Dans l’interview qu’il vient d’accorder au journal " Les Afriques", le président de la République ne s’est point fait prier pour renvoyer à leurs chères études tous ceux qui espèreraient pouvoir compter sur son soutien, lors de l’élection présidentielle de 2012. En déclarant, sans ambages, qu’il ne soutiendra aucun candidat, ATT a voulu dire, par-là également, qu’il n’a pas de dauphin. Alors que tout le monde pensait, à tort ou à raison, qu’il allait servir de tremplin et de poussoir à son Premier ministre Modibo Sidibé, dans l’ascension du palais de Koulouba dans quatorze petits mois. C’est dire, désormais, que le sort en est jeté pour l’enfant du Wassoulou. A lui de démontrer, qu’avec ou sans l’appui d’ATT, il est capable de rebondir et de se forger un destin présidentiel. Si tant est que cet homme discret, impénétrable mais réputé fort travailleur et fidèle nourrit une telle ambition.
Les observateurs se demandent toujours pourquoi cette sortie médiatique du président de la République, et pourquoi maintenant ? Et on a rarement vu ATT aussi prolixe et aussi direct dans ses réponses surtout quand celles-ci ont trait à sa succession. Le fait qu’il sorte de sa réserve et assène un coup de massue à tous ceux qui s’attendaient à un coup de piston, de sa part, pour se positionner dans le starting-block de la présidentielle de 2012, est une réelle surprise en ces temps où certains avaient même rédigé une pétition en vue du prolongement de son mandat.
En disant, tout de go, qu’il " ne soutiendra aucun candidat " et qu’il se " contentera de tout faire pour organiser des élections libres, transparentes et crédibles ", le président ATT a planté le couteau – sans le savoir peut-être mais cela est fort probable – au cœur de tous ces éventuels candidats qui nourrissaient le doux rêve d’avoir les faveurs du Prince. Parmi ceux-ci, l’opinion pense tout d’abord au Premier ministre Modibo Sidibé, que la rumeur avait déjà fait passer comme le dauphin d’ATT. L’homme ayant, selon certains milieux proches de l’Adema, la bénédiction de l’ancien président Alpha Oumar Konaré, dont on le sait également très proche.
Si le président de l’Adema, Dioncounda Traoré, celui du RPM, Ibrahim Boubacar Kéïta et Soumaïla Cissé, le mentor de l’URD, tous candidats potentiels à la présidentielle de 2012, peuvent jubiler, tel est loin d’être le cas du Premier ministre Modibo Sidibé. En effet, si toutes les rumeurs sur ses ambitions présidentielles sont avérées, il n’en demeure pas moins que l’homme est loin d’être populaire et, circonstances aggravantes de son faible poids politique, il n’a aucune base ni aucun soutien politique d’envergure pour se lancer dans une éventuelle bataille à la présidentielle, sans le soutien d’un tribun, d’une personnalité politique de haute carrure à l’instar d’un ATT, par exemple. Même les clubs de soutien, qui avaient un moment commencé à se réclamer de lui, sont morts de leur belle mort.
C’est pourquoi, cette phrase assassine du président ATT à savoir qu’il " ne soutiendra aucun candidat ", largement relayée par la presse nationale et internationale n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. Elle est également loin d’être anodine. La phrase assassine d’ATT n’a pas été lancée pour être destinée aux opposants mais plutôt aux propres partisans du chef de l’Etat, qui pourrait y une façon de les larguer, sans parachute, à 1000 mètres du sol.
Après cette interview d’ATT, que va faire maintenant Modibo Sidibé, dont les ambitions présidentielles, sont claires et nettes comme de l’eau de roche ? Qui d’autre, à sa place, à dix petits doigts du pouvoir suprême, n’allait pas nourrir les mêmes ambitions présidentielles ? Après avoir été un grand commis de l’Etat, ayant servi avec efficacité mais surtout avec loyauté deux chefs d’Etat issus de l’ère démocratique, l’intéressé est en droit de penser, tout comme l’opinion même, que l’heure de Modibo Sidibé a sonné pour la montée à Koulouba. Il s’agit de savoir, si ce lâchage d’ATT va émousser ses ambitions ou au contraire, cela signifiera pour un défi à relever ? Afin de prouver qu’il est capable de se battre, sans l’appui de son patron, pour avoir le PDES autour de lui. Et pourquoi pas une bonne partie de l’Adema qui ne jure, depuis longtemps, que par l’enfant du Wassoulou.
C’est vrai que désormais l’homme aura beaucoup à faire. Car, il va falloir qu’il affûte ses armes pour faire face aux mastodontes de la scène politique à l’image de Soumaïla Cissé de l’URD, de Dioncounda Traoré de l’Adema et de Ibrahim Boubacar Kéïta du RPM, tous candidats potentiels à la présidentielle de 2012. C’est l’occasion, maintenant ou jamais, pour l’opinion de savoir qui est réellement Modibo Sidibé, et cela sans habits d’apparat.
Car, de son attitude et de ses ambitions qui, indubitablement, vont de plus en plus s’afficher beaucoup plus nettement, dépendra son séjour à la Primature et son destin politique. C’est dire que le remaniement ministériel va cesser, dans les jours à venir, d’être un sujet tabou. Pas pour l’opinion, qui est déjà fatiguée d’en parler, mais pour le président de la République lui-même. Modibo Sidibé, si ce qu’on lui prétend est avéré, quittera, dans ces conditions, la Primature pour se préparer afin de descendre sur l’arène politique. Dans la mesure où une élection présidentielle ne se gagne pas dans un bureau.
Mamadou FOFANA
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