Madame Cissé Mariam Kaïdama Sidibé, Premier Ministre et Chef du Gouvernement, après avoir fait le vendredi 24 juin, devant les 147 élus de la Nation, la lecture solennelle de la Déclaration de Politique Général (DPG) du Gouvernement devait la défendre lundi dernier. Un exercice qui n’a pas du tout été facile pour elle. Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette DPG n’a pas convaincu les élus du Sadi. Nous vous proposons en intégralité leur position à travers ce discours de l’Honorable Dr Oumar Mariko.
«En réaction à votre prédécesseur Modibo Sidibé, lors de la présentation de sa DPG le 17/12/2007, nous avons déclaré ce qui suit : Votre DPG enjambe élégamment les problèmes brûlants du Mali : école, santé, armée cherté de la vie, paupérisation des campagnes et des zones urbaines, expropriation des paysans de leurs champs au profit d’investisseurs étrangers, d’operateurs économiques indélicats, de bureaucrates nationaux, la hausse des intrants agricoles, pour se plonger dans un futur prospère, hypothétique. Pendant l’exercice de son mandat, nous avons assisté à l’aggravation de tous ces problèmes. C’est dans ce contexte que vous venez de nous faire entendre un discours qui vole encore plus bas.
Madame le Premier Ministre,
Devant les difficultés qui assaillent les maliens, il ne saurait être question pour nous, de donner dans la politique politicienne ferment de la démagogie pour voir en votre nomination la promotion de la femme. Il ne s’agit là à nos yeux d’une instrumentalisation du combat des femmes comme l’a été la nomination d’un Tamasheq à la tète du gouvernement sans qu’aucune mesure n’en sorte pour régler les problèmes du Nord ! Les déclarations actuelles de mes collègues en témoignent.
Au moment où vous prenez les commandes du gouvernement, nombreuses sont les femmes poussées par la misère, le dénuement qui, battent les pavés se livrant à la prostitution. Des femmes exclues dans la distribution des terres, des femmes dont les terres ont été expropriées sont légion dans notre pays.
Savez-vous Madame le Premier Ministre que des femmes de Sanamadougou, pressées de vous rencontrer ont été battues, arrêtées par des forces de sécurité pour avoir osé pacifiquement réclamer leur terre remise à un operateur économique indélicat soutenue par des autorités en charge de la gestion des terres de l’Office du Niger.
Deux mois avant la prise de votre fonction, un commando constitué de garde forestier, de garde et de gendarme ont débarqué à Kekoro dans le cercle de Bougouni brûlant les logements de fortune des orpailleurs traditionnels entraînant la mort d’une jeune dame de 26 ans et d’un enfant de 11 ans. Les dégâts matériels et financiers sont incalculables.
Votre déclaration est dépourvue de tout caractère social, une déclaration qui parle éloquemment d’infrastructure ne laissant aucune place au social, à l’humain.
Parlant de l’agriculture, comment voulez-vous promouvoir l’agriculture familiale lorsque 64% des agriculteurs ne possèdent que la daba comme outil de travail ? Comment parler de développement de l’agriculture lorsque 69% de paysans à l’Office du Niger n’ont pas plus de 4 Ha et que les intrants agricoles coûtent non seulement chers, mais aussi, se trouvent dans les mains de spéculateurs connus vivant de surfacturation et jouissant de l’impunité ? Les paysans continuent à être expulsés de leur terre.
Madame le Premier Ministre,
Vous parlez du développement de la qualité des soins au moment où le service de néphrologie du POINT G est obligé d’hypodialiser ses malades par manque de machine ; la cardiologie n’a ni salle de réanimation ni d’écho-cardiaque, ni de tapis adéquat pour les tests d’effort. Des professeurs et assistants spécialisés sont contraints à travailler comme des médecins généralistes par manque d’instruments adéquats.
La gratuité de la césarienne est une initiative heureuse, mais dans la situation actuelle, elle ne bénéficie pas à celles qui ont le plus besoin. En effet, les femmes dans les villages n’arrivent pas à faire des consultations prénatales et sont transportées en cas de besoin, en charrette, à moto pour rejoindre les centres de référence où les hôpitaux. Lorsque des complications surgissent, elles doivent faire face aux imprévus qui pourraient coûter très cher. L’Etat doit donc plus s’engager à prendre en charge le personnel de santé de qualité au niveau des CSCOM ou les structures les plus proches de la grande majorité des maliennes dans ce domaine.
Depuis la nuit des temps démocratiques, il a été question du respect de l’environnement en faisant focus sur les sites miniers. Mais hélas, les sociétés minières continuent, sans faire la moindre attention à vos discours polluant les nappes phréatiques. Entre temps, on oublie la pollution à Bamako. Avec le prix incontrôlé des services des Spiros de 25.000 à 75.000 f ou de 17500 à 30.000f, les citoyens eux-mêmes finissent par polluer en déversant des détritus humains dans les canaux exposant les uns et les autres à la maladie.
