pleine. Ne pensez pas qu’elle déborde déjà. Les consommateurs sont triés sur le volet. Le cercle des admis se rétrécit au point que les plus loyaux serviteurs d’hier commencent à grogner. Ils piaffent d’impatience d’être admis à leur tour au banquet. C’est mal connaître Simbo Fari. Il paraît déraciné qu’il peut dire à sa chapelle d’accrocs de beignets : adieu ! Il ne plaide plus leur cause et s’affaire plus à faire avaler au peuple sa soif d’avion, son avion à tout prix. Bas les masques ! Les N’gomiyaralan mô denw, c’est désormais au Rail-da qu’on les trouve tranquilles, vraiment pénards. Même les bidasses ne les perturbent.
Financemement public des partis politiques: La Dge a tripatouillé les textes pour le Rpm
Le financement annuel des partis politiques est tombé, au grand bonheur des formations bénéficiaires, toutes éprouvées par le coût des dernières consultations électorales. La satisfaction est certes à son comble, mais elle ne fait guère oublier la grande injustice ayant émaillé la répartition de la masse à partager.
En plus de ressusciter des errements encore récents dans la mémoire collective, le Rpm peut se prévaloir d’une bien meilleure santé financière. Car, il vient de se hisser au rang de grand gagnant d’un jackpot probablement jamais attribué à un parti politique, depuis l’avène- ment du financement public en 2001. Sur trente-huit partis éligibles -en vertu de l’arrêt de la section des comptes de la Cour suprême- la formation politique du président de la République est gratifiée de la rondelette de somme de 400 millions Fcfa, soit plus de 20 % du montant globale.
Naguère troisième, parmi les plus grands bénéficiaires, il devient du coup le parti le mieux financé et ne souhaiterait sans doute pas proposer aux autres formations de la scène politique de renoncer à l’aide publique, au nom des difficultés que traverse le pays. C’était la proposition par laquelle le Rpm s’était distingué au moment où la portion congrue lui revenait. Aujourd’hui, le parti d’IBK coiffe au poteau son principal rival, l’Adema-Pasj (plus 300 millions Fcfa) et dépasse de loin l’Urd (plus de 200 millions Fcfa).
Imputé au bouleversement du rapport de forces politiques depuis les dernières élections, ce rebond spectaculaire des Tisserands ne manque pas de faire jaser les acteurs de la scène politique. Petites et grandes formations sont stupéfaites et s’accordent au moins sur une chose: la majorité parlementaire du Rpm, est assez récente pour ne pas être prise en compte pour le partage de cette année. Ce ne sont pas les arguments évoqués par la Délégation générale aux élections qui pourront les convaincre.
Recoupement fait, il semble que la démarche de la Dge ne repose pas moins sur une disposition légale : la Charte des partis selon laquelle, la répartition est faite en tenant compte du résultat des précédentes consultations électorales. À l’issue desquelles consultations le Rpm a engrangé près de 70 députés et renfloue du même coup sa cagnotte en vertu des 45 % de la masse à partager au prorata des élus parlementaires. Cet argument ne saurait prospérer aux yeux des contestataires, pour qui, la nouvelle donne n’impacte sur la masse à partager que par volonté délibérée d’anticiper, d’en précipiter les effets. Pour cause, les documents afférents à l’éligibilité au financement ont été déposés à la section des comptes antérieurement aux élections et l’arrêt consécutif est également intervenu dans la foulée des législatives, de même que le bouclage des recettes fiscales sur lesquelles le montant est prélevé à hauteur de 0,25 %.
Doit-on en déduire, par ailleurs, que la Dge a gardé par-devers elle l’arrêt de la section des comptes dans l’attente d’une élection, dont les grandes tendances étaient connues d’avance?
Autre dissonance entre la Dge et la majorité des partis politiques: la structure en charge du financement public fait allusion au financement de l’année 2013 sur le décret, tandis que les formations se situent dans le temps à 2012. Qu’à cela ne tienne, il est mentionné noir sur blanc dans l’Arrêt de proclamation des dernière législatives que les députés de la 5e législature entrent en fonction à compter du 1er janvier 2014 et ne peuvent de ce fait être pris en compte dans le partage d’une aide attribuée avant leur avènement.
Dans tous les cas, il y’a là de quoi subodorer une manœuvre de tripatouillage voire de faux et usage de faux, si tant il est vrai que c’est pour l’aide 2013 que les partis vont procéder au dépôt de leurs documents à la section des comptes, à la date butoir du 31 Mars 2014.
La controverse autour du financement a été par ailleurs évoquée au plus haut niveau. À en croire des sources sûres, il a fait l’objet de vives altercations en Conseil des ministres entre les secrétaires généraux de l’Adema, majorité sortante et du Rpm, majorité entrante, toutes deux membres du gouvernement.
C’est Bocari Tréta qui a pris le dessus, d’après les mêmes sources, en se prévalant d’une jurisprudence antérieure en la matière. Nul ne s’en souvient. Il se trouve que le décret sur le financement est quand même passé sans que sa conformité à la loi ait été clarifiée.
Contrairement au slogan du président de la République, il semble donc évident que certains privilégiés et princes du jour parviennent à survoler la loi. Mais c’est sans compter avec la détermination d’une classe politique, dont la majorité des composantes n’attendent que la signature effective du décret présidentiel pour sortir de leur réserve? En clair, ils menacent d’ester en justice.
A. Kéita