Après Cinq ans de Pouvoir : Les reproches d’un citoyen à ATT

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Nous sommes en campagne. Cette fois, nous qui avons toujours été soucieux du respect de la loi, et qui humblement avons attendu ce moment, exprimons nos points de vue sur la gestion de ces cinq ans, où le général mal élu, s”est complu dans la confusion totale.rn

Je tiens à préciser à celui-ci, qui pense à toutes les contestations qu”il est injurié, qu”il préside aux destinées d”un peuple hautement poli. Le respect est une vertu cardinale ici au Mali. La contradiction est le nerf de la démocratie. Ceci dit, rappelons que depuis le 8 juin 2002, ATT est en campagne et il n”a agi que pour une réélection coûte que coûte, qu”en importe les suites.

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Cinq ans durant, tout à cette pensée, il va piétiner au sens propre du terme le principe de la légalité qui, dans une République, permet au souverain de gérer et au citoyen de contrôler sa pratique à travers des institutions crédibles. Formé dans le moule du respect servile et docile, à tout accepter même l”inacceptable, le général aujourd”hui aux affaires reproduit le schéma de son évolution. Maurice Druon l”avait justement écrit : « Trop longtemps porté, le casque déforme la tête ».

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Durant ces cinq années, pour citer un scientifique et homme d”église, le père Teilhard de Jardins, « et voilà que l”apparence de la vérité remplace la vérité, Et que l”apparence de la nuit remplace la nuit ». Belle image du Mali de ces cinq dernières années, où sur tous les plans, il n”y a eu que des reculs.

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Les avancées notables et titanesques, se retrouvent dans la dilapidation des ressources publiques, la personnalisation du pouvoir, la confiscation des libertés et le culte de la médiocrité avec son frère jumeau, l”opportunisme. Entre le général et la loi, il y a comme la distance de la lune au soleil. Sa passion pour la violation de la loi est si prégnante, qu”avec la baraka d”une certaine classe politique aplatie et indignement bavarde, il a instauré, en violation du texte constitutionnel, en lieu et place de la démocratie, une monocratie.

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Ce mot qui, au début, était un néologisme, signifie pouvoir personnel. La monocratie, évoque le double monopole, de la détention du pouvoir et de la formulation de l”idéologie, qui appartient à un seul. De ce fait, on est très loin de la démocratie, où le pouvoir est dépersonnalisé et tombe dans l”escarcelle de l”ensemble des citoyens. C”est bien le sens qu”il faut donner à l”article 25 alinéa 1 et 2 de la Constitution : « Le Mali est une République indépendante, souveraine, indivisible, démocratique, laïque et sociale. Son principe est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ».

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Monocratie

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Or, durant ces cinq années, il y a eu une personnalisation à outrance du pouvoir, au point que le président s”est permis au cours d”une émission télévisée, le doigt pointé sur sa poitrine de clamer : « L”Etat c”est qui ? L”Etat, ce n”est pas moi ? Je suis l”Etat ! ». Marcel Prélot, l”un des plus grands constitutionnalistes, disait : « … le régime démocratique est celui du pouvoir anonyme, qu”il aboutit même à une dépersonnalisation parfois proche de l”évanouissement. La monocratie incarne le pouvoir en un seul homme ». La monocratie, pour reprendre Frantz Funck-Bretano maintient « les survivances personnelles de la puissance féodale ».

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En monocratie, le titulaire du pouvoir est lui-même créateur des espaces de pouvoirs. Ainsi, tout dépend de lui et c”est lui qui dispense les onctions. Argent, vice, médiocrité, opportunisme, banalisation des institutions… deviennent des espaces de pouvoirs. Le hic avec cette monocratie, c”est qu”elle précède une période de turbulence extrême si on n”y prend garde.

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En effet, lors des périodes de désagrégation, elle ramène l”autorité à son expression individuelle, antérieure à l”institutionnalisation, provoquant derechef l”absorption de la notion d”Etat dans celle de puissance personnelle. Ceci ressort de l”analyse de Georges Burdeau, sur la monocratie. Au sens propre du terme, c”est un pouvoir autocratique, même s”il arrive qu”on invoque des titres extérieurs de légitimité comme l”intérêt national, les élections, trop souvent truquées, toutes choses qui constituent des moyens de renforcement de ce pouvoir et en même temps, d”accentuation du pouvoir personnel.

