Fourniture du matériel électoral : Un marché de 6 milliards par entente directe

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On ne peut pas lutter contre un mal que si l’on connait ses causes. Or aucune  des raisons avancées par le gouvernement pour attribuer le marché par entente directe (6 milliards de FCFA) à la société INKRIPT Technologie, ne permettent pas d’expliquer de façons pleinement convaincante, l’attribution dudit marché. Le manque de transparence entoure cette fourniture de matériel électoral. Nous pensons que  la thèse est simple, voire simpliste : ce sont les derniers fonds du régime ATT qu’il faut partager. Et qui serait mieux indiqué ? Une société libanaise ?

 

Depuis l’avènement de la démocratie, le Mali a été transformé en un Etat- marmite. Les princes du jour ne reculent devant rien pour se faire les poches. L’ouragan bourgeois a balayé toutes les structures veillant sur le mode de passation des marchés publics. Pour cela, trois valeurs contribuent à  fonder leur nouveau monde : la méritocratie, la solidarité sociale, l’utilité collective.

L’Autorité de régulation des marchés publics regarde impuissante la bataille entre le Conseil national du patronat du Mali et le Ministre de l’Economie des Finances sans intervenir. Gendarme du marché, elle doit sanctionner les opérateurs irréguliers.

 Selon le communiqué du conseil des ministres du mercredi 14, le présent marché est passé par entente directe.

Selon le gouvernement, les raisons qui sous-tendent le choix de la procédure d’entente directe avec la Société INKRIPT Technologie sont :

1- La complexité de la procédure de confection des imprimés électoraux sécurisés. En effet, la conception des bulletins et spécimens des bulletins est un processus complexe qui prend du temps, compte tenu du niveau de sécurité recherché. Il est donc nécessaire de passer le marché en urgence pour permettre au titulaire du marché de prendre les dispositions en rapport avec les services techniques du MATCL pour l’exécution du marché dans le respect des délais prévus pour les élections.

2- Le délai fabrication long du matériel : la fabrication des urnes, des isoloirs et scellés peut, de la conception à la fabrication, prendre assez de temps, notamment compte tenu de l’importance des quantités à fabriquer et la nécessité d’une flexibilité dans ce délai pour tenir compte des changements pouvant être induits par la nouvelle loi électorale en cours d’examen à l’Assemblée nationale

3- Les facilités accordées dans l’acquisition des matériels : En effet, l’attributaire du marché, la société libanaise INKRIPT Technologie fait à notre pays un don de matériels électoraux pour un montant de 1537 425 000FCFA. Ce don permettra au  gouvernement de faire une économie de 1537 425 000 F CFA sur le coût des matériels électoraux nécessaires pour la bonne tenue des élections.

4- La qualité technique des installations d’INKRIPT Technologie constatée par une mission du MATCL qui s’est rendue au cours du mois d’octobre 2011 pour apprécier la capacité de la société.

5- L’acceptation par le titulaire du marché de fournir l’ensemble du matériel électoral dans les délais prévus et d’être payé sur deux exercices budgétaires (2011 et 2012). Ces différentes motivations justifient suffisamment, l’application des dispositions de l’article 49 du décret N°08-485/ P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public.

 

NOTRE COMMENTAIRE 

  Aucun des arguments avancés par le gouvernement ne saurait justifier une conclusion de marché par entente directe dans la mesure où pour avoir les meilleures conditions dans la transparence, le code des marchés publics prévoit une consultation restreinte entre un nombre limité d’opérateurs nationaux et internationaux. Il ressort des arguments avancés que la fabrication des urnes peut, de la conception à la fabrication, prendre assez de temps, comme si toutes les anciennes urnes achetées, pour les dernières élections, sont dépassées et jetées à la poubelle.

 Le don en nature de matériels électoraux (pour un montant de 1 537 425 000 FCFA) fait par la société libanaise INKRIPT Technologie ne peut pas être valablement retenu dans un dossier d’offre de biens ou de services. La remise est toujours accordée en pourcentage sur la proposition de prix. Rien ne justifie que la valeur des matériels électoraux, en ce qui concerne ledit don, n’est pas repartie sur l’ensemble de la valeur de l’offre.

Le gouvernement annonce également que le titulaire du marché accepte d’être payé sur deux exercices budgétaires (2011 et 2012). A ce niveau, ce critère ne peut pas justifier cette bienveillance, dans la mesure où le code des marchés publics prévoit le paiement pluriannuel des marchés donnant le libre choix à un opérateur économique de participer ou non. Formuler comme il ressort, rien ne justifie qu’un autre opérateur ne pouvait accorder également une remise, même substantielle.

Aussi, au regard des dispositions de la loi qui régit les finances publiques, les engagements pour les dépenses de matériels s’arrêtent le 30 novembre de l’année budgétaire en cours ; le conseil des ministres ne s’étant tenu que le mercredi 14 décembre 2011, on peut déduire aisément que la société libanaise a été payée avant cette fameuse décision injustifiée.

Les gouvernements successifs ont toujours usé et abusé des marchés par entente directe dont le marché des stations de pompage de l’EDM avec HYDRO-SAHEL, mais le plus scandaleux a été «l’Initiative riz» où après avoir passé une commande directe de près 11 milliards F CFA d’engrais avec TOGUNA AGRO- Industrie, le conseil de ministres a conclu un marché dit de «régularisation» contrairement aux dispositions  du code des marchés publics.

La Rédaction

 

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