Ecole
L’insécurité dans l’espace scolaire est complètement ignorée. Votre silence traduit votre complicité à protéger les étudiants qui font usage des armes blanches et des armes à feux contre leurs camarades sous l’œil également complice de vos agents de securité. Que d’étudiants tués ou blessés depuis l’affaire «PAPOU».
Les inégalités continuent dans le recrutement, sinon pourquoi deux fonctions publiques pour les enseignants ? Le principe de diplôme égal -salaire égal n’est pas de saison. Des enseignants de la fonction publique des collectivités pauvres et démunis face à ceux de l’Etat, traduit de l’injustice qui dévalue la formation des enfants des milieux ruraux déjà confrontés au manque d’enseignants et de salles de classe, cela me semble inacceptable. Votre politique casse les infrastructures économiques, les bradent ; elle ne peut alors donner de l’emploi aux jeunes que vous maintenez dans l’illusion d’emplois précaires.
Lorsque vous parlez de la lutte contre la corruption, vous évoquez le respect de l’honneur et de la dignité de la personne humaine ! Mais, de la dignité de qui ? Du délinquant ou du peuple victime ? Cette duplicité dans le langage se concrétise par votre manque de volonté à sévir contre la corruption. Il est reconnu que le service de justice manque cruellement de frais de fonctionnement. Des bâtiments vides de matériels, des juges corrompus exposant les citoyens au rançonnement sans défense !
Les rapports du vérificateur sur l’affaire de l’HUICOMA dorment dans vos tiroirs. Vous reconnaissez l’injustice faites aux partants volontaires, mais vous refusez toute réparation, vous abandonnez les travailleurs de la BETRAM aux mains d’un operateur indélicat qui viole les cahiers de charge, les droits des ouvriers de MORILA-Sa sont passés aux oubliettes, ces ouvriers végètent dans la misère du déni de justice, les paysans de Sanamadougou de Siranikoro et que dire encore ?
Les Maliens de l’extérieur des zones de guerre (RCI, Libye) sont abandonnés à leur sort, ceux sans papiers ou en France continuent d’être ignorés. Vos services administratifs les rançonnements, vos banques aussi ! Vous pouvez pendre des dispositions pour cela s’arrête. Promettez-le, s’il vous plait!
Les prix des denrées de premières nécessités montent, ceux des transports urbains également. Vous comprenez par là et en partie que votre programme de développement économique et sociale est vraiment asociale et manque d’ambition pour élever le niveau de vie du malien !
Vous reconnaissez que les élections passées n’ont pas été transparentes. Je dois vous dire que le taux bas de participation aux élections est beaucoup moins le faite des partis politiques que celui de l’administration qui par le jeu d’opacité et d’empêchement des citoyens à se reconnaitre dans les résultats perdent crédit aux élections ce qui est dangereux et vous interpelle.
Ne cassez pas notre pays avec vos élections truquées, la corruption dans tous les secteurs y compris dans les recrutements dans la fonction publique, l’armée et la sécurité. Des handicapés physiques sont recrutés dans la police et même dans l’armée. Que faites-vous pour les militaires blessés lors des combats et pour les parents de ceux qui tombent sur le champ de l’honneur ? Arrêtez de les ignorer. Comment pouvez accepter l’incursion de l’armée mauritanienne dans la bande de Ouagadou ?
Ceux qui se battent contre l’AMO n’ont pas besoin d’information, ils le sont déjà ! Vous avez dit que l’AMO ne sera pas obligatoire, alors faites parvenir à l’Assemblée Nationale un projet de loi portant des modifications après concertation des syndicalistes en grèves. Nous l’examinerons même si nous avons votés la loi sans concertation du peuple.
Votre diplomatie est aphone, inaudible fasse au mauvais traitement que les maliens subissent à l’étranger lorsque vous faites bouger toute la nation pour un touriste euro-américain égaré dans le désert vous abandonnez vos citoyens enchainés et jetés dans les avions qui atterrissent au Mali sans argent ni bagages alors qu’ils y on fait fortune.
La Libye ploie sous les bombes meurtrières de l’OTAN impérialiste. Au nom de la Nation malienne dites clairement NON !!
Je vous remercie… !».
Madame le Premier ministre, En vous saluant, Madame, j’ai conscience de la nouveauté contenue dans cette formule de politesse et d’accueil. Oui, Madame, si le genre a droit de cité et ce depuis nos débuts en politique dans ce pays, la très haute fonction à laquelle vous avez été appelée ouvre une ère nouvelle dans notre vocabulaire politique national.
