Le dimanche 28 juillet a incontestablement été le sacre de Diango CISSOKO, le Premier ministre de la Transition : contrairement aux mauvaises augures, dont certaines institutionnelles et partisanes, le peuple malien a non seulement voté dans la discipline et le calme, mais surtout est sorti massivement pour exercer son droit, mais comme pour accomplir son devoir.
La tenue du scrutin, sans contestation, et le niveau record du taux de participation : deux piliers qu’aucun processus électoral engagé n’a encore réussi dans ce pays depuis l’avènement de la démocratie ! Les partenaires et les observateurs de la scène nationale sont unanimes que cette dynamique est à inscrire à l’actif d’un Chef de Gouvernement dont le leitmotiv et la neutralité sont illustrés par son absence de calendrier personnel. Et jusqu’au dernier jour, après qu’il se soit acquitté de son devoir de citoyen, le Premier ministre a continué de lancer un appel au peuple malien l’incitant à sortir massivement pour voter!
Dès son avènement en décembre 2012, le nouveau chef du gouvernement n’a pas caché qu’il n’avait qu’un objectif : transmettre le pouvoir à des autorités légales disposant de la légitimité populaire dans un pays apaisé et uni ! Pour qui sait d’où venait le Mali, même sans la parenthèse de Konna, le 10 janvier 2013, cette noble intention relevait de la chimère. Mais depuis, le 28 juillet est passé par là, faisant réviser du coup bien des affirmations autrement péremptoires parce que visiblement quelque peu hâtives.
Dire que l’irruption, voire l’interruption par le pronunciamiento du 22 mars a consacré une profonde fêlure serait une litote. L’avènement de cette ère d’incertitudes a passablement effiloché le tissu de la confiance nationale, déjà durablement éprouvée par l’avancée de la rébellion dans le septentrion.
Relevé un pays… grabataire
Mais le mal insidieux a résidé dans la profonde division du peuple, avec deux tiers du territoire soustraits du giron national et une laborieuse remise en état d’institutions laminées, à l’image du pugilat national, commencé déjà à Ouagadougou.
Les acteurs nationaux n’ont ramené de la capitale burkinabé qu’un consensus a minima, signe avant-coureur d’une première phase de la Transition semée d’embuscades et d’escarmouches dont le couronnement sera la tentative de meurtre du Président intérimaire. La désacralisation du pouvoir présidentiel, presqu’un parricide à l’échelle de l’Etat lui-même, ne fera pas que des malheureux, confinant du coup la tenue du gouvernail à une entreprise aux méthodes douteuses, en tout cas peu soucieuse comme d’une guigne d’une hypothétique unité nationale. Car, le massif astrophysicien Cheick Modibo DIARRA, la perle rare de cette période trouble, s’illustrera plutôt particulièrement par la délicatesse d’un éléphant dans un magasin de porcelaine.
Après la sortie manu militari de Cheick Modibo Diarra, Diango Cissoko va hériter d’un pays exsangue, en mal de repères et particulièrement fauché côté ”bourse”. Le challenge était de composer dans la diversité quelque peu pléthorique. Un tour de force que réussira le Médiateur de la République, déjà en scène publique pour restaurer l’apaisement entre ces différents acteurs aux intérêts quasi-irréconciliables.
Délicat passage de témoin
En le désignant à la Primature le 11 décembre 2012, le Président intérimaire, dont les choix étaient assez réduits, n’a pourtant pas fait un cadeau à Diango Cissoko. Car il fallait relever le pays…
Conduire dans ces conditions, politiques et sécuritaires, le pays vers une transmission apaisé du pouvoir aux nouvelles autorités prenait des allures de vœux pieux. Mais en réalité, le véritable challenge de la Transition n’était pas seulement le recouvrement de l’intégrité du territoire national, même si l’orgueil national avait durablement pris un coup.
Mais la cohérence nécessaire devait être d’abord inscrite dans une Feuille de Route, dont les engagements seront consacrés comme une DPG solennelle devant les élus de la Nation. Un exercice qui a permis de fixer les délais desquels, malgré toutes les oppositions et parfois les coups de canifs internes, le Chef du Gouvernement ne s’écartera jamais. L’impulsion et la conduite à terme d’un processus électoral constituait le dernier verrou à sauter pour renouer avec la ”normalité”. Quelque chose qui ne ressort pas du hasard à la lumière des conseils de cabinet hebdomadaires consacrés durant quatre mois uniquement aux questions électorales.
Il fallait y croire et visiblement, le Premier ministre y croyait dur comme fer depuis le début… Pour passer sans anicroches, après le 11 août prochain, le témoin à d’autres !
Jean- Baptiste SATONO*
Journaliste indépendant