Ou bien la sécurité nationale est toujours sérieusement menacée, dans ce cas point d’élection et l’état d’urgence est de rigueur légalement et légitimement. Ou bien l’élection est à l’ordre du jour parce que la menace sur la sécurité nationale est bel et bien vaincue, alors l’état d’urgence est immédiatement levé avec un élargissement effectif des libertés pour permettre aux candidats retenus de compétir à chances égales dans un climat social gai et apaisé.
L’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de l’ONU de 1966 régule au niveau du droit international l’état d’urgence. Il dispose en particulier que :
« Dans le cas où un danger public exceptionnel menace l’existence de la nation et est proclamé par un acte officiel, les États parties au présent Pacte peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l’exige, des mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu’elles n’entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou l’origine sociale. (…) »
A supposer que les situations exceptionnelles (en l’occurrence la guerre dans le cas du Mali) qui ont favorisé la proclamation de l’état d’urgence, sont toujours d’actualité, nul ne peut contester valablement sa prolongation par l’autorité compétente. Mais dans la même période, aucune décision ou action incompatible avec la situation exceptionnelle déclarée ne peut être prise ou réalisée quelles que soient les raisons invoquées, à moins de faire tomber tout l’argumentaire de départ. Autrement, cela a tout l’air d’une ruse de mauvais goût, d’une tromperie ou de l’autocratie caractérisée contre lesquelles les citoyens doivent résister pour faire rétablir la situation de normalité. C’est comme qui dirait : « Il est formellement interdit d’entrer dans cet immeuble même pour trouver à manger, car il menace de s’écrouler. Mais il est permis d’y entrer pour danser ».
Dans le cas de l’Etat d’urgence « version Dion-Dian », les maliens sont confrontés à tous ces travers en même temps.
En effet, pour masquer une gestion calamiteuse, le duo infernal DION-DIAN déroule son programme diabolique qui risque de plonger le Mali dans une crise profonde et violente autrement plus grave que celle en cours, parce que mettant aux prises les filles et fils du Mali. Rien ne justifie cet entêtement qui se fonde sur le déni de la réalité et l’empressement bien calculé de passer la main en espérant bénéficier d’une hypothétique immunité en toute impunité, pour « bons et loyaux services » rendus au Mali pendant une Transition menée à terme. Mais c’est sans compter avec la vigilance du VEGAL qui vient d’élever la voix dans ce sens et de l’autorité judiciaire qui a décliné sa feuille de route d’une justice indépendante, équitable et irréprochable indiquée par le ministre de la Justice, Malick Coulibaly pendant l’atelier de réflexion tenu au Grand Hôtel le 04 avril 2013 et rappelé par le Procureur général Daniel Téssougué lors de la cérémonie de clôture de la première session de la Cour d’assises de Bamako. Ces prises de position salutaires font certainement suite aux nombreux scandales dont les journaux font leurs choux gras depuis quelques mois. Tout y passe. Des marchés gré à gré jusqu’aux détournements supposés des produits de l’effort de guerre, en passant par des détournements d’objectifs et le versement d’immenses pots de vin dans les cas d’entente directe, comme ce fut le cas dans la procédure d’octroi de la 3ème licence de téléphonie mobile globale. Des actes de mal gouvernance qui ont fini d’installer un profond malaise dans l’attelage gouvernemental, parce que l’argentier de l’Etat (le ministre des finances) fait dans la résistance en s’imposant une exigence de transparence et de cohérence des comptes de l’Etat, contre l’autoritarisme du Premier ministre intronisé bras armé du Pr Dioncounda et préposé aux sales boulots de la République. Le Président reste dans l’ombre et tire les ficelles tout en feignant tout ignorer d’un air amusé et surpris, comme il en a seul le secret. Aux journalistes qui cherchent à éclairer l’opinion sur ces questions sérieuses de gouvernance pour s’acquitter de leur devoir d’informer, on leur demande de circuler parce qu’il n’ya rien à voir. Election ou pas, cette Transition sera nécessairement auditée !
Non content de prolonger l’état d’urgence à l’infini pour tuer dans l’œuf toute velléité de contestation, le duo infernal annonce la tenue hypothétique de l’élection présidentielle en juillet pour neutraliser les partis politiques auxquels a été ainsi offert un réel centre d’intérêt qui détournera pour longtemps leur regard critique de la gouvernance calamiteuse en cours au sommet de l’Etat.
L’état d’urgence en plein régime, la présidentielle jouant le rôle de mirage, le duo DION-DIAN déroule son agenda infernal. Pendant ce temps, les scandales s’amoncellent au plein cœur de la République comme un tas d’ordures aux odeurs nauséabondes qui puent au point d’étouffer tout l’espace public. Du DUEL de statuquo Dioncounda-Modibo Diarra tétanisant, l’Etat est désormais dans les mains du DUO de complot Dioncounda-Diango euphorisant qui a fini de renseigner sur ses capacités prédatrices.
L’état d’urgence et l’élection présidentielle sont deux évènements à exclusion mutuelle. C’est l’un ou l’autre, jamais l’un et l’autre. C’est une bêtise manifeste de la part du duo Dion-Dian, car la démocratie ne saurait s’accommoder longtemps de la restriction exceptionnelle des libertés (état d’urgence) dans le contexte de l’élargissement absolu des mêmes libertés (élections).
Ou bien la sécurité nationale est toujours sérieusement menacée, dans ce cas point d’élection et l’état d’urgence est de rigueur légalement et légitimement.
Ou bien l’élection est à l’ordre du jour parce que la menace sur la sécurité nationale est bel et bien vaincue, alors l’état d’urgence est immédiatement levé avec un élargissement effectif des libertés pour permettre aux candidats retenus de compétir à chances égales dans un climat social gai et apaisé. Toute autre tentative de prolongation de l’état d’urgence serait une violation manifeste des libertés d’expression et d’association qui tombe sous le coup de l’illégalité et doit être combattue par tous les citoyens épris de liberté et de justice, parce que cet état d’urgence est nul et non avenu.
Boniface Dembélé