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Le chef est le seul homme susceptible d”occuper la place suprême, parce qu”il incarne l”expression de l”unité nationale, parce qu’il a ramené le calme, parce que… Lui seul peut, face aux exigences du moment, interpréter intuitivement la volonté populaire. Ainsi, seul ATT connaît ce qui est bon pour les Maliens. Lui seul peut appeler le président français Mon cher Jacques… Le pouvoir personnel entraîne malheureusement au plan de la pensée, ce que Marcel Prélot qualifie de « réduction à l”unicité de la multiplicité des conceptions individuelles concernant la vie publique ».

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Ainsi, l”homme à la tête de l”Etat est le seul capable de discerner le bien de la collectivité. Sa doctrine est la seule valable, la seule bonne, donc susceptible d”être professée et propagée par tout moyen. Aussi, pendant cinq ans, il capte la télévision, réduit certains journaux à de simples tracts dédiés à sa cause, il bastonne le journaliste qui ose le critiquer, car même le vent et les oiseaux doivent porter son message. Tout propos contraire est une grave atteinte à la dignité du chef, donc un crime de lèse-majesté. Combien le Mali est tombé bien bas !

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Je voudrais ici interpeller la conscience des hommes du 26 mars, notamment ceux qui restent sourds à la voix d”outre-tombe des martyrs tombés sur le champ d”honneur, pour que fleurissent, grâce à la démocratie, les principes de liberté, d”égalité, d”universalité et de majorité. Malheureusement, au lieu de cela, se sont érigés en principes des fers autocratiques comme l”autorité, l”orthodoxie et l”exclusivité.

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En lisant ces mots, je voudrais que des leaders comme Me Tall, Mamadou Lamine Traoré, Dioncounda Traoré, Oumar H. Dicko, les anciens de l”US-RDA (auprès desquels nous avons fait nos premiers pas)… qui savent pour certains le contenu de ces principes d”autocratie, écoutent ce que leur conscience leur dit, en entendant, à la lecture de ces mots, les voix d”outre-tombe des martyrs. Vous êtes en train de bâtir un piédestal pour la plus ignoble dictature que ce pays a connue. Faites gaffe. Un homme averti en vaut deux, dit-on. Mais le jour où vous direz si je savais, ce sera trop tard. Regagnez alors qu”il est encore temps, le bercail des démocrates. Ella Wheeler Wilcox disait : « Pécher par le silence quand ils devraient protester, transforme les hommes en lâches ».

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La pratique du général est celle d”un militaire. Sa démocratie ne se conjugue qu”au temps des ordres et des exécutions. Sa mesure est celle-ci : « La discipline étant la force principale des armées, les ordres doivent s”exécuter sans contestation ni murmure ». Une telle culture s”appelle autocratie. Pour le général et sa nébuleuse du Mouvement citoyen, je voudrais leur faire découvrir ces épines citées ci-dessus ; à savoir : les principes d”autorité, d”orthodoxie et d”exclusivité :

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– Le principe d”autorité s”oppose à la majorité. Puisqu”un homme détient le pouvoir, il est le mieux placé pour décoder à la place de la masse, tiraillée entre divers points de vue. Aussi, son point de vue s”impose. Il n”y a pas à se préoccuper de l”accord du plus grand nombre, autrement que pour en surveiller et prévenir les éventuelles réactions.

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– Le principe de l”orthodoxie, qui s”oppose au principe d”égalité. La conception du chef, réputée la meilleure, cesse d”être une opinion parmi d”autres pour devenir un axiome politique. Cette seule doctrine est qualifiée pour inspirer l”action gouvernementale.

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– Le principe d”exclusivité, lui, va s”opposer au principe de liberté. La liberté en démocratie, vaut l”expression sans contrariété ni limites des opinions sur les affaires publiques et sur le comportement des gouvernants. Or en monocratie, ceci n”est plus tolérable. La seule doctrine du chef étant la bonne, les autres doivent s”effacer, de gré ou de force. Aussi, quand le général est critiqué dans son action, il s”énerve, et se trouve outragé dans sa dignité. Pense-t-il être le seul coq de la basse-cour ?

