Gouvernance démocratique : Comment devient-on Président au Mali ?

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Les candidats à l’investiture qui ont le plus de chance d’accéder à la Magistrature Suprême, sont ceux qui remplissent quelques critères qui sont, entre autres:  avoir l’appui ou disposer d’un parti politique ou d’une coalition de partis  qui  ont une large implantation sur le territoire national; avoir suffisamment de moyens financiers pour acheter l’appui des leaders d’opinions, des notables et  le vote  d’un électorat désargenté qui pense que l’élection de tout candidat est une aubaine et  il leur est parfaitement indifférent que tel ou tel autre gagne la consultation,  dans la mesure où les projets de société sont des copies collées et contiennent toutes, les mêmes promesses sans lendemain.

Les projets de société ont un coût non chiffré.  Si c’était le cas, aucun candidat ne pourrait se livrer à une tromperie sur «la marchandise», parce qu’il  devra dire comment financer chacune des promesses qui ont une incidence financière, notamment sur les finances publiques.  Il devra  dire d’où lui viennent les nouvelles recettes pour financer le coût des projets mirobolants et des éléphants blancs,  le pays n’ayant pas encore découvert du pétrole.

Quant au financement des infrastructures figurant dans les programmes des candidats,  il dépend du bon vouloir des bailleurs de fonds, puisque le pays n’a pas d’épargne propre et est sous perfusion des partenaires au développement  qui sont aussi l’électeur caché.

En effet, contrairement à ce qu’on croit, le choix du Président sous nos cieux n’est pas qu’une question nationale. Ceux qui ont des intérêts stratégiques et géopolitiques à défendre et ceux qui ont  mis beaucoup d’argent dans le pays, veulent que le retour sur investissement soit garanti et se fasse de façon sécurisée. Ils choisiront aussi celui qui peut créer un environnement propice aux affaires et lutter efficacement contre l’hydre de la corruption.

C’est la raison pour laquelle le candidat qui  peut aussi  maintenir la stabilité et la cohésion sociale est leur choix. Il doit avoir de la poigne pour ne pas céder à toutes les revendications corporatistes et maintenir la paix au Nord ; assurer son développement, à tout le moins réduire, la pauvreté généralisée  tout en menant un combat sans réserve contre le péril transnational du trafic de la drogue et éradiquer la menace d’AQMI.

En outre, le candidat doit avoir une expérience de la gestion de l’appareil d’Etat, ce qui écarte d’emblée les petits candidats sans aucune expérience gouvernementale ou parlementaire solide. Il devra être instruit pour rendre des arbitrages utiles et faire preuve de patriotisme économique pour sauvegarder l’intérêt national, et non d’un patriotisme ombrageux et stérile.

On accède pas à la Magistrature Suprême par les urnes  en succédant à un Président  sans lui donner des gages que sa retraite sera tranquille et que sa présence à la tête de l’Etat ne va pas déclencher des poursuites contre lui et certains de ses proches, surtout que la nouvelle Constitution ne leur donne aucune immunité particulière. Il est aussi intelligent d’avoir l’estime et le soutien du Boss sortant parce que, c’est lui qui organise les élections, qui dispose de l’appareil d’Etat et qui a nommé aux fonctions les Gouverneurs de l’Exécutif régional  qui occupent une position centrale dans le dispositif électoral. Ils sont expérimentés et formés à l’alchimie et à la technologie électorales qui n’ont aucun secret pour eux.

Enfin, la fameuse Cour constitutionnelle qui peut annuler des voix par millions,  (cas de la Cote d’Ivoire récemment et du Mali lors du passage de témoin entre Alpha et ATT en 2002,),  est un adversaire redoutable, si elle n’est pas neutre. Elle est souvent inféodée au Chef de l’Etat sortant et son Président est nommé par lui  selon les nouvelles dispositions de la nouvelle Constitution. Et si ses membres éminents ont été fragilisés par leur gestion antérieure, ils auront un dossier  qui les rendra taillables et corvéables à souhait entre les mains de la redoutable sécurité d’Etat.

L’ère des candidats charismatiques est révolue même s’ils mangent et dorment  chez l’habitant pendant la campagne. En temps de paix, ils n’ont aucune  chance d’accéder au pouvoir au Mali.
Birama FALL

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