Gouvernance : Il faut sauver le Mali

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Le président malien Ibrahim Boubacar Keïta

Une grosse faute a été commise et quelqu’un sans aucun doute doit payer. Mais de toute évidence comme dans les affaires de la surfacturation des marchés d’équipement de l’armée, de l’achat de l’avion présidentiel mais aussi des supposées imitations de la signature du Président de la République et tant d’autres, personne ne sera punie.

C’est tout de même hallucinant ce qui doit se passer à la tête de l’Etat du Mali. On a l’impression qu’il n y a personne aux commandes de ce pays. Depuis la fin de la « transition », on assiste avec interrogations à la marche plus que chancelante du Mali que nous devons tous pourtant aider à aller de l’avant.

La première année du « Mali d’Abord » a été bouclée par des malversations financières d’un niveau connu jamais égalé. Des surfacturations de plusieurs milliards de francs CFA pour l’équipement de l’Armée. Apparemment, tout le contraire de ce que contient le document de projet de société qui reconnait que « Les problèmes de nos forces de défense et de sécurité sont sans doute liés à des problèmes de moyen, à une mauvaise utilisation des ressources disponibles mais également à une absence d’autorité. Maliens, allons-nous toujours avoir besoin de soldats européens pour assurer la défense de notre territoire ? » Pour le moment en tout cas, la réponse est évidemment oui malgré la présence de l’auteur de ces mots à la tête (j’allais dire aux commandes) de l’Etat!

Pourtant, il y a deux ans seulement que l’on lisait ceci dans les colonnes du journal Les Echos du 25 juin 2012 : « Pour ce qui est de la sécurité, le regroupement recommande l’équipement adéquat des forces armées et de sécurité du Mali en matériels adaptés en vue de faire face à la libération des trois régions du Nord et de la partie nord de la région de Mopti, la traduction devant les juridictions internationales la TPI en l’occurrence, des auteurs d’atrocités commises sur les populations. »

En rappel, pour la conquête du pouvoir suprême un regroupement appelé IBK-Mali 2012 de plusieurs formations politiques, associations et clubs de soutien avait été mis en place. « Dans le souci de contribuer à la recherche de solutions aux graves problèmes auxquels le Mali est confronté, le regroupement IBK-Mali 2012 a organisé le samedi 23 un atelier d’échange et de réflexion aux termes duquel le regroupement recommande la traduction devant le TPI des auteurs des atrocités commises dans le Nord du Mali ainsi que la tenue d’une concertation nationale. » Tous les partisans assistent aujourd’hui à la décadence de l’Etat sans se faire beaucoup entendre pour ceux qui ne sont pas d’accord.

A croire que le temps est passé, mais nous ne pouvons cesser de rappeler les promesses à nous faire « de reconstruire un Etat digne de ce nom. Un Etat fort au service de l’efficacité, et dont l’un des socles devra être la justice et la bonne gouvernance. » Même si on dit généralement que seules les personnes naïves croient aux promesses de campagne, on imagine que tout homme d’Etat devrait avoir de la dignité et penser à sortir son peuple au moins de la misère et de la souffrance humaine. Le peuple malien souffre dans sa dignité depuis janvier 2012. L’espoir avait été placé dans les élections de 2013 pour lui redorer un peu le blason. Force est de reconnaitre que tout a été vécu ou est entrain de l’être de travers.

 

L’inconscience est, semble-t-il, élevée au rang de « fierté », l’irresponsabilité brandie comme un trophée, le vol institutionnalisé et la délation sublimée et encouragée en même temps que le mensonge d’Etat. L’insulte facile étant devenue une arme d’intimidation. Pourtant, il nous avait été promis aussi que « cette fois ci, tous les engagements pris seront tenus. Je le dis, je le ferai ! Inch’Allah! », comme si ce Dieu / Allah était ou pouvait être indifférent.

 

Pourtant dans une interpellation en août 2013 juste avant l’investiture, nous avions pris la liberté de dire ceci au nouveau Chef de l’Etat élu « Saches Ibrahima Boubacar Kéita que ceux qui ont voté pour toi ne l’ont pas fait parce qu’ils t’aiment ou qu’ils veulent te voir venir bâtir une nouvelle classe de privilégiés qui n’aura aucun respect pour eux, leurs compatriotes et qui va très arrogamment se mettre à les narguer à toutes les occasions au nom de richesse et de légitimité mal acquises au seul fait d’être avec toi.» (Contribution publiée L’Aube dans sa parution du 15 août 2013)

 

Quand le Chef de l’Etat va jusqu’à répliquer qu’il n’est « pas un brigand » au seul fait qu’on lui demande de rassurer son peuple en s’adressant à lui, cela dénote d’un état d’esprit où l’on le pouvoir est encore vu de manière médiévale. Personne ne peut obliger le Président de la République (encore que seul le peuple est souverain), mais si cela est demandé expressément (tout le monde n’a pas accès à ces canaux, l’opposition joue son rôle), le Chef doit le faire mais à sa manière. La prudence aurait recommandée peut être d’ignorer l’interpellation sur le champ afin d’en apporter un traitement d’Etat. Cela aurait été plus sage que le « je ne le ferai jamais » que nous avons entendu. L’histoire récente du Mali retient une autre locution aussi célèbre en 1991 « N’tè !!! N’ta kè !» (Je refuse catégoriquement de le faire). Même si cela venait « d’un grand républicain » (C’est le qualificatif utilisé pendant son discours d’investiture à l’endroit de Moussa TRAORE, président du Mali de 1968 à mars 1991 à qui la formule est attribuée), on sait ce que cela a fini par donner.

 

Sidi COULIBALY

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