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Dans son analyse de la monocratie, le Pr. Prélot a cette très belle image : « L”orthodoxie politique a les mêmes conséquences que l”orthodoxie religieuse. Elle n”admet pas de salut en dehors d”elle, elle a ses apostats, ses schismatiques, ses hérétiques et ses excommuniés. A la limite, la monocratie est un régime sans liberté. Certes, elle peut tolérer certaines libertés, mais la logique du système restreint ou même élimine l”autonomie individuelle. La monocratie engendre le totalitarisme ».

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Même en voulant créditer ATT de la présomption de bonne foi, sa démarche et toute sa logique le conduisent indubitablement vers le pouvoir personnel. En effet, même s”il apparaît souvent entouré d”une cohorte de ministres, de conseillers, officiels et occultes, ceux-ci ne font que de la figuration. Ils sont dénués de tout pouvoir d”analyses persuasives, l”impulsion et la décision viennent ou de lui ou de sa coterie. Ainsi, entre pouvoir personnel et passion de la violation de la loi, il n”y a qu”un pas, allègrement franchi par le général.

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Au-delà de sa campagne prématurée et arrogante (excusez-moi général, ce n”est pas de l”injure), plusieurs aspects de sa pratique sont des atteintes à la légalité. La monocratie et le pouvoir personnel qui en est le pendant obligé, s”accommodent mal de la loi. Comme il est l”Etat, ATT s”autorise tout.

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Echecs patents

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Au Sénégal, nul ne se hasarde à en faire un thème de campagne. Ni en Côte d”Ivoire, ni au Burkina Faso. Seul au Mali, cette imposture est transformée en drapeau au grand dam de toutes celles et tous ceux qui ont une once de jugeote. En effet, cette politique, a commencé avec l”US-RDA de Mamadou Konaté et Modibo Kéita. Ceux qui s”agitent au nom de ce parti, pour le compte du général, ne sont pas dignes de cet héritage et il faut pour l”exemple distinguer. Même le général Moussa Traoré a continué, avec la Sema. Alpha Oumar également, avec les 300-Logements, les 80-Appartements, les 100-Logements de la Cité de la solidarité, la BHM.

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Comment, de but en blanc, sans crier gare, en 2002, comme si le peuple tout entier est devenu amnésique, on découvre une politique de logements sociaux, et des ATTbougou qui germent de partout. Relayé en cela par une certaine presse, grassement payée en nature, et par des prétendus intellectuels qui, pour quatre murs, ont avalé dignité et honneur.

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ATT a amené la corruption à un niveau industriel. L”ère de la confusion des genres, entre biens privés et biens publics a sonné. A l”époque où le Nigeria comptait parmi les pays les plus corrompus du monde, un de mes amis travaillant chez Ernest & Young m”a dit ceci : « Tous les contrôles hiérarchiques étant défaillants, la corruption devient forcément le nerf du système d”Etat ». Cette défaillance s”explique par la violation de principes simples qui constituent le fondement de l”administration, comme la récompense du mérite, le respect de l”avancement, le travail bien fait, l”égalité devant l”emploi, etc. Quand ces valeurs sont violées, quand l”appartenance à un mouvement politique et l”allégeance à un homme ou à un clan priment sur la compétence, quand ce sont là des garanties ou des clés qui ouvrent toutes les portes, alors qu”on ne s”étonne pas du pis-aller que l”on remarque au Mali.

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Ce constat est patent, n”en déplaise à ces colporteurs d”illusions, qui voient dans ce pays, l”eau de rose de la bonne gouvernance. Je voudrais envoyer ceux-ci dans nos gares routières, discuter avec les chauffeurs, à propos des misères à eux faites sur les routes et pistes du Mali.

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Je voudrais qu”ils aillent à la rencontre des justiciables maliens, arnaqués et avilis par une caste de magistrats, assurée de l”impunité grâce à l”onction d”un président du Conseil supérieur de la magistrature, dont tous les actes sont autant de violations de la Constitution et de la loi. Je souhaite que ces illusionnistes demandent un passeport, une carte d”identité, un lopin de terrain, etc.

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Qu”on aime ou qu”on n”aime pas ATT, il faut reconnaître très honnêtement que c”est avec lui que la corruption a été élevée à la dignité d”art. Elle est partout. C”est comme si un décret l”a imposée.

