Depuis le jeudi 30 août 2018, la Primature fait circuler sur ses pages dans les réseaux sociaux une note qu’on qualifierait de rapport d’activité du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga et qui s’intitule « Défi relevé par SBM ». Dans ce document, on ne se lasse pas d’éloge du chef de gouvernement qui aurait atteint tous les objectifs qu’il s’était fixés. Mais un bilan négatif, a-t-on omis de préciser.
« L’insécurité grandissait. Le laisser-aller avait pris une proportion inquiétante. Les manifestations et agitations incessantes de l’opposition avaient fini par installer un sentiment de non-autorité. Tel, l’environnement qui accueillait le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga. Sans compter que le temps n’était pas son meilleur allié. Bref, tout était à faire, à refaire et dans l’urgence. Et dans les délais constitutionnels, incompressibles pour ce qui concerne l’organisation de l’élection présidentielle. » Voilà, en substance, les différents points que développe par la suite ce document d’une dizaine de pages.
Ce n’est qu’une apologie de la personne du Premier ministre en cherchant à montrer coûte que coûte qu’héritant le 2 janvier 2018 d’un tissu social disloqué, SBM a réussi à souder toutes les fractures sociales tout en parvenant à la tenue d’une élection inclusive, transparente et apaisée. La question que nous nous posons à la lecture d’un tel document est de savoir si le scribe de ce manuscrit est au parfum des actualités du Mali ou plutôt s’il ne s’agirait pas d’une provocation des Maliens. Quelle mission est-elle réussie par Soumeylou Boubeye Maiga ?
S’il a indiqué dans sa feuille de route qu’il a pour objectif de protéger les Maliens, les actualités des dernières minutes ne montrent-elles pas qu’elle n’a qu’échoué et a même contribué à l’aggravation de la crise malienne qui recouvre désormais pratiquement tout le centre, voire la capitale malienne, Bamako. Le document évoque la seconde feuille de route, à savoir, l’application de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale. Il faut être vraiment de mauvaise foi pour soutenir que le PM a réussi dans cette mission qu’il définissait comme prioritaire.
Dans l’unique but de faire valoir sa gouvernance aux yeux des Maliens, nous avons vu qu’à l’approche seulement du premier tour, des autorités intérimaires ont été déployées, des préfets envoyés dans leur localité dans l’unique but de corrompre les élections en faveur du parti présidentiel. Cette question de l’accord constitue la plus ratée des missions de Soumeylou Boubèye Maiga si nous savons que le rapport des experts de l’ONU fait état de violations graves de cet accord par certains de ces signataires. Dans ce contexte, où est la réussite ? Qu’on cesse de remuer le couteau dans les plaies !
En ce qui concerne l’organisation des élections, les panégyriques ne connaissent aucun répit. Ce document publié sur la page Twitter de la Primature laisse comprendre que SBM a su unir tous les partis autour d’un seul idéal : la tenue d’une élection présidentielle inclusive, transparente, crédible, apaisée. On fait état de plusieurs innovations mises en œuvre par le PM à l’occasion de ce scrutin, mais il faut faire remarquer que tout l’agissement de SBM n’a été que mission ratée dans la mesure où il n’a donné que l’impression d’être détenteur d’une mission : organiser les élections en faveur du président sortant. Cela peut se voir à travers toutes les découvertes de fraudes massives par l’opposition.
Faudrait-il rappeler au PM et à ses apologistes que l’audit du fichier électoral n’a pas évité les bourrages d’urnes, les procurations massives ? On a attribué zéro voix à des candidats dans les centres où ils ont voté ainsi que toute leur famille. Quelle est alors la définition que vous donnez à la transparence, à la crédibilité, à l’inclusivité ? Si l’opposition a été impliquée dans les différentes prises de décisions, il faudrait faire comprendre que ses points de vue n’auraient pas été pris en compte, sinon comment expliquer toutes ces manifestations de protestation des résultats à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.
Soumeylou Boubèye Maïga a juste trahi les Maliens en contribuant à la désintégration du tissu social. Jamais une élection n’a été aussi mal préparée que cette dernière. Il convient de le rappeler, depuis à quelques mois de ce scrutin, le candidat Mamadou Diarra avait eu à souligner que le Mali n’était pas suffisamment préparé pour faire face à cette élection. Aujourd’hui, « rendons à César ce qui appartient à César ». SBM a échoué à relever le défi. Il a échoué parce qu’il était porteur d’une mission, celle d’organiser cette élection de façon frauduleuse en faveur du président sortant. Dans ce sens, il convient certainement de soutenir avec ses apologistes qu’il a relevé le défi.
Fousseni TOGOLA