De syndicaliste à ministre, il y avait autrefois un grand pas, car les hommes avaient une conviction profonde. Au Mali, cela ne s’était pas produit depuis le début des années 1980, c’est pourquoi le peuple a sursauté à l’annonce de la nomination du charismatique Maouloud Ben Kattra, secrétaire général adjoint de l’UNTM, en qualité de ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle. Qu’aura-t-il encore à enseigner à la jeune génération dont certains le voyaient comme un exemple.
Une page de l’histoire du syndicalisme vient cependant d’être tournée. En faisant intégrer Maouloud Ben Kattra au nouveau gouvernement, c’est toute la philosophie du syndicalisme qui vient d’être bafoué par un seul homme aux ambitions démesurées.
Très jeune, Ben Kattra avait fait du syndicalisme son cheval de bataille. Présent sur tous les fronts avec un bagout hors du commun, l’homme a gagné la confiance des siens au fil du temps.
De secrétaire général du Syndicat national de l’éducation et de la culture (Snec), il s’est retrouvé adjoint de Katilé, le patron de la première centrale syndicale malienne. Ce dernier avait comme seul crédo les missions. Ses missions intempestives ont permis à M. Kattra de se faire une notoriété auprès du président Ibrahim Boubacar Kéita. Il a profité de cela pour jeter le froc du syndicalisme aux orties. Comme exemple illustratif, le Snec s’est désolidarisé de la grève des enseignants. Est-ce la récompense de cet acte qui est loin de la morale ?
On ne saurait le dire, mais une seule chose demeure, l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), à travers un communiqué laconique, en tentant des explications, a enfoncé davantage le syndicaliste devenu ministre : “L’UNTM félicite son ancien secrétaire général adjoint et lui souhaite plein succès dans la mission que le président lui a confiée indépendamment de toute affiliation syndicale au Snec comme à l’UNTM dont les avis n’ont pas été du reste demandés…”
A travers ce communiqué, on sent l’anguille sous roche. De source proche du dossier, Maouloud Ben Kattra était en négociation avancée avec le gouvernement à l’insu de la centrale et du Snec. Autre paradoxe : Ben Kattra ne manquait pas d’occasion pour fustiger le comportement du gouvernement bien qu’étant un militant fieffé du parti du pouvoir, le RPM (il milite dans la sous-section de Djélibougou).
Bandiougou Bidia Doucouré le premier
Aujourd’hui, la pyramide est juste renversée et l’on est curieux de savoir comme l’homme arrivera à regarder ses anciens camarades les yeux dans les yeux. Connu pour ses tapages, Maouloud est aujourd’hui piégé par le président de la République. L’on se rappelle comme si c’était hier de ses sorties médiatiques.
En 2015, lorsque le gouvernement avait annoncé l’ouverture des classes à Kidal, c’est un secrétaire général en son temps très remonté qui avait déclaré dans les colonnes de nos confrères du Prétoire que “les enseignants sont Maliens, Kidal l’est aussi. Donc, il faut que l’administration soit préalablement déployée à Kidal avant d’envoyer les enseignants. Et tant que l’armée, la gendarmerie, la police, l’administration publique, bref, les structures de souveraineté nationale ne seront pas à Kidal, les enseignants n’iront pas. Dans ces conditions, cette rentrée se fera sans nous les enseignants”, a-t-il pesté.
Pour lui, cette réouverture des classes par anticipation avait une explication politique. A travers cet acte, précisait Ben Kattra, les autorités maliennes voulaient faire croire à la communauté internationale que la paix est de retour au Nord, singulièrement à Kidal alors qu’il n’en est rien. “Dans ces conditions, ajoutait-il, nous ne pouvons pas envoyer nos militants à Kidal”.
D’aucuns diront que Ben n’a pas été le premier syndicaliste à accepter un poste dans un gouvernement. Bandiougou Bidia Doucouré, secrétaire général adjoint de Bakary Karembé avait été appelé pour devenir ministre de Tutelle des sociétés et entreprises d’Etat sous Moussa Traoré. La suite est connue. Il a été chassé par la centrale syndicale et il n’a fait qu’un passage très éphémère dans le gouvernement.
Pour le cas présent, un ancien syndicaliste confirme que la nomination de Ben Kattra n’a rien de surprenant. “Ce n’est que la récompense de ses loyaux services dans la tentative de boycott des différents mouvements de grève depuis quelque temps”.
D. K.
“Ajouter la confusion à la confusion!” Comment un secrétaire général adjoint a-t-il pu militer au sein d’un parti politique au su et au vu de ses camardes syndicalistes ?!
Judas Iscario, lui a eu le courage de se pendre. Si l’UNTM n’est pas complice, elle se doit de réclamer le retour des quatre deniers: la démission !
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