Communication gouvernementale : Dilapidation à outrance des fonds publics

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Le Gouvernement malien continue ses opérations de charme envers l’extérieur. Il a entrepris de se refaire une beauté et de s’offrir une nouvelle virginité. A peu de frais ? Non, les autorités offrent des dizaines de millions de FCfa à des magazines étrangers pour un seul numéro, alors qu’elles sont incapables de revoir à la hausse l’aide publique à la presse nationale.

Dans une précédente livraison (Le Prétoire du 11/08/2011), votre Journal dénonçait les pressions que subissent les chargés de communication des différents Départements ministériels et leurs Ministres pour offrir des insertions publicitaires à quelques «journaux» et «magazines», les obligeant ainsi à une indiscipline budgétaire puisqu’ils sont contraints, pour faire plaisir à Koulouba, de réaliser des dépenses non prévues. Au détriment des vraies activités du département. Si certains Ministères peuvent se permettre de faire des dépenses «folles» sans préjudice important sur leur fonctionnement, tous ne le peuvent pas. A l’image de ce Département qui, depuis sa création en avril dernier, n’a eu pour seule dotation pour son fonctionnement annuel que la modique somme de soixante et trois millions. Aujourd’hui, après avoir tout dépensé en équipement, ses travailleurs tirent le diable par la queue pour assurer son fonctionnement. Il est loin d’être le seul dans ce cas.

Le Gouvernement n’en a cure. Il est vrai que par les temps qui courent, pendant lesquels l’Etat est sérieusement malmené par certains partis politiques et quelques organisations de la société civile pour sa gestion cahoteuse des affaires de la Nation, les autorités sont plus soucieuses de préserver leur semblant de bonne image à l’extérieur, avec pour seules philosophie et sagesse : il faut toujours se fier aux apparences.

Dans cette optique, elles ont entrepris une campagne de séduction de l’opinion internationale à l’aide d’un magazine qui s’est spécialisé, depuis quelques temps, dans le marketing à travers des numéros hors-série. Afrique Asie, pour ne pas le nommer, est apparemment parvenu à séduire les plus hautes autorités du pays. Au point d’amener le Premier Ministre à adresser, par l’intermédiaire de son Directeur de Cabinet, Makan Fily Dabo, des «lettres de recommandation» non datées aux Ministères. Objet : le bilan des deux mandats d’Amadou Toumani Touré mérite d’être dressé dans deux numéros spéciaux d’Afrique Asie, un journal qui «témoigne», une fois de plus, de l’intérêt «pour notre pays». Aussi, les Ministres sont invités «à réserver un bon accueil à l’équipe de Afrique Asie, et saisir cette opportunité de communication internationale au profit du Mali».

C’est fort de ce viatique opportuniste que ce magazine se permet de s’adresser directement aux Ministres, par courrier envoyé courant octobre, pour leur demander un accompagnement dans la réalisation d’un nouveau SPECIAL MALI Et pour mettre plus de pression, la chose est présentée comme étant une instruction personnelle du président de la République et du Premier Ministre, comme si ceux-ci ne pouvaient pas s’adresser directement à des Ministres aux ordres. Il révèle, dans le même courrier, qu’à la suite des numéros SPECIAL MALI N°1 et 2 de juin et octobre 2011, le président souhaite une troisième édition, en janvier-février 2012. Que ces numéros spéciaux sont placés «sous la coordination et le suivi» du Premier Ministre.

On savait que le chef du Gouvernement est en mission. Mais, ce que nous apprend la presse internationale, c’est que Mariam Kaïdama Sidibé est là pour orner et embellir le bilan de son chef ATT. Important préalable à l’accomplissement de «ses» réformes institutionnelles et politiques.

Pour soigner son image, le président de la République se méfie-t-il tant de la presse nationale? Peut-être. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il croit fortement aux vertus réparatrices des magazines internationaux, au point de passer par eux pour «féliciter et remercier d’avance toutes les structures nationales et internationales» qui, sans aucun doute, vont à nouveau alimenter la farce.

Et l’argent dans tout ça ?

Il y en a, bien sûr. Et à la pelle. Afrique Asie vend sa page en couleur à 7 525 euros, 4 pages à 32 000 euros, 2 pages à 15 050 euro, ½ à page 3750 euro, ¼ page 1550 euro, le bandeau à 1000 euro. A rappeler que 1 euro est égal à près à 700 FCfa. Autrement dit, pour un seul numéro spécial avec 20 pages d’insertions publicitaires et de publi-reportages, les autorités défalquent plus que pour la misère qu’elles accordent au fonds d’aide publique à la presse nationale. Et dire que ces gens prétendent œuvrer à la consolidation de la démocratie dans ce pays.

 

Cheick TANDINA

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