Le jeudi dernier, toute la nation malienne avait les yeux rivés sur le stade de 26 mars. Et pour cause, le Mali venait de virer à un autre tournant de son histoire. Le Mali venait regagner sa démocratie de lustre perdue par un coup d’Etat militaire. Après une crise sans précédant, le peuple malien a décidé d’accompagner les dirigeants de la transition à restaurer la démocratie en élisant un nouveau président dans la quiétude.
Sur une trentaine de chefs d’Etats invités pour l’occasion, vingt ont répondu présents avec tous leurs staffs. Une fête qui était à la hauteur de l’événement leur a été destinée. Du matin au soir, que des messages de remerciement, de gratitudes et de fierté d’une mission quasiment impossible accomplie ont été des sujets phares des discours des présidents s’adressant à qui tout l’honneur du seigneur venait de s’exprimer. Après une fête grandiose, le président de la République a rappelé les grandes lignes de son programme sur la chaine nationale de télé. Comme une personne affamée de rétablir l’ordre, le roi du Mandé vient de mettre en grade pour certains actes d’incivisme. Parmi ces mises en garde, trois grands axes ont attiré notre attention : la justice, l’éducation et la lutte contre la corruption. En vérité, ces problèmes constituent une véritable plaie des pays africains. Et la plaie malienne est déjà très infectée. Il lui faudra des spécialistes pour la fermer car l’odeur est pestilentielle.
Du pain sur la planche !
Si la réconciliation nationale et la consolidation l’intégrité territoriale est plus visible parmi les tâches prioritaires du nouveau locataire de Koulouba, ces trois points sont aussi considérés comme un coupe-sommeil du maître du Mandé. Il a été clair. Plus de sorties intempestives des élèves et étudiants. Plus de notes de complaisance, plus de truquage des résultats des examens pour accéder au niveau supérieur ou décrocher un diplôme. Une grande tâche qui l’attend, car depuis plus de deux décennies, le malien ne crache plus sur l’argent de la corruption. Chaque père ou mère de famille ne se soucie plus des valeurs éducatives de son enfant. L’important, c’est qu’il ait un salaire à la fin du mois. Pour cela, ils sont prêts à débourser des millions pour assurer « un avenir meilleur » pour leurs progénitures, au détriment du pays.
Le constat est amer. Dans nos grandes institutions nationales, certaines nouvelles recrues ne parviennent pas à remplir de simples formulaires, à plus forte raison s’acquitter des autres tâches que leur département leur assigne. Ils ne peuvent pas, car le niveau requis leur manque. Les recrutements arbitraires, les marchés gré à gré et le détournement foncier feront sans nul doute le nerf de guerre pour Oumar Tamtam Ly et son équipe. Une équipe qui n’est pourtant pas blanche comme neige. Une chose est sûre, l’ardeur avec laquelle le maître du Mandé a promis de commencer ce travail, il fera son chemin sans plusieurs membres de son équipage, que ce soient certains Directeurs Généraux ou patrons de Département ministériel. Concernant l’épineux sujet de détournement foncier, IBK aura besoin de rares personnes qui se soucient de l’intérêt public. Cet intérêt dont le malien, bien qu’intellectuel a piétiné au profit de sa poche. La preuve, plus d’un millier de maliens moyens ont voté IBK dans l’espoir de récupérer leur lopin de terre qui leur ont été arraché par des gens sans scrupule ni état d’âme. L’incivisme est de pair avec tous ce que le malien fait à cause de la démystification de l’autorité de l’Etat depuis vingt ans. Aucune faute n’est punie dans les lieux publics. Le fonctionnaire est de marbre pour le contenu des notes circulaires. Et gare aux rares patriotes qui font bien leur travail. Ils sont tout de suite boudés et traités de tous les noms d’oiseau. Plus tard, le chef du département fera tout pour se débarrasser d’eux. Pire, ces derniers auront collé sur leur dos, tous les péchés d’Israël pour avoir été catholiques dans le temple des imposteurs. Pour pallier ce problème, IBK doit être rusé. S’il l’est, il doit redoubler d’attention et changer de stratégie de lutte contre la corruption. Car l’ancienne méthode est erronée. Le voleur a toujours une méthode pour contrer le policier, dit-on. Un vieil agent de police lui conseille : « Qu’il engage des agents de contrôle anonymes. Des journalistes peu connus des policiers nouvellement recrutés et des détectives privés qui rodent dans les services publics comme des hôpitaux et des ministères ». Ainsi ils feront un rapport à la fin de chaque mois. Signalons-le, ces agents doivent être bien payés pour les mettre à l’abri de tout besoin. Un vieux policier à la retraite affirme à cet effet :
« Une partie de l’argent que l’Etat est en train de perdre dans cette histoire de corruption peut payer ces agents. Cependant, en même temps, les messages de sensibilisation sur la bonne gouvernance doit être le quotidien des maliens. Voilà mon conseil à mon jeune frère à qui je souhaite plein de succès », a-t-il dit. Une chose est sûre, la plupart des amis d’IBK se transformeront en ennemi, si toutefois il tient sa promesse à l’égard de son peuple qui est tant meurtri par les inégalités sociales causées par ses fils. Pourtant, il jure de tenir promesse comme le dit un adage Bambara : « On ne peut remplir sa bouche de couscous sec, sans pour autant être rassuré d’avoir la salive suffisante pour le mouiller ». Wait and see !
Chrystelle