Le parti majoritaire, l’Adema- PASJ, s’empêtre de plus en plus dans ses contradictions internes. Une fronde généralisée est dirigée contre le candidat le plus en vue, Dioncounda Traoré, et est en passe de réussir non seulement à écarter celui-ci mais à compromettre définitivement les chances des «Abeilles» à la prochaine présidentielle. En effet, dans les coulisses, se trame une stratégie permettant à Modibo Sidibé de succéder à ATT.
Dans le processus de désignation du candidat à l’investiture de l’Adema pour l’élection présidentielle prévue en avril 2012, la Commission ad hoc, qui continue de patauger, a demandé et obtenu lors de la réunion du Comité exécutif une nouvelle date, le 23 juillet, comme dernier délai. Au cours de cette réunion, les sept prétendants étaient tous d’accord pour la désignation d’un candidat consensuel. Mais, selon plusieurs sources concordantes, certains de ces candidats auraient fait marche arrière en demandant à la commission ad hoc de retirer la candidature de Dioncounda Traoré, le consensus devant n’être fait qu’entre les six autres concurrents. Selon les mêmes sources, Alpha Oumar Konaré, membre fondateur et ancien président du parti, ex-chef de l’Etat, qui garde encore une très grande influence sur l’Adema, aurait également émis le souhait de voir Dioncounda Traoré écarté de la course.
Cette éventualité, si elle se concrétisait, mettra automatiquement Sékou Diakité en position de force, même s’il devrait compter avec Ibrahima Iba N’Diaye qui deviendra son rival le plus sérieux. Mais, aux dires de plusieurs observateurs, aucun de ces trois prétendants les plus sérieux (Dioncounda Traoré, Sékou Diakité et Ibrahima Iba N’Diaye) n’aura la caution ni d’Alpha Oumar Konaré ni d’Amadou Toumani Touré, les deux véritables maîtres du jeu. Et l’Adema, dont plusieurs cadres et militants rêvent d’une reconquête de Koulouba, est parti, pour une troisième fois consécutive, pour être le grand perdant de la prochaine élection présidentielle. Et, par la même occasion, connaitre une énième déchirure. Le scénario de 2002, qui a vu Soumaïla Cissé quitter le parti pour fonder sa propre formation politique, se répétera inévitablement car quelque soit le candidat investi le 23 juillet ou, plus probablement beaucoup plus tard, il sera délaissé par une large proportion des «Abeilles» pour un candidat choisi à l’extérieur de la «Ruche». Un candidat, quel qu’il soit, qui aura toutes chances de remporter l’élection présidentielle dans la mesure où il pourra compter sur toutes les permissivités du fichier électoral RACE, sur l’accompagnement d’une très grande partie de l’électorat du Pasj, sur le soutien de dissidents d’autres partis politiques, y compris de ceux qui sont en lice, et, surtout, de l’onction de l’actuel chef de l’Etat et de son prédécesseur.
Un candidat dont le profil se précise de jour en jour
Mais, à moins de dix mois du scrutin présidentiel, dont la date officielle n’est pas encore fixée, Alpha Oumar Konaré n’a pas encore désigné son candidat. On le dit détaché de la chose publique et retiré dans le confort douillet de sa résidence officielle de Titibougou où il serait en train d’observer la plus stricte neutralité. Il est très peu probable que l’ancien président de la République, qui a régné pendant dix longues années, à coups d’intrigues et de mascarades, englué dans un excessif besoin d’affirmation de soi et de domination, avec, il est vrai, plus de bas que de hauts, en soit réduit à se détacher du jeu politique et à laisser place nette aux autres. Surtout qu’il est assuré de pouvoir influer sur ou même changer les règles du jeu. Ainsi, selon plusieurs sources, il aurait donné mission à des cadres de la «Ruche» de tout mettre en œuvre pour, le moment venu, aider à l’investiture de «son protégé», Modibo Sidibé avec lequel il a longtemps collaboré étroitement, et avec lequel il n’a jamais véritablement coupé les ponts.
Son successeur à la tête de l’Etat, Amadou Toumani Touré, affirme à qui veut l’entendre qu’il n’a pas de candidat, de dauphin, de préféré. Pour les mêmes raisons que son prédécesseur, lui non plus ne peut pas ne pas avoir préparé sa succession, lui qui a créé un parti politique dont le seul but, aux dires de ses dirigeants, serait de préserver, de consolider et de pérenniser les acquis du programme PDES. Et le président et ses amis doivent obligatoirement avoir cela à l’esprit s’ils veulent atteindre leur but. Dans les sphères du pouvoir, à l’heure actuelle, personne d’autre que l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé ne connait à fond les dossiers du programme PDES ni ne maîtrise le fonctionnement et les rouages de l’Etat.
Récemment, le président du PDES a avoué en public que son parti présentera un candidat en 2012, un candidat qu’il n’a pas nommé. Mais ce que Hamed Diane Séméga a volontairement omis de préciser c’est que ce candidat ne sera pas forcément issu des rangs de son parti. Or, parlant de Modibo Sidibé, il a dit que ce dernier n’est pas un militant du PDES. ATT non plus n’a jamais dit que «son» candidat viendra du parti PDES. Au contraire, selon plusieurs observateurs, il ne désignerait jamais un membre de la direction de ce parti. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, tout en les désapprouvant, il s’abstiendrait de s’intéresser aux agitations actuellement en cours dans son parti.
Et sur la personne de Modibo Sidibé, lui et son prédécesseur n’auraient jamais eu de divergences. Au contraire, ils seraient en train de travailler de concert pour l’avènement de leur ancien chef de cabinet, ancien ministre, ancien chef du Gouvernement. Avec la conjugaison de tous les facteurs probants, ils ne fait aucun doute que Modibo Sidibé est le prochain président de la République.
Cheick TANDINA