Le Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, sous le coup de l’émotion de la victoire, sa victoire, à la présidentielle du 11 août dernier, est-il subitement devenu hagard, au point de nous sortir un Gouvernement à la limite ringarde ? Ou est-ce plutôt un mauvais casting de la part d’un Premier ministre déconnecté des réalités maliennes ? L’un dans l’autre, un seul constat se dresse : les Maliens, ceux-là même qui ont massivement voté pour Ibk, éprouvent aujourd’hui un sentiment de goût inachevé !
En effet, le seul élément fédérateur qui a amené des millions d’électeurs maliens à voter IBK est le changement. Changement dans la gestion des affaires de l’État, changement dans le choix des personnes chargées de cette gestion. Changement dans les critères de ce choix. Or, ce qu’ils voient aujourd’hui, c’est un gouvernement partisan auréolé d’une certaine dose compensatoire pour des individus qui n’ont rien apporté à la victoire d’Ibk que leurs seules voix. Encore que cela reste à vérifier !
Certes, les maliens ont bien accueilli la nomination de Oumar Tatam Ly en qualité de Premier ministre, mais l’espoir a vite fait de laisser place à la désillusion avec la publication de la liste des membres du gouvernement. Un Gouvernement qui ne dérange pas que par le nombre des portefeuilles seulement. Et pour cause: on identifie au moins près d’une dizaine de cadres Rpm, le parti d’Ibk, 11 selon la Radio France Internationale (Rfi).
Encore que ça pouvait passer, si lon tient compte du fait qu’on n’est dans une situation où il n’existe pas une Assemblée Nationale normalement constituée, seul baromètre permettant de jauger les forces politiques en présence et de déterminer les rapports de forces. Mais qu’on fasse appel aux vieux et aux vieilles de la vieille, dont certains sont responsables de tous les malheurs des domaines pour lesquels ils sont appelés de nouveau, il y a vraiment de quoi donner du tournis à ces millions de Maliens qui ont, par souci de changement, voté IBK.
UNE VOLONTÉ DE STABILISATION
Certains partis, qui n’ont en vérité rien fait pour la victoire du Président de la République, se voient gratifier de postes ministériels, alors que d’autres, plus présents, plus représentés, et ayant fait de meilleurs scores au premier tout de la présidentielle, n’ont même pas été consultés à propos de la formation du gouvernement, malgré leurs appels à voter IBK. Il y en a même qui ne peuvent se prévaloir de rien d’autre, à part leur seule personne, qui se voient gratifier des portefeuilles ministériels ! Comment ne pas penser alors à un partage de gâteau savamment orchestré ? Comment échapper à la tentation de conclure à la “partisation” du pouvoir ? Les Maliens s’interrogent !
Néanmoins, le Président IBK et son Premier ministre doivent avoir des raisons bien plus motivées les ayant conduits au choix de ces hommes et de ces femmes chargés de les aider à relever les défis d’un Mali nouveau.
En effet, selon nos informations, le nouveau président a voulu jouer la carte de la stabilisation et s’est donc réservé de ne point procéder à une rupture totale en écartant tous les anciens. Un argument à considérer, même si l’on peut rétorquer qu’il faudrait tôt ou tard aller à cette rupture si IBK veut répondre positivement aux souhaits des Maiens.
A la lumière de cet argument, on peut accorder à l’équipe Tatam Ly le bénéfice du doute. C’est désormais à elle de s’élever à la hauteur de la grande confiance placée en elle et de savoir dissiper, par ses faits et gestes de tous les jours, par ses actions, les doutes et appréhensions légitimes des Maliens. C’est dire qu’elle est astreinte à une obligation de résultats. S’appréhender toute de suite et maintenant serait la moitié du chemin parcouru par elle. Car que nul ne s’y trompe, ni elle, ni le Président IBK n’auront aucune période de grâce. Autrement dit, la recréation est bien terminée !
Adama S. DIALLO