Le Président de la République, Amadou Toumani Touré, a remis hier à Koulouba au Premier ministre Cissé Mariam Kaïdama Sidibé une lettre de mission. L’analyse de Diarra Diakité, Chargé de mission à la Cellule de Communication de la Présidence de la République.
Hier matin, à Koulouba, on n’a pas eu besoin de faire circuler une liste de présence pour s’assurer que tous les membres du Gouvernement présents à Bamako avaient répondu à l’invitation du Président de la République. Un simple coup d’œil a suffi pour en avoir le cœur net. Tous, à commencer par le premier d’entre eux, Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé, avaient, très tôt, pris place au Salon Mali du Palais de Koulouba.
L’événement, d’importance, qui s’est même payé le luxe de bousculer légèrement le Conseil hebdomadaire des Ministres, consistait, pour le Chef de l’Etat, à remettre à Mme le Premier Ministre une lettre de mission. Ses différents prédécesseurs ont été soumis au même rituel.
Cet instrument de navigation indispensable à la conduite de l’action gouvernementale est apparu en 2002 dans notre gouvernance sous l’appellation de Lettre de Cadrage. En fonction du timing politique, il a pu s’appeler aussi Lettre de mission.
ATT : il ne faut pas désespérer du Mali
Mais quelle que soit la richesse de notre lexique politique, Lettre de Cadrage, Lettre de mission, Feuille de route… renvoient à une et une seule notion, celle de Tableau de bord. Qui, dans l’action et dans le temps, détermine les objectifs à atteindre, les résultats à réaliser, les activités à mener pour ce faire, les critères et indicateurs de performance qui renseignent sur le niveau et la qualité de l’action, les différentes sources de vérification qui attestent la sincérité de cette action… en veillant, au maximum, à maintenir ce que les formateurs désignent par le vocable barbare de " congruence ".
A priori, on n’est pas loin des Douze Travaux de Hercule à réaliser en quatorze mois, mais dans la pratique, la qualité des hommes et des femmes qui composent le Gouvernement permet largement d’être à la hauteur de la mission.
Le Président de la République s’est voulu confiant et optimiste, rappelant la parfaite symétrie entre la Transition – qu’il a pilotée avec le bonheur que l’on sait – et le temps qui nous sépare de la sortie. Amadou Toumani Touré s’est surtout employé à communiquer son enthousiasme à Mme le Premier Ministre et à son équipe gouvernementale. Il n’a pas économisé les formules du genre " Mme, vous êtes une personne d’expérience ", " il ne faut pas désespérer du Mali " ou encore " nous sommes à la hauteur du défi ".
Défi, le mot est lâché!
Le Gouvernement, sous la houlette de Mme le Premier Ministre, devra réussir, en premier lieu, de conduire, avec succès, le défi des réformes politiques rendues nécessaires par vingt ans de pratique institutionnelle. Sur cette question, on ne part pas du néant ; en effet, le Ministre Daba Diawara et son équipe du Comité d’Appui aux Réformes Institutionnelles (CARI) ont fait un travail de fourmi et mis à disposition du matériau de qualité.
Autre défi majeur, l’organisation des élections législatives et présidentielle en 2012. Le Chef de l’Etat a engagé le Premier Ministre et le Gouvernement à ne ménager aucun effort pour organiser des élections libres, transparentes et crédibles. Il a dit ne pas comprendre tout le tintamarre qui a cours en ce moment au sujet de la liste électorale. Peut-être, a-t-il laissé entendre, certains acteurs du jeu politique tireraient-ils quelque dividende à jouer à se faire peur et à semer la confusion et le doute dans l’esprit de nos concitoyens.
Sur un ton pédagogique, le Président Touré a fait sien un proverbe chinois qui conseille : au lieu de maudire l’obscurité, il faut allumer une bougie.
ATT entend être l’homme des élections propres. Il l’a clairement fait savoir dans sa Lettre de mission en ces termes : … aucune place ne doit être faite à l’improvisation.
Dans la Lettre de mission, le Président Touré revendique sa proximité avec le peuple dont il comprend les préoccupations face au renchérissement du coût de certains produits de première nécessité. Aussi, a-t-il demandé à Mme le Premier Ministre de travailler d’arrache-pied à rendre disponibles les produits de grande consommation à un coût supportable par la bourse du Malien moyen. Au passage, il a rappelé les efforts de l’Etat qui subventionne, à coups de milliards de nos francs, nombre de services et biens dans l’unique but de soulager les souffrances de nos concitoyens. Les cas de subvention les plus connus à ce jour sont relatifs notamment à la fourniture des produits pétroliers, de l’eau et de l’électricité.
Plus qu’une simple ébullition, le front social est entré en éruption depuis plusieurs semaines. La situation a de quoi inquiéter, constate le Chef de l’Etat. Tout en reconnaissant la justesse du combat des travailleurs, le Chef de l’Etat se démarque de certaines modalités de revendications qui conduisent aux grèves illimitées. ATT a conseillé au Premier Ministre d’être à l’écoute du corps social et d’œuvrer du mieux qu’il peut à sauvegarder la paix et la quiétude. Le Chef de l’Etat lui a aussi conseillé de prendre ses distances vis-à-vis de la démagogie, en ne promettant que ce que l’Etat peut offrir. En revanche, le Président Touré a fermement instruit au Chef du Gouvernement de respecter scrupuleusement tous les engagements pris et ceux à venir.
Le Chef de l’Etat a poursuivi sur sa lancée en attirant l’attention du Premier Ministre sur d’autres préoccupations non moins importantes de l’heure, à savoir le banditisme dans nos grandes villes, l’insécurité au Nord, l’école et l’emploi. Sur ce dernier sujet, le Président Touré a évoqué avec beaucoup d’enthousiasme le Projet US-AID qui adresse l’auto-emploi en faveur des jeunes ruraux.
En définitive, on retient de l’exposé du Chef de l’Etat et de l’analyse de contenu de la Lettre de mission adressée au Premier Ministre qu’il n’y a pas péril en la demeure. Mieux, le Mali est un pays débout qui a foi en son avenir.
Diarra Diakité
Chargé de mission à la Présidence de la République