La fin de sursis a-t-elle sonné pour les cadres prédateurs de l’économie nationale ? Après l’abrogation des décrets de nomination des directeurs du matériel et du personnel de tous les départements ministériels, une vingtaine de directeurs généraux, exécutifs etc., est désormais dans le collimateur. Le rapport sur la moralité des personnes concernées est presque plié par les services compétents. Place à un imminent mouvement sous peu.
Il avait suscité l’idée chez de nombreux Maliens que l’impunité faisait partie de son mode de gestion. On avait l’impression que l’Etat s’accommodait de la corruption et de l’impunité. Que sous ATT, certains resteront des intouchables, des inamovibles. Ses discours sur le fléau de la corruption faisaient plus pouffer que conscientiser.
L’organisation par lui, des états généraux sur le foncier et même sur la corruption a été plus perçue comme un spectacle des mots qu’un lieu de diagnostiquer les maux de la nation. Personne ne pariait sur une action de rigueur du candidat du parti de la demande sociale. En son temps les troubles engendrés au bureau du vérificateur général, ayant produit l’incarcération (de quelques heures) de Sidi Sosso Diarra ont fini par créer l’évidence chez de nombreux Maliens que “sous ATT, les prédateurs ont de beaux jours devant eux”.
A un an de la fin de son mandat, le patron semble trouver les moyens de prendre le mal à sa racine. En véritable béret rouge, Amadou Toumani Touré veut désormais traquer les dévastateurs des finances publiques. Donner feu vert aux contrôleurs pour fouiner leur nez dans n’importe quel tiroir.
Le premier round de cette démarche (jugée tardive) du président de la République a été la mise à la retraite anticipée de tous les directeurs des finances et du matériel, anciennement dénommés DAF. Lesquels seront désormais nommés à partir de critères rigoureux. Dès la nomination des nouveaux DMP, le président ATT compte faire la purge au sein de certaines directions stratégiques de l’économie nationale, une vingtaine selon une source de Koulouba.
Le sauve qui peut général !
Les couleuvres seront, sans aucun doute, difficiles à avaler pour de nombreuses personnalités du régime d’ATT. Car, en plus de leur révocation, ils seront dessaisis de tous leurs biens mal acquis, recensés à partir d’une enquête secrète et minutieuse des services de renseignement. Déjà, dans certaines de ces directions, la révocation des directeurs des finances et du matériel a constitué un signal fort, un avertissement. C’est pourquoi des réunions restreintes ont été multipliées pour vite enfouiller dans le sable des dossiers problématiques. Pour cela, les comptables-matières et autres informaticiens ont été mis à contribution durant toute la semaine dernière.
En réalité, le cordon était très rectiligne entre certaines de ces directions et la direction des finances et du matériel de leur département, pour qu’elles soient épargnées en cas de trous dans les comptes de celle-ci. Autrement dit, les affinités personnelles de nombreux de ces ” boss ” avec les ex-DAF étaient telles qu’on fermait les yeux sur leurs bévues et laissait couler leurs factures comme dans un moulin. Ce n’est pas pour rien que le Trésor public saignait dangereusement.
La panique soudaine de certains directeurs nationaux et généraux s’expliquerait aussi par le fait que les prestataires et fournisseurs de leurs services ne sont autres que leurs proches parents et amis au grand dam des véritables opérateurs économiques évoluant en parfaite légalité.
Devoir de sortir par la grande porte !
Notre source est formelle, après une première enquête (de moralité) c’est environ une vingtaine de responsables de l’administration publique, en majorité des finances et de l’économie qui sont désormais dans l’œil du cyclone. Et l’estimation des valeurs de leurs biens mal acquis atteindrait plusieurs dizaines de milliards. Parmi lesquels, des lots de terrain, des bâtisses à l’intérieur et au-delà des frontières du continent. Le cas de ce directeur d’un des services de recouvrement des recettes publiques aurait donné du tournis au président de la République. Le fameux directeur aurait en sa possession des maisons en France et aux USA, en plus de ses nombreux domaines et concessions sur le territoire national. C’est surtout le train de vie de ce responsable qui a relevé ATT de son assiette. Ses dépenses hebdomadaires, privées, se chiffreraient en une dizaine de millions. Lors du mariage de son fils, l’année dernière, 47 bœufs ont été sacrifiés pour les pauvres, qui n’étaient pas invités au festin de l’hôtel “Laico de l’Amitié” où une cantatrice est rentrée à la maison avec vingt millions de nos francs.
Il n’est pas seul, loin s’en faut. Un autre, au poste depuis une vingtaine d’années serait devenu au gré de sa bourgeoisie une véritable goule pour ingurgiter les sous du contribuable malien. Ses actions et parts dans certaines sociétés anonymes peuvent construire des écoles et centres de santé pour plusieurs localités du pays.
Ce bâton d’aveugle, à en croire toujours notre source, n’épargnera pas certains frères d’armes du prince du jour qui laissent apparaître des signes extérieurs d’embourgeoisement à crever les yeux. La pilule que le président ATT entend très bientôt administrer à ces directeurs véreux, sera à n’en pas douter l’apothéose des grandes actions de fin de mandat de l’actuel chef de l’Etat. Lequel, semble-t-il, veut moraliser l’administration publique afin non seulement d’empêcher certains cadres financiers d’utiliser des fonds publics à des fins politiciennes, lors des échéances de 2012, mais aussi permettre à son successeur d’hériter d’une administration assainie.
En somme, le 08 juin 2012 avant midi, le général ATT veut sortir par la grande porte. Coûte que coûte et quoi qu’il en coûte. Parole de soldat.
Moustapha DIAWARA