Après quatre ans à la tête de l’exécutif, rares sont les Maliens ayant pu décrypter les options politiques du président IBK à cause de la multiplication des mauvais choix. Et comme pour ajouter à la confusion, le changement de gouvernement tient lieu de carte maîtresse. En quatre ans, les maliens ont vu défiler quatre gouvernements qui n’ont apporté aucune amélioration significative à leur quotidien qui demeure jusqu’à preuve du contraire sujet à caution. L’achat d’un avion présidentiel dès l’entame de son mandat constitue la première d’un long chapelet de mauvaises options qui ont fini par gripper la machine de l’exécutif. Aujourd’hui, les signes d’une gouvernance en panne se précisent au fil des tentatives opérées par le président pour sauver ce qui peut l’être. Organisation de la conférence d’entente nationale pendant la grève illimitée des agents de la santé est une confusion qu’un Etat en possession de ses moyens aurait évitée à défaut de changer de priorité. Pendant que la conférence sensée réunir les éléments constitutifs d’une charte de paix, se tenait des maliens mourraient pour faute de soins. Lenteur, mauvaise choix des priorités et des collaborateurs sont devenus les constances d’un président qui cristallisait pourtant tous les espoirs. Les attaques meurtrières continuent au nord du pays malgré les concessions faites par le gouvernement parfois au mépris de l’aspiration des populations concernées en premier lieu.
Le front social gagné par l’impatience à cause de la gestion approximative des attentes rentre en ébullition. Au vu de la recette proposée par le président, la grogne sociale est loin de son épilogue. Changement de gouvernement et émiettement des ministères sont loin d’être la réponse aux sollicitations sociales, autrement il n’y aurait pas eu autant de nouveaux gouvernements en seulement quatre ans. L’insistance du président a composé des gouvernements avec des visages familiers suivie d’augmentation de taille, laisse planer le doute sur sa volonté à chercher une équipe à la hauteur de la tâche. Cette méthode éprouvée a montrée ses limites. Si pour la grève des agents de la santé, une trêve a été obtenue, celle des enseignants en fallait juste peu vers une année blanche. Et le pays n’est pas à l’abri de la reprise des grèves suspendues sur des accords qui attendent d’être appliqués si la nouvelle équipe n’améliore pas sa gestion des crises.
En quatre ans d’exercice du pouvoir, le président a choisi de distraire en se donnant à fond dans des programmes opposés pour la plupart aux préoccupations de son peuple. Des préoccupations qui peuvent se résumer en deux petits points. Le rétablissement de l’autorité de l’Etat à travers une réforme profonde, ainsi que le rétablissement de la justice sociale. Aujourd’hui, il est loisible de constater que la visite d’Etat, l’organisation du sommet Afrique/France, le déguerpissement des abords des routes, l’achat de l’avion présidentiel, le sommet du G5 du sahel, la conférence d’entente nationale n’ont eu que peu ou pas d’impact sur la crise multiforme que traverse le pays. Tous ces évènements, aux dires du président visaient à rendre le Mali fréquentable. Objectif noble certes, mais loin des priorités du moment qui exigent des actions concrètes sur le terrain. Des actes, il y’en a eu mais vite rattrapé par le manque de hauteur de vue des différentes équipes gouvernementales. De la signature de l’accord de Bamako issu du processus d’Alger, le gouvernement malien s’efforce de remplir sa part du contrat sans obtenir une contre partie significative des autres signataires. Pourtant l’option du dialogue prôné par le président est la meilleure pour parvenir à une paix durable, mais là aussi la gestion n’est pas à la hauteur. Les différentes équipes gouvernementales successives se sont montrées incapables de mener à bien les démarches pour faire avancer le processus malgré la présence de nombreuses structures d’accompagnement. La seule volonté d’arriver à la paix est la seule affiche, le reste baigne dans un flou inextricable de rôle qui nous vaut cette lenteur constatée aux allures de blocage. Le pays roule au ralenti. La perspective d’une avancée significative dans la résolution de la crise multiforme pendant ce quinquennat s’éloigne avec le grand détour de remaniement gouvernemental. Ce retour répété à la case de départ est le signe le plus évident d’une panne de gouvernance qui plombe le pays.
Aujourd’hui, il n’est pas question d’intenter un procès contre le premier chef de l’exécutif, mais d’attirer son attention sur le fossé entre les discours et la réalité du pays. Les Maliens d’en bas souffrent de la baisse du pouvoir d’achat et des conséquences de l’insécurité engendrée par la crise au nord du pays. Les discours politiquement corrects et les manipulations d’opinion utilisées de part et d’autres permettent de gagner du temps, mais ne constituent en rien des solutions à ces maux qui rongent le pays. Nul besoin de rappeler que le Mali, par la force des choses est devenue le pays des priorités. A cause de cela, obligation est faite aux responsables de faire preuve d’intelligence dans le choix de leurs priorités pour éviter un blocage. Le président IBK pouvait faire économie de bons nombres de désagrément s’il s’était attaqué dès son entrée en fonction à la crise sécuritaire avant la multiplication des groupes armés. L’insécurité est l’ennemi numéro 1 du développement et mère de tous les dangers pouvant anéantir les efforts de reconstruction d’une nation. Et dans une seconde phase, engager une reforme en profondeur de l’administration afin qu’elle retrouve la crédibilité et l’efficacité.
Bouba Sankaré