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Quant à l”école, ce général a porté une hypothèque sur l”avenir de ce pays. On pourra dire d’ATT, qu”il a tout fait pour rabaisser le pays au niveau intellectuel et culturel qui est le sien.

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Quand un chef d”Etat est incapable d”assurer une année scolaire normale durant tout son mandat, quand il admet qu”avec 5 sur 20 de moyenne, des lycéens terminalistes obtiennent le baccalauréat, quand dans la Faculté de droit, avec 7,5 sur 20 de moyenne des étudiants qui n”ont suivi que deux à trois mois de cours, passent en classe supérieure ou obtiennent la maîtrise, quand un recteur est démis de ses fonctions pour avoir sanctionné un doyen de Faculté notoirement véreux, que dire sinon que cet homme ne doit rien diriger.

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Il aura ainsi montré toute son inaptitude à gérer. C”est pourquoi, il faut lancer ce message aux étudiants et aux élèves en âge de voter. C”est le moment de prendre en main votre propre destinée en sanctionnant celui pour lequel il y a 16 ans vous vouiez dans une innocente contemplation votre admiration en scandant ATT, « an bi sa i no fè » (ATT, nous mourons pour toi). Il n”a rien compris de votre message. Vous l”avez pris moult fois en flagrant délit, car votre avenir est bien le dernier de ses soucis. Mieux, fous de rage d”avoir été trahis, vos aînés sont ces milliers de jeunes qui bravent la mort pour trouver en Europe et dans les Amériques cet eldorado qu’ATT encore promet à vos cadets, qu”il persiste à appeler impudiquement mes amis les enfants.

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Nécessaire sursaut

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Vos aînés fuient l”enfer créé pour eux par ATT. Faites-les revenir en décidant de bouter ATT hors du jeu politique, et de transformer dans l”effort et le travail ce pays, non en mendiant et en quémandant comme le fait ce général. Que chaque élève et étudiant transforme son bulletin de vote en arme fatale contre un général qui va vous réduire en loque humaine, sans espérance, dans un Mali de corruption, de médiocrité et de forfaiture de tout genre. C”est pourquoi, voter contre ATT, c”est faire acte de salubrité publique, pour le Mali et pour l”avenir, le vôtre. Je voudrais vous transmettre cette apostrophe de Démosthène « Levez-vous jeunesse du Mali et reprenez le flambeau de gloires, comme en 1960 et en 1991 ».

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Que dire au paysan malien, sinon qu’ATT qui dénonce devant eux et partout la politique des subventions accordées aux paysans occidentaux est le même qui se glorifie d”avoir pris des milliards avec ces gens qui vous affament. Cette fois c”est pour asphyxier tout le monde. Comprenne qui pourra en ce discours. C”est ce que les bambaras appellent « i té djèguè fé, nka i ti ban ko da la » (tu n”aimes pas le poisson, cependant tu es toujours au bord du marigot) Quand entre le dire et le faire il y a un décalage, il faut avoir peur.

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Paysan, prenez votre destinée en main. Il semble que les riziculteurs de l”Office du Niger sont décidés à ne plus se laisser faire et à dire par les urnes au général qu”ils ont compris que la cause de leur malheur vient de lui et de lui seul. Bravo à ces citoyens responsables, qui ont compris qu”un président de la République, dans une démocratie, n”est président que grâce aux suffrages de l”ensemble des femmes et des hommes de la cité.

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Chaque bulletin de vote est un mandat, une parcelle du pouvoir qui est délégué à celui qui entend présider aux destinées du pays. Ce ne sont pas les T-shirts, les pagnes, le thé ou le sucre, l”argent facilement distribué… Ce sont là des signes de mépris, et celui qui méprise autant son peuple pour croire que la valeur d”un citoyen, un honorable électeur équivaut à un paquet de thé ou à un kilogramme de sucre, franchement, celui-là ne mérite pas de diriger le pays. Or, cette campagne présidentielle commence avec une telle débauche d”argent de la part du candidat ATT, qu”en toute logique il faut dire qu”il est riche, immensément riche. Comment l”est-il devenu ?

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Docteur Panghalê

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