Désormais, accueillir dans l’hémicycle Madame le Premier ministre, ne sera plus une sorte d’apax, de nouveauté à célébrer.
Oui, Madame, s’il ne suffit toujours pas d’être femme pour accéder à l’honneur qui vous est fait, il ne suffit plus non plus d’être femme pour en être écarté.
Plût au ciel que nous tous qui vous avons précédée en cette haute charge eussions tous les immenses qualités qui vous sont reconnues.
En vous nommant, Madame, nous voulons bien le croire, Son Excellence Mr le Président de la République n’a entendu ni se plier à une mode de la tribu, ni payer un tribut à la mode du temps.
Bienvenue donc, Madame le Premier ministre !
Cette politesse observée, Madame le Premier ministre, après vous avoir écouté avec une très grande attention, permettez que je vous livre mes sentiments et le point de vue de mon parti.
Avant, vous Madame, Ceylan, actuel Sri Lanka et le Pakistan ont donné au monde les premières femmes chefs de Gouvernement,
Sirimavo BANDARANAIKE et BENAZIR BHUTTO furent fondatrices. Ici est la différence, une grande différence. Contrairement à elles, vous n’avez pas mission de fonder ou de refonder mais d’aider à parachever.
C’est pourquoi vous nous voyez perplexes. Alors que nous vous voyions avec la tâche délicate et lourde, très lourde même de nous aider à exorciser les démons qui, tout au long de notre parcours démocratique nous aurons causé le plus de torts, à savoir enfin l’organisation d’élections propres, crédibles, transparentes et apaisées, vous voici commise à la refondation de l’ensemble de notre système constitutionnel.
Après avoir dit mon mot d’entrée, je ne doute certes pas de vos qualités. Mais s’agit-t-il de cela ? Que non !
Il s’agit ici et maintenant de priorisation et d’opportunité. Tous les Dieux de l’Olympe ont semble –t-il été consultés.
Pourtant, il semble que le plus important ait été superbement ignoré. Oui, Madame, CHRONOS se montre particulièrement cruel avec ceux qui oublieraient sa toute puissance. Et là, hélas, son courroux réserve de très mauvaises surprises.
Gardons-nous en donc. Dieu nous en préserve !
Le temps, Madame, surtout sa gestion heureuse, doit désormais être votre priorité absolue.
Hélas, en vous écoutant, je n’en ai pas eu la conviction.
Sollicités, nous avons souverainement décidé de vous accompagner dans votre mission. Ce faisant, Madame, il nous semblait qu’il y avait totale entente et compréhension sur les tâches nationales de l’heure.
L’intérêt de notre pays aujourd’hui, d’intelligence avérée, est de tout faire pour nous éviter les écueils et les dérives que le sentiment de puissance et de domination sans partage vient de faire courir à des pays très proches du nôtre.
Un peuple d’honneur et de dignité ne doit jamais avoir le sentiment qu’une parcelle si infime soit elle de sa souveraineté lui est refusée.
Les peuples, au-delà de la peur et de l’opportunisme de certains de leurs représentants sont devenus acteurs majeurs de leur histoire et n’entendent plus se voir déconsidérer ou spolier de quelque manière que ce soit.
Madame, j’en appelle à votre honnêteté intellectuelle et votre courage certain, pour prêter l’attention la plus grande aux conseils de haute portée politique qui vous ont été prodigués ici ce jour. Mon excellent cadet Me Hamidou DIABATE a dit des mots que je fais miens.
Toutes les interrogations utiles ont été faites Madame, vous ayant dit avec mes mots à moi, l’hommage qu’il me tenait à cœur de faire à votre nomination, je voudrais, Madame que vous sachiez nous rassurer et nous convaincre de savoir raison garder en même temps qu’optimisme utile à l’accomplissement de notre mission commune au service de ce digne et beau pays.
Madame, sachez ne pas désespérer ceux qui ont décidé de vous accompagner, d’accompagner celui qui vous à investie de sa confiance pour qu’au terme de l’exercice vous et nous puissions dire avec fierté « mission accomplie » ! C’est pourquoi vos propos concernant la nécessité d’un fichier électoral fiable pour la crédibilité, la transparence et la sincérité des élections, et l’engagement solennel de tenir les échéances dans le strict respect du délai constitutionnel, afin de conforter la bonne image de la démocratie malienne citée en exemple dans le monde (fin de citation),nous ont donné l’espoir d’un bon et utile commerce avec vous.
Madame comme l’a dit mon cadet, la balle est dans votre camp.
Notre appui ne vous fera pas défaut mais sachez que notre oui n’aura de sens qu’autant qu’il nous sera aisé de dire non si par un biais ou un autre, les engagements n’étaient pas tenus.
Merci et bon vent.