En cette fin de quinquennat, le front social s’échauffe. Quelques jours après la protestation des travailleurs des Aéroports du Mali contre le projet de privatisation et les marches de l’Association « Appel du Mali » contre les spéculations foncières à la mairie du district de Bamako, c’est au tour du Collectif des partants volontaires à la retraite de battre le pavé. Ces derniers ont marché le jeudi 5 janvier pour dénoncer « la violation de leurs droits » dans une déclaration remise au Premier ministre après le blocage des manifestants à la porte de la Cité administrative par les forces de l’ordre.
Trafic bloqué à la Cité ministérielle
Partie de la Bourse du travail, la marche des partants volontaires s’est achevée le jeudi dernier devant la Cité ministérielle. Encadrés par un dispositif policier plutôt impressionnant, les marcheurs ont du se résoudre à rester à la porte. C’est le porte-parole du Collectif, M. El Bachir Ben Baby, qui se chargera de rendre publique la déclaration auprès de Mme le Premier ministre. S’il a été reçu par Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé, ordre a été donné aux autres participants à la marche de ne pas franchir le seuil de l’entrée de la Cité. Pour les marcheurs, visiblement très remontés contre le régime, il s’agit d’une « décision anti-démocratique » qui « viole le droit fondamental à la manifestation ».
C’est donc sous le soleil que les anciens fonctionnaires de l’Etat, (partis à la retraire suite aux Programmes d’ajustement structurel de la Banque mondial et du Fond monétaire international), attendront leur camarade. Pour les forces de l’ordre présentes sur les lieux, ce sont les consignes de sécurité reçues par la hiérarchie.
Pendant donc plus d’une heure de temps, le trafic autour du « Rond point de la Paix » a été fortement perturbé. Les usagers qui étaient déjà à l’intérieur de la Cité ministérielle, ont du s’armer de patience avant l’ouverture (contre les consignes de fonctionnement normal) de la porte débouchant sur le fleuve Niger. « Rien qu’à travers ce blocage, notre message a passé », s’exclame un marcheur qui pense que « le gouvernement a traduit les partants volontaires avec des promesses non tenues ».
« Nous voulons rentrer dans nos droits »
L’histoire des partants volontaires à la retraire au Mali remonte aux années 1980 quand les institutions financières internationales ont imposé au Mali (plongé dans une crise économique) les Programmes d’ajustement structurel (PAS). Suite à ces programmes, plusieurs entreprises et sociétés d’Etat ont été privatisés, et des milliers de travailleurs de la Fonction publique sont priés de laisser le travail, contre paiement de leurs droits. A ce jour, on s’interroge sur le sort réservé aux 6.665 ex-travailleurs de l’Etat malien concernés par ces programmes.
Le gouvernement avait en son temps négocié leur départ volontaire à la retraite moyennant un projet pour chaque partant. C’est ainsi que la Banque mondiale avait décaissé 310 milliards de nos francs. Le constat amer, expliquent les marcheurs, est que les retraités volontaires à la fonction publique n’ont pas touché le tiers de ces sommes. Pis, les projets prévus n’ont jamais été financés. « Nous sommes délaissés et nous ne savons plus à quel saint se vouer », déclarent les manifestants, brandissant des slogans hostiles au FMI et à la Banque mondiale.
Les marcheurs revendiquent ainsi l’octroi d’une pension pleine et entière d’ancienneté à chaque volontaire, l’audit des 2 milliards 500 millions de nos francs octroyés par le gouvernement comme aide sociale, ainsi que l’octroi d’un taux forfaitaire de 7 millions de nos francs pour leur réinsertion dans le circuit économique, etc. En attenant la satisfaction de ces revendications, les partants volontaires doivent prendre leur mal en patience.
Issa Fakaba Sissoko