Lorsqu’un membre du Gouvernement devient le fusible d’un autre, cela peut inquiéter sur le bon fonctionnement de l’institution.
Un Premier ministre est toujours un fusible ". Cette phrase célèbre écrite dans le Nouvel Observateur en 1988 retrace la vérité constitutionnelle française selon laquelle c’est le Chef du Gouvernement qui " saute " (comme un fusible pour protéger dans ce cas le président de la République) lorsque la gouvernance est décriée.
Dans l’actualité politique nationale de ces derniers mois, le ministre délégué auprès du Premier ministre chargé du Budget, Lassine Bouaré, est constamment en position de fusible de son homologue de l’Economie et des Finances, Sanoussi Touré. Ces deux hommes, faut-il le rappeler, sont réputés très proches du Premier ministre Modibo Sidibé. Seulement, il semble que le ministre Touré a bien de réticences à assumer ses responsabilités surtout dans les contextes où il doit prendre la parole pour livrer des explications techniques dans le domaine économique ou financier.
Ainsi, lors de la récente conférence de presse du Gouvernement par rapport à la mise en œuvre des recommandations du Vérificateur général, Sanoussi Touré a à peine assisté à l’ouverture de la séance avant de fuir pour s’engouffrer dans son bureau. Or, la rencontre se tenait "chez lui ", c’est-à-dire dans les locaux de son ministère. Puisque le ministre Touré savait que son fusible, Lassine Bouaré était là pour défendre, comme il sait le faire, les points de vue du gouvernement par rapport aux questions économiques, il a, encore une fois, fui ses responsabilités à charge pour l’ancien Directeur général de l’INPS de les assumer. Celui-ci semble en effet mieux maîtriser les dossiers techniques au point qu’il est devenu un véritable appui ou un manteau pour Sanoussi Touré qui s’en sert à loisir. A cette première conférence de presse dans ses locaux flambants neufs, certains hommes des médias avaient pensé que le ministre Touré devrait mettre à profit cette rencontre pour davantage «communier avec le quatrième pouvoir». Ils ont été déçus, puisque le maître des lieux n’a même pas daigné revenir au présidium pour dire un mot d’au revoir aux représentants des médias
Lors de récentes séances de questions orales ou des séances d’écoutes à l’Assemblée nationale, certains députés adressent leurs questions au ministre de l’Economie et des Finances et finissent par constater que c’est le ministre Chargé du Budget que le Gouvernement leur envoie.
Récemment encore, pour répondre à certaines préoccupations relevant plus du domaine économique que commercial, alors que le ministre Sanoussi Touré était attendu, c’est le ministre Ahmadou Abdoulaye Diallo des industries, des investissements et du commerce qui s’est présenté pour donner des explications au peuple. C’est au point qu’on se demande pourquoi le ministre Touré se dérobe tant en comptant sur ses homologues. On se demande alors si le ministre Bouaré est devenu le porte-parole ou le fusible de Sanoussi Touré qui doit rectifier le tir.
Bruno D SEGBEDJI
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