Ni Oumar Tatam Ly, ni Moussa Mara, encore moins Modibo Keita, n’auraient dû occuper la primature, qui doit échoir au parti majoritaire à l’Assemblée Nationale, le RPM. La gestion démocratique de la Res publica exige des principes que nul ne doit feindre d’ignorer. Au Mali malheureusement, depuis l’avènement de la démocratie les différents Présidents qui se sont succédé au pouvoir ont rarement respecté à la lettre ce principe du fait majoritaire dans le choix du Premier Ministre. D’Alpha Oumar Konaré à IBK en passant par ATT, ils ont tous choisi leurs PM selon leur bon vouloir ou sur la base d’affinités personnelles. Ils n’ont pensé à leur majorité qu’en cas de blocage. IBK n’a-t-il pas tardé à choisir le PM au sein du RPM ? Abdoulaye Idrissa Maiga est-il un choix judicieux ? Les militants du parti présidentiel ne seront-t-ils pas divisés entre les deux éléphants, à savoir Tréta et Maiga, qui rivalisent pour le contrôle du parti ?
Ils l’ont cherché et l’ont enfin obtenu. Après 4 ans de combat, cadres et militants du RPM n’ont jamais cessé de contempler la grande bâtisse de la cité administrative depuis l’avènement d’IBK au pouvoir. Et c’est le 8 avril 2017, qu’il y a eu la consécration du parti des tisserands en obtenant le poste de Premier ministre. Abdoulaye Idrissa Maiga en est le nouveau locataire. La patience a été longue et fastidieuse. La question qui semble être sur toutes les lèvres est celle de savoir ce que pourra faire la Majorité face à une grogne sociale qui va crescendo et à seulement quinze mois des élections Présidentielles ?
Pour rappel, Alpha Oumar Konaré le premier Président du Mali démocratique avec son écrasante majorité à l’Assemblée Nationale, n’a daigné choisir un PM dans son parti, l’Adema qu’après deux tentatives infructueuses. Les éphémères Premiers ministres Younoussi Touré et d’Abdoulaye Sékou Sow ont échoué à indiquer la voie, non pas par incompétence, mais par la malice du parti majoritaire de l’époque, l’ADEMA. Il aura fallu la nomination d’IBK, Secrétaire aux relations extérieures de l’ADEMA, comme Premier ministre, avec le soutien inconditionnel de ses camarades du CE pour stabiliser le pays et venir à bout de la grogne socio-scolaire. Alors que la démocratie malienne avait commencé à marcher sur ses deux pieds, brusquement arriva ATT, un indépendant et de surcroit un Général à la retraite. Au lieu de permettre aux partis politiques de s’épanouir, il les a taillés à sa mesure, avec l’aide de la justice. Aucune formation politique n’est arrivée à obtenir la majorité à l’Assemblée. Ce qui a permis au Général de gérer selon son humeur en concoctant une majorité docile. Tout partait de lui et tout lui revenait. ATT nommait qui il voulait aux postes de sa convenance et dans n’importe quel parti politique parce que tous les partis lui ont fait allégeance. Pendant ses dix ans de règne, ATT ne s’est jamais adossé à aucune majorité, ne serait-ce que relative pour choisir son PM. De Mohamed Ahmed Ag Hamani à Mariam Kaïdama Sidibé, en passant par Ousmane Issoufi Maiga et Modibo Sidibé, aucun d’entre eux n’a été choisi ni à l’ADEMA, ni à l’URD encore moins au RPM, les trois grands partis qui avaient plus de députés que les autres.
IBK, arrivé au pouvoir en 2013, après avoir critiqué la gouvernance ATT, souvent avec virulence, n’a jusque-là pas fait mieux que ce dernier en termes de renforcement de la démocratie. Le fait majoritaire n’a jamais été respecté. Issu d’un parti politique, qui a eu une écrasante majorité au parlement, IBK a nommé trois PM sans se référer à la majorité. C’est au dernier tournant de son mandat et certainement avec le réflexe de se réconcilier avec sa famille politique et avec un second mandat en vue, qu’il a choisi parmi les siens un PM. Ce choix est-il celui de tous les caciques du RPM ? Ce remaniement ministériel n’a-t-il pas fait de nouveaux mécontents ? Les mois à venir nous édifieront.
Youssouf Sissoko