Gouvernance démocratique au Mali : Que de rêves brisés et d’espoirs déçus !

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De pays à la démocratie exemplaire, le Mali est devenu aujourd’hui principalement par la faute de sa classe politique la risée du monde.

En 1991, après 23 ans de dictature féroce, le peuple Malien a cru devoir prendre en main son destin à travers une insurrection populaire parachevée par un coup d’Etat militaire et une courte transition de 14 mois. Les premières élections véritablement démocratiques furent ainsi organisées en 1992 et consacrèrent la victoire du candidat de l’Adéma/PASJ, Alpha Oumar Konaré, au second tour d’un scrutin indécis.

Entre-temps il y eût l’adoption d’une nouvelle Constitution, celle de la IIIe République, le 25 février 1992, qui, elle-même, était la suite logique de la Conférence nationale de juillet 1991. Depuis lors que de chemins parcourus ! De pays à la démocratie exemplaire, le Mali est devenu aujourd’hui principalement par la faute de sa classe politique la risée du monde.

C’est donc en toute connaissance de cause que le président du parti ADP-Maliba met en garde contre “le désintérêt croissant du peuple vis-à-vis de la politique”. C’était à la faveur de la cérémonie de lancement des activités de l’Ecole de formation politique de son parti.

L’honorable député Amadou Thiam, puisque c’est de lui qu’il s’agit, n’a fait là que confirmer un constat qui s’impose implacable au fil des scrutins organisés ces 20 dernières années dans notre pays avec des taux de participation oscillant entre 43 % et 9 % en moyenne.

Les inquiétudes du jeune président d’ADP-Maliba sont amplement justifiées, car peut-on véritablement parler de démocratie lorsque l’écrasante majorité des citoyens ne se sent pas concernée par l’exercice d’un droit fondamental (le vote) consacré par la Loi fondamentale (Constitution) du pays ? Les analystes politiques, les sociologues et autres spécialistes du droit constitutionnel ont là sûrement matière à réflexion.

Cependant, la déduction est toute simple. En effet, longtemps abreuvé de discours mielleux et de slogans creux, le peuple malien est aujourd’hui légitimement fondé à douter sinon à haïr sa classe politique pour avoir manqué à la plupart de ses engagements pris au lendemain du 26 mars 1991.

Que représente réellement “la voix” du citoyen malien actuellement dans un système électoral où le mensonge, le poids de l’argent, la cupidité, l’absence de conviction, la course effrénée à l’enrichissement personnel, le peu de considération pour le bien collectif, le détournement de deniers publics à des fins individuelles, l’achat de conscience, la caporalisation constante de l’administration publique, le népotisme, le clientélisme, le favoritisme, l’injustice sociale, entre autres, ont fini de convaincre celui-ci qu’il n’y a plus de règles qui tiennent réellement compte de ses intérêts ?

L’Etat, de son rôle de régulateur, a été lui aussi phagocyté à travers une “clanisation”  outrancière de tous ses segments. Ainsi, il a perdu, lui-aussi, toute son autorité face à la puissance de l’argent. Le truand, l’arnaqueur, le voleur attitré, le fossoyeur de l’économie national, le bandit de grand chemin, le narcotrafiquant, le criminel patenté se sont substitués aux citoyens en devenant, en lieu et place, des faiseurs de rois. Que pouvait-il rester au citoyen ? Si ce n’est le désintérêt pour la chose “politique” et l’abstention lors des scrutins ?

Mais que personne ne s’y trompe. Une telle situation ne saurait perdurer dans un environnement globalisé en ce 21e siècle où les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont fortement contribué à l’avènement d’un gros village planétaire.

Les mêmes causes produisant généralement les mêmes effets, la classe politique, dans son ensemble, a intérêt à se ressaisir avant que le citoyen désillusionné, désabusé, trompé, trahi, brimé et opprimé dans sa quête légitime de démocratie, d’équité, de justice sociale et de bien-être quotidien reprenne confiance en ses capacités incommensurables auxquelles aucune force, si puissante soit-elle, ne peut longtemps résister.

En effet, pour tous les observateurs avertis, les signaux d’un tel éveil se multiplient ces temps-ci dans un Mali où le mal-vivre est aujourd’hui la chose la mieux partagée, où, ils sont nombreux ces vaillants pères et mères de famille obligés de raser les murs, de s’humilier à la limite, pour trouver de quoi offrir le minimum vital à leurs progénitures.

La classe politique est certes vivement interpellée. Mais l’Etat, à travers les autorités qui l’incarnent, l’est également, sinon davantage. Les autorités doivent sortir de ces calculs mesquins et politiciens qui ont fait tant de mal à notre pays, à notre nation. Pour ce faire, l’Etat se doit de revenir à ses rôles et devoirs régaliens de principal garant de l’égalité de tous devant la loi, de régulateur “intelligent” de la société, de juge impartial nonobstant le rang social du justiciable, de protecteur du faible contre toute forme d’abus, d’oppression ou de tyrannie du plus fort ou du plus nantis, etc.

Que reste-t-il des idéaux de la révolution du 26 mars 1991 ? Seule semble encore résister la décadence démocratique, la pluralité et la diversité d’une presse qui se bat tant bien que mal pour préserver cet acquis indéniable de l’ère démocratique. A elle s’agrippent d’autres libertés, telles que celles d’association, d’opinion et d’expression. Sinon, même celle de culte se trouve dangereusement menacée actuellement à travers l’incapacité de l’Etat d’assurer et d’assumer sa laïcité vis-à-vis de certains groupes ou milieux religieux.

En plus de ces menaces qui planent au-dessus de notre nation, il y a aussi l’extrême politisation de l’administration d’Etat. A ce sujet, le président des Fare/An ka wuli, Modibo Sidibé, rappelait à juste titre à l’occasion de la 1re Convention nationale de son parti récemment que “l’administration publique ne doit plus cesser d’être la propriété privée d’un clan ou d’une famille. Elle doit être dépouillée, sinon préservée de toutes considérations partisanes et rester véritablement républicaine au service exclusif du citoyen et ou de ses usagers”.

C’est ainsi, et ainsi seulement ainsi que le citoyen, réhabilité et rétabli dans ses droits, aura de nouveau confiance en la République et acceptera certainement de jouer son rôle d’acteur incontournable de la démocratie, car détenteur du bulletin de vote, donc de la légitimité des urnes. Sinon, tant de rêves brisés, d’espoirs déçus, de frustrations et d’injustices sociales ne feront qu’agrandir davantage le fossé entre lui et la classe politique incarnée au mieux par ceux du moment qui ont en charge les destinées du pays.

Le rêve est permis. C’est un droit inaliénable pour tout individu. Mais la réalité prend toujours le dessus et s’impose au rêve en fin de compte. Raison pour laquelle le sommeil peut-être mouvementé et le réveil souvent brutal.

B . Sidibé

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1 commentaire

  1. Si je comprends bien, mr sidibé, “vivement donc un imam à koulouba” comme a prévenu le célèbre prêcheur chérif madani haïdara? En tout cas, les politiques semblent avoir perçu le message 5/5.

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