Contrôle au niveau des Services Judiciaires

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Les juridictions chargées de rendre la justice au nom du peuple malien n’ont pas été exemptes de Contrôle, comme il se doit. Dans notre série consacrée au rapport de la CASCA, nous abordons aujourd’hui dossiers relatifs aux juridictions épinglées, déjà transmis aux autorités judiciaires compétentes. Au nombre de celles-ci, figurent en bonne place les greffes de la Cour d’Appel de Bamako, des Tribunaux de 1ère instance de la commune IV, Sikasso, Mopti, Ségou et du tribunal de Commerce de Mopti.

C’est l’Inspection des services judiciaires qui a contrôlé toutes les juridictions épinglées. D’abord, au niveau de la Cour d’Appel de Bamako (période du 1er janvier 1995 au 27 septembre 2005), les irrégularités administratives relevées ont pour noms l’insuffisance notoire du personnel, l’inexistence du service de garde des locaux, la non présentation des rôles d’audience des années antérieures à 2003, le nombre élevé des renvois d’affaires à juger, l’existence de registre de recouvrement des amendes et frais de justice non coté et non paraphé, la non-passation de service entre l’actuel président de la Chambre d’Accusation et son prédécesseur. 

S’y ajoutent l’inexistence de secrétariat à la Chambre d’Accusation, l’inexistence de crédit autonome de fonctionnement à la Chambre d’Accusation, la non-signature des audiences par le président de la Chambre d’Accusation et par le greffier. Sans oublier la non-soumission régulière des plumitifs civils à la signature du président au niveau du siège à l’issue des audiences, la disparition d’importantes quantités de minutes au niveau du greffe.

Au plan financier, la non-tenue de certains registres réglementaires et comptables, l’existence au greffe de valeurs de caisse de 7.002.000 FCFA constituées de bons d’argent accordés au personnel magistrat. Plus grave, l’existence au greffe d’un déficit de caisse de 57.286.994 FCFA reconnu sur le P.V de passation par le greffier en chef sortant. C’est pourquoi, ce dossier a été transmis à la justice.

Signalons, pour ceux qui ne le savent pas, que le greffier en chef en question a déjà été mis sous mandat de dépôt avant de bénéficier d’une liberté provisoire. Il doit semble t-il, comparaître devant la Cour d’Assises.

Ségou : plus de 24 millions manquent à l’appel

S’agissant du tribunal de 1er instance de Ségou (période du 1er janvier 2004 au 29 mai 2006), les malversation financières sont nombreuses : l’existence de valeurs de caisse constituées de bons d’argent dont le montant s’élève à 13.765.810 FCFA, l’entrée en caisse de 16.825.000 FCFA estimés à partir d’un pointage des dossiers retrouvés dans l’armoire du président du Tribunal et ceux consignés dans les procès-verbaux de passation de service. De plus, on relève d’autres irrégularités portant sur le total des débours fixé à 2.649.000 FCFA représentant la différence entre le montant énoncé dans le procès-verbal (18.166.600 FCFA) et celui des bons physiquement présentés (13.765.810 FCFA), la rétention par le greffier d’un cahier contenant les reconnaissances de dettes de certaines personnes dans le but de les couvrir.

La découverte d’un manquant de 435 minutes dont les consignations s’élèvent à 24.242.126 FCFA et l’existence de factures de fournitures de bureaux et diverses dépenses pour un montant de 7.242.126 FCFA sont autant de fautes de gestion reprochées au greffier du tribunal de 1ère instance de Ségou. Ce dossier se trouve également devant les autorités judiciaires compétentes.

A Sikasso, on note l’insuffisance, la vétusté et l’exiguïté des locaux, le manque d’équipements et de documentation, l’insuffisance des crédits de fonctionnement, l’inexistence de moyen de transport des détenus, la lenteur dans le traitement des dossiers, le retard dans la rédaction des décisions rendues, l’inexistence de certains registres, le non établissement des pièces d’exécution. Au plan financier, on retient le non recouvrement des amendes et frais de justice, l’existence de valeurs de caisse de 2.602.440 FCFA au compte du greffier sortant et la disparition de bons du personnel. La CASCA a donc transmis ce dossier à qui de droit.

Au niveau du Tribunal de Commerce de Mopti (période du 23 juillet à août 2005) les difficultés administratives sont, entre autres, l’existence de locaux non adaptés, l’inexistence de moyen de déplacement, l’existence de 79 dossiers en instance.

Au plan des malversations financières, on relève l’existence d’un écart à justifier de 615.105 FCFA qui s’ajoutent au déficit de 1.762. 470 FCFA décelé pendant l’inspection de juillet 2003, soit un total à justifier de 2.377.585 FCFA et l’existence d’une valeur de caisse de 35.000 FCFA.

En commune IV du District de Bamako, les faits constatés au Tribunal de 1ère instance sont, entre autres, l’existence d’un excédent de 6.129.385 FCFA au titre de la gestion de l’actuel greffe, l’existence d’un écart de 385.805 FCFA entre la somme déposée en banque par le greffier sortant (18.724.341 FCFA) et le montant constaté sur le relevé bancaire (18.338.536 FCFA). Les irrégularités administratives ont pour noms : la découverte de 1555 minutes manquantes et de 707 minutes non enregistrées, l’existence de nombreuses affaires en instance au niveau de l’instruction et la détention hors du délai légal de plusieurs détenus.

Ce dossier est aussi entre les mains des autorités judiciaires compétentes.

Nombreuses sont les juridictions dont la gestion est mauvaise. C’est le cas du Tribunal de 1ère instance de Mopti, la justice de paix à compétence étendue de Douentza et Koumantou (compétence étendue de Kignan). En outre, la CASCA relève qu’il résulte des constatations que les autorités judiciaires dont la mission est de veiller au respect de la loi sont les premières à s’opposer à la vérification, par le Contrôle Général des Services Publics, de la gestion des ressources publiques mises à leur disposition.

C’est ainsi qu’elle a suggéré le retrait par le Comité Directeur du Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) de ses correspondances des 27 juin et 14 octobre 2005 invitant les chefs des juridictions à ne pas recevoir la mission conjointe de contrôle. Dans le même ordre d’idée, la CASCA a demandé l’ouverture d’une procédure disciplinaire à l’encontre des magistrats et des chefs de juridiction responsables de l’échec de la mission conjointe de contrôle.

Chahana TAKIOU

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