La grève de l’Untm a fait beaucoup de dégâts. Outre le fait qu’elle a été un véritable succès syndical, elle est intervenue à un moment où rien ne va plus au sein des cercles du pouvoir.
L’Untm a réussi sa grève des 21 et 22 août courant, après avoir échoué à faire entendre raison au gouvernement, parvenant à paralyser la quasi-totalité des activités du pays. Apparemment en colère et très déçu contre son gouvernement, il a invité les deux parties à une reprise immédiate des négociations tout en sachant que des négociations ont très peu de chances de réussir dans un contexte particulièrement délétère où le gouvernement est traversé par de forts courants de contestations. Il y a d’abord le problème Mara. Nommé en avril dernier, Moussa Mara a vite été perçu comme un intrus malgré les justifications alambiquées distillées dans certains organes de presse. Selon lesquelles, l’homme serait charismatique, jeune, fin connaisseur du monde politique, gros travailleur. Les détracteurs n’ont pas tardé à dire qu’il est aussi le président d’un autre parti politique, qu’il s’est présenté à la dernière présidentielle contre IBK, que son parti ne compte qu’un seul député à l’Assemblée nationale. Mais surtout, l’homme s’est vite révélé comme ayant son agenda personnel et qu’il ne compte travailler pour personne à part sa propre personne. C’est de l’opposition, qui a vite compris le manège, qu’est partie la première dénonciation du mépris du fait majoritaire. Soumaïla Cissé, à qui l’on attribue le fauteuil de chef de l’opposition, a dit ne pas comprendre que Mara soit nommé Premier ministre à la place d’un cadre du Rpm, large vainqueur des dernières législatives. Apparemment, le parti présidentiel n’avait pas de Premier ministrable ou était incapable d’en présenter un consensuel.
Le Président de Yelema est donc resté en poste, parvenant même à ravir le statut de chef de la mouvance présidentielle. Il n’a jamais été dérangé par le fait qu’on lui a imposé des ministres, ne s’est pas offusqué de ne pas avoir les coudées franches, se fiche royalement de savoir qu’il n’est après tout qu’un fusible. Ce fusible aurait pu sauter après son impair de mai dernier, quand il est allé inspecter ses administrés à Kidal sous le contrôle des rebelles terroristes. Il n’en a rien été parce que mêmes ses détracteurs savaient qu’il n’aurait jamais pris l’initiative d’une pareille mésaventure sans l’aval du chef de l’Etat. Mais cet impair va se révéler politiquement payant pour Moussa Mara et mettre ses adversaires du Rpm sur leurs gardes. A défaut de le débarquer, il faut lui prendre tous les avirons de manière à l’empêcher de mener la barque où il voudra. Cela est d’autant plus voulu que pendant très longtemps les cadres du Rpm avaient été écartés des cercles de décision, d’abord par l’Adema ensuite par le Pdes. C’est donc frustrés et revanchards qu’ils ont pris les commandes du pays avec la ferme intention d’opérer une « RPMisation » à outrance. La mouvance présidentielle ? Il faut la dominer, la transcender pour s’accaparer de tous les postes juteux du gouvernement et de l’administration. Seulement, dans cette course effrénée aux postes, il y a télescopage entre les cadres du Rpm eux-mêmes. Chacun veut se caser soi-même ou placer un protégé ou affidé. Personne ne se soucie du bien-être du peuple malien, n’a à cœur de réaliser les promesses de campagnes sur la base desquelles celui à qui ils doivent leur présence dans le gouvernement a été élu.
Le Premier ministre ? On s’en fiche, c’est IBK qui l’a nommé, il n’a qu’à le gérer. De toutes les manières, il est sur le point d’être viré s’étant montré incapable d’appliquer son programme de société pour lequel il a été recruté ou d’éloigner ses fouineurs du FMI et de la Banque mondiale qui ont osé mettre le nez là où il ne fallait pas. Et puis, il commence à prendre des airs qui frisent la désinvolture et la discourtoisie. Selon certaines indiscrétions, il mépriserait tout ce qui n’est pas sa propre personne.
On l’avait dit intègre, quand on a viré son prédécesseur Oumar Tatam Ly, pourtant c’est en sa présence et sous son gouvernement que les Maliens ont découvert avec stupeur que les champions de la lutte contre la fraude et la délinquance financière se permettent les plus extravagantes libertés avec les deniers publics au point que ce sont des étrangers qui leur disent halte, ça suffit. Et leur coupent les vivres tout en demandant des comptes qu’ils sont incapables de donner.
C’est dans ce contexte particulier que les syndicalistes réclament leur dû. Une quête qui risque d’être vaine car, présents à tous les niveaux de l’administration et de la gestion financière du pays, les syndicalistes savent pertinemment qu’il n’y a plus rien dans les caisses de l’Etat. 2014, année nationale de lutte contre la corruption et la délinquance, se révèle l’année de toutes les gabegies.
Abdel Hamy
Mon vieux! une analyse juste et vrai. Mais que faire? ou quoi dire? L'hypocrisie des hommes fait que la vérité tue dans ce pays.
Comments are closed.