Le 12 juin dernier, le président du CNID, Me Mountaga Tall, était reçu à sa demande en audience par le président de la République, Amadou Toumani Touré, au palais de Koulouba. L’entretien qui a duré une quinzaine de minutes, a porté essentiellement sur la situation de N’Diaye Bah, actuel ministre de l’Artisanat et du Tourisme, après sa démission du parti qu’il est censé représenter au gouvernement depuis huit ans.
Pour Me Mountaga Tall, qui était accompagné de certains membres du Comité directeur du CNID, les choses sont claires. A partir du moment où N’Diaye Bah a démissionné du CNID, il ne le représente plus au gouvernement. En voie de conséquence, le président de la République doit l’en sortir et offrir au CNID la possibilité de désigner son remplaçant, s’il inscrit toujours ses choix dans le cadre de l’alliance politique qui l’a porté au pouvoir en 2007.
Pour rappel, la sortie de N’Diaye Bah du gouvernement avait déjà fait l’objet d’un débat houleux au sein de cette formation politique et la majorité des membres du Comité directeur, lson organe dirigeant, avait estimé, alors, que N’Diaye Bah devait céder le strapontin à quelqu’un d’autre au nom de l’équité au sein du parti et pour insuffler une dynamique nouvelle à la participation du CNID à la gouvernance malienne. Selon certaines indiscrétions, c’est bien Me Tall qui s’était opposé à cette défenestration de N’Diaye Bah pour deux raisons fondamentales.
La première est qu’ "il fallait laisser le soin au président ATT d’apprécier le travail accompli par le ministre N’Diaye Bah au sein de l’équipe gouvernementale durant les cinq premières années où ils ont eu à travailler ensemble ".
La seconde raison avait trait au calendrier du ministère de l’Artisanat et du Tourisme que dirige N’Diaye Bah. En effet, celui-ci prévoyait d’importantes activités, notamment le Salon International du Tourisme que le Mali devait abriter pour une première fois. Le moment était donc particulièrement mal choisi pour changer le titulaire du département. C’est ainsi que le président du CNID est arrivé à convaincre ses camarades du Comité directeur du maintien du nom de N’Diaye Bah sur la liste que le parti avait envoyée au président ATT, à la demande de celui-là, pour la formation d’un nouveau gouvernement, suite à sa réélection en 2007.
Toujours selon les mêmes indiscrétions, le président ATT avait beaucoup apprécié l’attitude de Me Tall qui venait de faire preuve ainsi, selon lui, "d’un sens profond de la responsabilité et du discernement".
Le même Me Tall, intervenant, deux ans et demi plus tard, auprès du même ATT pour lui suggérer de tirer la juste conséquence de la démission du même N’Diaye Bah du parti qui l’a placé huit ans d’affilée au gouvernement, quel doit être son comportement ? Donner suite naturellement. Ce faisant, il inscrirait son action dans une dynamique de moralisation de la vie politique souhaitée par l’opinion nationale.
L’avant-projet Daba Diawara sur les reformes constitutionnelles et institutionnelles ne prévoit-il pas, au demeurant, une sanction d’inéligibilité sur une certaine période pour les élus qui changent d’étiquette au gré de leurs intérêts du moment. Rien ne diffère N’Diaye Bah de ces élus farfelus et inconstants. Il quitte le CNID non pas parce qu’il se sent des capacités à mieux faire que Me Tall, mais tout simplement parce qu’il a atteint la limite de sa longévité ministérielle au nom et pour le compte du CNID. Alors il migre vers des horizons plus prometteurs.
En maintenant N’Diaye Bah au gouvernement, contre la volonté de ceux qui l’y ont mis, ATT rendrait un mauvais service à la démocratie malienne et laisserait une image lamentable à la postérité.
Alassane DIARRA